Les ornithorynques brillent d’un étrange bleu-vert sous la lumière UV

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Crédits : Mammalia 2020

Une étude nous révèle un nouveau mammifère biofluorescent sous la lumière ultraviolette : l’ornithorynque. Autrement dit, ce drôle d’animal « brille dans le noir ». D’après les chercheurs, il s’agirait d’une adaptation évolutive à la vie nocturne.

L’ornithorynque (Ornithorhynchus anatinus), véritable bizarrerie de la nature, continue de nous surprendre. Il ne lui suffit pas d’être un mammifère qui pond des œufs, de porter un « bec de canard » et des pattes palmées, ou encore de chasser par électroréception… Non, l’ornithorynque brille également sous la lumière ultraviolette.

Les capacités de biofluorescence et de bioluminescence sont développées dans de nombreux autres organismes. Citons les champignons, les poissons, le phytoplancton, les reptiles ou encore les amphibiens. Néanmoins, chez les mammifères, la biofluorescence du pelage sous la lumière ultraviolette n’avait été documentée que chez certains opossums et chez des écureuils volants placentaires. L’ornithorynque rejoint donc un club très exclusif. En outre, il est le seul monotrème connu, ou mammifère pondeur, capable de réussir cette astuce. Les détails de cette étude sont publiés dans la revue Mammalia.

Des animaux « verts » ou « cyan » sous la lumière UV

La biologiste Paula Spaeth Anich, du Northland College, est celle qui a découvert la biofluorescence chez les écureuils volants (l’année dernière). La découverte avait eu lieu par accident lors de prospections nocturnes de lichens. Les observations sur le terrain ont ensuite été confirmées avec l’analyse de spécimens conservés en musée.

Les ornithorynques étant comme les écureuils volants et les opossums des animaux dits nocturnes-crépusculaires, Paula Spaeth Anich et son équipe ont donc cherché à savoir si le monotrème était aussi capable de biofluorescence.

Dans cet esprit, les chercheurs ont passé sous UV trois spécimens de musée (deux mâles et une femelle) provenant du Field Museum of Natural History de Chicago et du University of Nebraska State Museum. L’ornithorynque étant une espèce quasi menacée, avec une tendance démographique en déclin, les chercheurs ont en effet préféré se concentrer sur des spécimens empaillés.

Résultat : si nous savons que sous la lumière visible la fourrure des ornithorynques apparaît naturellement brune, en revanche, leur fourrure est ici apparue « verte » ou « cyan » sous les ultraviolets.

Comme le souligne Kassiopée Toscas pour Science&Vie, «les animaux biofluorescents absorbent des ondes lumineuses de courte longueur (entre 200 et 400 nanomètres), comme les UV, et réémettent des longueurs d’onde plus longues (entre 500 et 600 nanomètres). Résultat : on les perçoit sous d’autres nuances».

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Un spécimen mâle photographié sous lumière visible à gauche, sous lumière ultraviolette au milieu, et sous UV avec un filtre jaune à droite. Crédits : Mammalia

Une adaptation à la vie nocturne ?

Les chercheurs soulignent que les deux mâles et la femelle présentaient cette caractéristique. Autrement dit, il ne s’agirait pas d’un dimorphisme sexuel. D’après les biologistes, il s’agirait plutôt d’une adaptation évolutive aux conditions de faible luminosité.

Leur fourrure « brillante », d’une part, pourrait être un moyen pour ces animaux de se voir et d’interagir les uns avec les autres durant la nuit. Le fait d’absorber la lumière ultraviolette, d’autre part, pourrait également les aider à se camoufler aux yeux des prédateurs sensibles aux UV. Autrement dit, le fait de renvoyer des ondes plus longues pourrait permettre de passer inaperçu auprès de ceux plus à l’aise avec les ondes plus courtes.

Naturellement, la petite taille de l’échantillon ne peut aujourd’hui permettre ce type de conclusion. Des recherches sur le terrain seront donc nécessaires pour tenter de comprendre pourquoi l’ornithorynque a développé une telle capacité.