Un trou d’ozone record s’est récemment formé en Arctique

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Crédits : NASA Ozone Watch.

En ce début de printemps, la région polaire nord connaît une situation exceptionnelle. Pas en surface mais à haute altitude, dans la stratosphère. En effet, jamais la quantité d’ozone n’a été aussi basse. Un record que l’on doit en premier lieu à la présence d’un vortex stratosphérique anormalement puissant, propice à une déplétion marquée de la couche d’ozone. 

Lorsque l’on parle du « trou » d’ozone (O3), on fait usuellement référence à l’hémisphère sud. Et pour cause, un net déficit se forme chaque fin d’hiver au-dessus du continent Antarctique. Autrement dit, entre septembre et octobre.

Un phénomène saisonnier qui tend à s’atténuer lentement suite à la signature du protocole de Montréal en 1987. Ce dernier visant à bannir l’utilisation des composés responsables de la destruction de l’ozone stratosphérique (les CFC notamment). Selon les experts, le niveau moyen de 1980 devrait à nouveau être atteint d’ici 2060-2070. Un délai lié à la longue durée de vie des gaz impliqués.

Un déficit record d’ozone près du pôle nord

Or, en ce début 2020, c’est l’Arctique qui est concerné par la présence d’un trou d’ozone. Un événement tout à fait inhabituel apparu au cours des dernières semaines. Le 29 mars, les données fournies par le Programme européen de surveillance de la Terre (Copernicus) rapportaient une large plage de valeurs inférieures à 250 unités Dobson.

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Évolution du contenu en ozone (en millipascal) entre le 1 février et le 26 mars 2020 en fonction de l’altitude et selon une coupe méridienne. Le pôle nord se situe au centre. Crédits : ECMWF / Copernicus.

Ce contenu en O3 intégré sur la verticale se situe à des niveaux records bas et couvre une surface équivalente à trois fois celle du Groenland. « De mon point de vue, c’est la première fois que l’on peut parler d’un vrai trou d’ozone en Arctique » rapporte Martin Dameris, physicien de l’atmosphère au Centre allemand pour l’aéronautique et l’astronautique.

Au cours des derniers jours, les relevés effectués par ballons météorologiques ont mesuré une perte allant jusqu’à 90 % à 18 kilomètres d’altitude. À la place d’une valeur normale située autour de 3,5 ppm (parties par million), les capteurs rapportaient environ 0,3 ppm. « Cela bat toute perte d’ozone que nous avons pu voir par le passé » indique Markus Rex, physicien à l’Institut Alfred Wegener en Allemagne. Jusqu’alors, le record datait de 2011.

Un événement lié à un vortex polaire survitaminé

Cette anomalie concrétise la présence d’un vortex polaire très concentré – et donc très froid – depuis le début de l’hiver. Les températures très basses induisant la formation de nuages stratosphériques. Or, les cristaux de glace qui les composent tendent à fixer les molécules destructrices de l’ozone comme le chlore ou le brome.

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Contenu total en ozone sur la colonne atmosphérique le 29 mars (gauche) et température à 50 hPa (droite). Les valeurs sont données en unités Dobson et en degrés, respectivement. Crédits : ECMWF / Copernicus.

Avec le retour des rayons solaires en sortie de nuit polaire, ces molécules ont été libérées et la destruction catalytique de l’ozone s’est rapidement activée. En conséquence, la concentration en O3 a rapidement diminué. Dans le même temps, le vortex survitaminé a empêché la remontée d’ozone depuis les latitudes plus basses qui aurait pu compenser en partie les pertes.

Le besoin de températures excessivement froides associées à un vortex polaire très concentré explique pourquoi l’Arctique est habituellement épargné par un déficit saisonnier d’ozone. En effet, la géographie de l’hémisphère nord ne permet pas une stabilité du vortex stratosphérique comme dans l’hémisphère sud.

En conclusion, bien qu’il apparaisse bénin par rapport à son homologue austral, le trou d’ozone actuellement présent en Arctique est exceptionnel pour le monde boréal. Le déficit se résorbera au cours des prochaines semaines en lien avec l’évolution saisonnière. En d’autres termes, avec le réchauffement de la stratosphère et la disparition subséquente du vortex.

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