Covid-19 : des anticorps « facilitants » à l’origine d’une seconde infection plus grave ?

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Et si certains anticorps produits par notre organisme ne protégeaient pas contre le SARS-CoV-2 ? Des chercheurs italiens estiment qu’il est possible qu’au contraire, ces mêmes anticorps facilitent l’apparition d’une deuxième infection.

Des infections « biphasiques »

Une équipe de chercheurs affiliés notamment au Département de santé publique de Trévise (Italie) ont publié un commentaire dans le BMJ Global Health le 11 juin 2020. Il y est question des infections Covid-19 « biphasiques ». Certains patients montrent en effet de faibles symptômes à l’apparition de la maladie, mais environ dix jours plus tard se déclare une forme sévère, bien plus forte et plus grave.

Selon les chercheurs, il pourrait s’agit d’une réinfection, à nouveau par le SARS-CoV-2 ou par un autre coronavirus. Il est question d’un dysfonctionnement immunitaire en raison de la présence d’anticorps « facilitants ». Ces derniers augmenteraient alors la vulnérabilité de l’organisme au lieu de le protéger. Le fait est que si l’hypothèse sur ce mécanisme est avérée, les conséquences négatives sur le développement d’un vaccin pourraient être lourdes !

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Des cycles répétés d’infections

L’hypothèse des chercheurs italiens repose sur plusieurs observations. Tout d’abord, ces derniers s’étonnent que leur pays ait été l’un des plus impactés au monde durant la première vague. Le fait est que des pays tels que le Japon et l’Allemagne ont une population plus âgée et donc, en théorie, plus à risque. Or, ces mêmes populations ont été moins impactées. Par ailleurs, seuls les trois premiers cas de Covid-19 en Italie font l’objet d’une importation depuis l’extérieur du pays. Ainsi, il est possible que le coronavirus circulait déjà en Italie des semaines avant que le premier patient ne soit identifié.

Pour les scientifiques, des formes plus graves de la Covid-19 pourraient trouver leur source dans des cycles répétés d’infections au sein d’une communauté. Qui plus est en ce qui concerne les personnes à risque telles que les personnes âgées et le personnel soignant.

Une première infection génère une production d’anticorps, une réaction tout à fait normale. Rappelons au passage que les anticorps reconnaissent le virus et fixent son autre extrémité à une cellule immunitaire afin de le détruire. En revanche, dans le cas d’une seconde infection, les anticorps ne fonctionneraient pas de la même façon, facilitant cette fois l’installation du virus.

Les auteurs du commentaire pensent donc ainsi expliquer les infections biphasiques régulièrement observées aux quatre coins du monde. L’hypothèse apporterait également une réponse au questionnement concernant les orages cytokiniques. Il s’agit une réponse immunitaire qui dégénère en réaction inflammatoire violente, à l’origine du décès de nombreux cas de Covid-19.

Une hypothèse à vérifier

Le raisonnement des chercheurs italiens semble fiable et crédible mais il incombe de vérifier l’hypothèse avec des résultats. En attendant qu’une étude vienne confirmer cette dernière, la question de l’impact sur le développement d’un vaccin se pose déjà. Rappelons que le but d’un vaccin est de simuler une première infection afin que l’organisme produise des anticorps protecteurs. En revanche, si ces mêmes anticorps ne protègent pas d’une seconde infection et, pire encore, lui facilitent la tâche, le vaccin générerait alors un effet pervers.

Interrogé par Sciences et Avenir dans un article du 21 juillet 2020, Morgane Bomsel, directrice de recherche au CNRS, évoque certains vaccins en cours de développement. L’intéressée indique que le vaccin de Moderna génère des anticorps neutralisants mais cette société n’a pas (encore) vérifié l’absence d’anticorps facilitants. Quand au vaccin de l’Université d’Oxford (Royaume-Uni) et celui d’un laboratoire de Wuhan (Chine), il est question d’une bonne tolérance et l’apparition d’une réaction immunitaire. Cependant, là encore, personne ne sait si des anticorps facilitants sont présents.