Faut-il craindre une privatisation du système météorologique mondial ?

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Le système météorologique mondial permet de prévoir différents événements tels que les tempêtes ou encore les inondations. Toutefois, il semble que ce système considéré depuis longtemps comme un bien commun pour l’humanité est en passe de devenir une marchandise pour des acteurs du secteur privé.

Ouvrir la porte au secteur privé

En 2019, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) tenait son congrès quadriennal à Genève (Suisse). Son secrétaire général Petteri Taalas avait alors expliqué que l’organisation était de plus en plus nécessaire à l’humanité, car le changement climatique est un enjeu global. Il rappelle en effet que “l’OMM contribue aux mesures d’atténuation en livrant des faits scientifiques fondés sur l’observation et la modélisation à l’intention des décideurs, et joue un rôle majeur dans les politiques d’adaptation en favorisant l’installation de services d’alerte précoces multidangers.”

À chaque congrès de l’OMM, nous retrouvons à peu près les mêmes préoccupations, mais cette fois, il y avait une différence. Dans les mesures détaillées, il était question d’une « mobilisation générale », comme s’il s’agissait d’une guerre. L’objectif est ici de détruire les barrières entre les différents domaines de recherche, établir des liens plus proches entre la science, les services ainsi que les décideurs notamment politiques.

Concrètement, il est question d’ouvrir la voie à une plus importante participation du secteur privé. Rappelons tout de même que les services météorologiques de tous les pays ont une tradition ancienne : partager leurs données et leurs services gratuitement. Toutefois, l’arrivée de géants tels que Google, Amazon ou encore Facebook laisse craindre le pire pour Andrew Blum, journaliste et auteur. L’intéressé est à l’origine de la parution de l’ouvrage The Weather Machine. How we See Into the Future (2019).

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De futures inégalités criantes ?

Comment la « weather machine » va-t-elle s’adapter à ce genre de bouleversements ? Rappelons tout de même que l’OMM estime que les services météorologiques mondiaux représentent un total de plus de cent milliards de dollars par an. Cette somme comprend leur valeur économique, mais aussi sociétale, notamment via la réduction des impacts des catastrophes naturelles. Or, Andrew Blum rappelle que le libre-échange de données donne le ton du fonctionnement de ce dispositif mondial et plus précisément de son efficacité.

L’OMN appelle donc aujourd’hui les entreprises du secteur privé à participer à l’amélioration du système météorologique mondial. Néanmoins, ces sociétés accepteront de s’associer seulement si elles y trouvent leur compte financièrement. Allons-nous observer dans un futur proche de plus en plus d’injustices ? Évoquons les pays menacés par des phénomènes climatiques extrêmes. Ceux-ci reçoivent an amont des informations de l’OMM afin de se préparer à l’urgence de la situation. Ainsi, ils peuvent prendre des mesures comme l’évacuation des populations. Mais que se passera-t-il si, un jour, ces pays ne reçoivent plus ces données ?

Un géant du privé a déjà quant à lui décidé de faire cavalier seul. Il s’agit de IBM, désirant participer au système à deux niveaux bien distincts. Clairement, il s’agit de servir les clients pouvant payer pour de meilleures prévisions. Évidemment, cette façon de voir les choses laisse de côté ceux qui n’ont pas les moyens. IBM avait d’ailleurs annoncé en 2019 la création de son propre modèle météorologique global. Celui-ci reposera sur les des millions d’observations quotidiennes obtenues par les capteurs barométriques situés dans les smartphones.