Pourquoi l’éruption du Hunga Tonga n’a-t-elle (quasiment) pas refroidi le climat ?

hunga tonga
Crédits : NOAA / RAMMB / CIRA.

L’éruption du volcan Hunga Tonga dans le Pacifique sud-ouest en janvier dernier a été si puissante que son panache éruptif s’est propagé à la basse mésosphère, traversant ainsi l’entièreté de la stratosphère et atteignant l’altitude record de 58 kilomètres. Une étude parue ce 1er mars dans la revue Advances in Atmospheric Sciences a désormais quantifié l’impact de cette éruption historique sur le climat global.

Les éruptions volcaniques de forte intensité ont tendance à refroidir le climat. Par exemple, à la suite de l’éruption du mont Pinatubo en juin 1991, la température moyenne du globe a chuté d’environ 0,5 °C l’année suivante. Cependant, dans le cas du Hunga Tonga, les chercheurs expliquent que l’effet refroidissant est particulièrement faible. Comment rendre compte de ce phénomène ?

Le rôle-clé du dioxyde de soufre

Il faut tout d’abord rappeler que la capacité d’une éruption volcanique à refroidir le climat tient à l’injection de dioxyde de soufre (SO2) dans la stratosphère par le panache éruptif. En effet, après oxydation et hydratation, le SO2 évolue en aérosols sulfatés (H2SO4). Ce dernier prend la forme de petites gouttelettes d’acide sulfurique qui ont la propriété de réfléchir très efficacement le rayonnement solaire vers l’espace.

À cette altitude, les aérosols ne sont pas facilement dissipés et sont en outre dispersés à grande vitesse autour du globe par les puissants vents stratosphériques. L’effet est donc suffisamment persistant et étendu pour entraîner une diminution de la température en moyenne mondiale. Toutefois, les mesures satellitaires ont montré que dans le cas du Hunga Tonga, le panache éruptif était très pauvre en dioxyde de soufre.

Hunga Tonga
Simulation de l’effet refroidissant associé à l’éruption du Hunga Tonga en janvier 2022. Crédits : Meng Zuo & coll. 2022.

Hunga Tonga : un refroidissement noyé dans la variabilité interne

Tandis que le Pinatubo a injecté vingt millions de tonnes de SO2 dans la stratosphère, le Hunga Tonga n’en a propulsé que quatre cent mille. Par ailleurs, la latitude du volcan fait que la petite quantité d’aérosols sulfatés n’a pas été dispersée de façon efficace, mais est restée cantonnée à l’hémisphère sud. Les estimations initiales faisant mention d’un refroidissement de 0,03 °C à 0,1 °C un à deux ans après l’éruption ont par conséquent été revues à la baisse.

« En effet, les émissions des éruptions volcaniques de l’hémisphère sud se limitent en grande partie à circuler dans le même hémisphère et les tropiques, avec moins d’impact sur l’hémisphère nord », rapporte Tianjun Zhou, coauteur du papier. « Cela conduit à son tour à un refroidissement global plus faible que celui des volcans de l’hémisphère nord et des volcans tropicaux ».

Les auteurs ont trouvé un refroidissement marginal de 0,004 °C en moyenne mondiale sur la première année suivant l’éruption, avec une influence plus forte dans certaines régions comme l’Australie, l’Amérique du Sud ou l’Antarctique où ce chiffre atteint 0,01 °C. L’effet passera toutefois presque inaperçu, car étant du même ordre que la variabilité interne au système climatique, ceci, bien entendu, dans l’hypothèse où le volcan ne donne lieu à aucune autre éruption d’ici là.