« Stormquakes » : découverte d’une relation insoupçonnée entre cyclones et activité sismique

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Ouragan Bob en 1991. Crédits : Needpix.

Une étude parue le 14 octobre annonce la découverte d’un nouveau phénomène géophysique. Ce dernier – nommé stormquake – implique un lien entre les cyclones et l’activité sismique. Il concrétise une interaction particulière entre l’atmosphère, l’océan et la croûte terrestre qui n’avait jamais été identifiée auparavant. 

Le 12 octobre dernier, un séisme de magnitude 5,7 se produisait près de la préfecture de Chiba au Japon. Et ce alors que le typhon Hagibis atteignait le pays accompagné de vents violents, d’une forte houle et surtout de pluies diluviennes. D’aucuns ont pu envisager un lien de cause à effet entre les deux phénomènes.

S’il est prématuré de conclure, l’hypothèse n’est pas extravagante en soi. En effet, en 2011 des chercheurs expliquaient que les glissements de terrain dus aux fortes précipitations pouvaient favoriser des mouvements le long de certaines failles. Autrement dit, augmenter le risque de tremblements de terre les mois et années suivants. Toutefois, ce processus concerne essentiellement les régions à forts reliefs.

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Vue satellite du typhon Hagibis le 11 octobre 2019. Crédits : https://rammb.cira.colostate.edu.

Découverte d’un nouveau phénomène géophysique

Très récemment, l’existence d’un lien plus direct entre phénomènes atmosphériques et activité sismique a été découverte. Il se manifeste cette fois-ci en mer, au niveau de certaines marges continentales. Les chercheurs ont publié leurs résultats le 14 octobre 2019 dans la revue Geophysical Research Letters.

Ce phénomène géophysique jamais identifié auparavant a été nommé stormquakes. Littéralement, tremblements de tempête. « Pendant la saison des tempêtes, les ouragans ou autres cyclones transfèrent de l’énergie vers l’océan sous forme de puissantes vagues. Et les vagues interagissent avec la Terre solide, produisant une riche activité sismique », explique Wenyuan Fan, auteur principal de l’étude.

Autrement dit, les vagues générées viennent buter sur le plancher océanique peu profond des marges continentales et transfèrent de l’énergie cinétique à la croûte terrestre. Ce processus est rapide. Aussi, la tempête agit comme une source cohérente d’ondes sismiques – lesquelles diffusent sur plusieurs milliers de kilomètres à la ronde. Leur intensité peut dépasser l’équivalent d’un tremblement de terre de magnitude 3,5. En outre, elles perdurent de plusieurs heures à plusieurs jours.

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Stormquakes observés entre 2006 et 2015 en rouge et tremblements de terre en bleu. Les stations de mesures sismiques en triangles violets. Plus précisément, les zones sans activité de type stormquakes sont entourées en orange. Celles avec activité sont entourées en jaune. Crédits : Wenyuan Fan & al. 2019.

Une fréquence d’occurrence étonnement élevée

Les stormquakes sont en fait étonnamment communs. Dans leur étude, les auteurs se sont uniquement concentrés sur les données sismiques autour de l’Amérique du Nord. Rien qu’ici, 14 000 stormquakes ont pu être recensés entre 2006 et 2015.

Notons qu’ils sont concentrés dans certains secteurs – comme le golfe du Mexique – où la géographie sous-marine est favorable. Par ailleurs, aucun n’a été observé entre mai et août, ce qui concrétise la saisonnalité des tempêtes majeures. Ce phénomène existe de toute évidence aussi en Europe ou en Australie, bien que ceci n’ait pas encore été formellement démontré.

Crédits : WikiImages/Pixabay

En pratique, les stormquakes n’influencent que peu la vie sur les continents adjacents en raison de la fréquence très basse des ondes générées et d’épicentres situés au large. Ce sont essentiellement les sismographes qui ressentent les vibrations. Toutefois, ils pourraient se révéler extrêmement utiles pour en apprendre plus sur la structure interne de notre planète et la dynamique océanique. Ou encore au suivi du changement climatique.

Le point surprenant est que les données nécessaires pour mettre en évidence l’existence d’un tel phénomène étaient disponibles depuis plus d’une décennie. Cependant, les signaux sismiques correspondants étaient considérés comme un simple bruit de fond. Le résultat d’interactions incohérentes entre l’océan et la croûte terrestre, pensait-on alors. De fait, il a fallu attendre qu’une équipe de chercheurs se penche plus sérieusement dessus pour s’apercevoir que c’était plus qu’un simple bruit statistique. Qu’il y avait là l’empreinte d’un nouveau phénomène géophysique.

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