Hunga Tonga : le panache volcanique est monté jusqu’en mésosphère

Vue satellite du panache lors du pic de l'éruption. Crédits : NASA Earth Observatory.

L’analyse de données satellitaires à très haute résolution montre que le panache volcanique de l’éruption du Hunga Tonga en janvier dernier a atteint la mésosphère. Cet évènement bat très largement le précédent record établi par l’éruption du mont Pinatubo (Philippines) en juin 1991.

Le 15 janvier 2022, l’île Hunga Tonga-Hunga Ha’apai située dans le royaume des Tonga à l’ouest du Pacifique a connu le réveil du volcan sous-marin éponyme. Alors entré dans une phase éruptive majeure, ce dernier a donné naissance à un panache volcanique d’une ampleur tout à fait remarquable. Outre les nombreuses images et vidéos partagées sur les réseaux sociaux, l’immense nuage de cendres a été activement suivi par les satellites géostationnaires GEOS-17 et Himawari-8.

Un panache volcanique d’une altitude record

En étudiant les données acquises par les satellites américain et japonais, un groupe de scientifiques de la NASA a récemment découvert que l’altitude maximale atteinte par la colonne éruptive était de 58 kilomètres, autrement dit, dans la mésosphère inférieure. Selon les chercheurs, il s’agit du panache volcanique le plus haut jamais recensé depuis que l’on dispose d’observations satellitaires. Le précédent record remontait à l’éruption du Pinatubo en juin 1991 avec une altitude maximale estimée à 35 kilomètres.

L’animation présentée ci-dessus provient des travaux de Joshua Stevens, Kristopher Bedka et Konstantin Khlopenkov (NASA) et représente l’altitude du panache volcanique en fonction du temps. On observe un pic d’intensité au début de la phase éruptive avec des nuances de jaune et de blanc, concrétisant une entrée des gaz et des particules dans la mésosphère inférieure.

Pour arriver à ces résultats, les scientifiques ont utilisé deux méthodes. L’une tire parti du fait que les satellites n’ont pas observé l’éruption sous le même angle. Par stéréoscopie, il est alors possible de recréer une image tridimensionnelle, un peu comme pour le processus de vision humaine. Par ailleurs, la mesure des ombres portées et le recours à un modèle atmosphérique ont permis de confirmer et de préciser les calculs. Sur l’illustration de couverture, on voit à ce titre la partie la plus élevée de la colonne éruptive projeter son ombre sur les parties plus basses.

Des conséquences météorologiques fortes, mais un impact climatique limité

Les images permettent en outre d’apprécier la violence inouïe de l’évènement. Il aura fallu seulement trente minutes au panache pour s’élever de la surface de la mer jusqu’à la mésosphère, en traversant toute l’épaisseur de la stratosphère. « L’intensité de cet évènement dépasse de loin celle de n’importe quel nuage d’orage que j’ai jamais étudié », rapporte Kristopher Bedka, chercheur à la NASA. « Nous avons la chance qu’elle ait été aussi bien vue par notre dernière génération de satellites géostationnaires et nous pouvons utiliser ces données de manière innovante pour documenter son évolution ».

panache volcanique
Altitude du panache volcanique au pic de l’éruption. Les couleurs jaune et blanc indiquent respectivement des altitudes supérieures à 50 et 55 kilomètres. Crédits : NASA Earth Observatory.

« Lorsque de la matière volcanique monte aussi haut dans la stratosphère, où les vents ne sont pas aussi forts, les cendres volcaniques, le dioxyde de soufre, le dioxyde de carbone et la vapeur d’eau peuvent être transportés tout autour de la Terre », souligne Konstantin Khlopenkov, également impliqué dans la présente analyse. Quant à la partie du panache arrivée en mésosphère, elle s’est rapidement évaporée en raison de la sécheresse extrême de l’air à cette altitude.

Enfin, notons que si le panache a donné lieu à d’impressionnantes manifestations météorologiques, telles la propagation d’une onde de pression autour du globe et une activité électrique extrêmement importante à proximité des Tonga, son impact climatique restera faible. En effet, le contenu en dioxyde de soufre, principal gaz par lequel les volcans affectent le climat, était notablement bas. On peut toutefois s’attendre à des impacts un peu plus visibles sur la chimie stratosphérique, en particulier en ce qui concerne l’ozone.