Paradoxe : la diminution de la pollution aux particules fines devrait temporairement accentuer le réchauffement climatique

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L’accord de Paris s’est fixé comme objectif principal de contenir le réchauffement global sous les 2 °C par rapport à l’époque préindustrielle. Cet effort risque d’être encore plus difficile que prévu si l’on tient compte du réchauffement additionnel associé à une diminution future de la pollution aux particules fines.

Le réchauffement global – principalement lié à l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) – a en partie été atténué par l’augmentation concomitante du contenu en aérosols (petites particules en suspension dans l’atmosphère). En effet, la combustion d’énergies fossiles, en plus d’émettre des composés tels que le dioxyde de carbone, dégage aussi des particules fines non moins problématiques. L’Asie est particulièrement touchée par ces dernières, en témoignent les nombreuses occurrences de smogs englobant certaines villes en Chine ou en Inde. La concentration en particules atteint alors des valeurs ahurissantes, exposant la population à un risque accru de maladies cardiaques, respiratoires, etc. Se joue donc là un enjeu de santé publique. D’autres régions du globe connaissent également des pics de pollution aux particules fines comme l’Europe ou les États-Unis, bien que les mesures prises permettent de limiter l’intensité de ceux-ci.

En réfléchissant une portion du rayonnement solaire incident, ces aérosols ont en moyenne un effet refroidissant sur le climat. De combien ont-ils limité le réchauffement au global ? La quantification reste difficile, mais l’atténuation tournerait autour de 0,5 °C. En d’autres termes, sans leur présence, le réchauffement qui est actuellement de 1 °C par rapport à l’époque préindustrielle serait de 1,5 °C. La tendance à l’amélioration de la qualité de l’air dans la plupart des grandes villes pose ainsi le problème du réchauffement additionnel qui en découlerait. Moins d’émissions d’aérosols signifieraient moins d’effet refroidissant, et donc une hausse de la température planétaire rattrapant son retard. Car contrairement aux gaz à effet de serre, les particules fines sont très rapidement éliminées de l’atmosphère si elles n’y sont pas constamment renouvelées. Notons de plus qu’elles ont une influence importante sur certains régimes pluviométriques, l’eau étant une variable tout aussi importante que la température.

Influences opposées des gaz à effet de serre (jaune) et des aérosols (bleu) sur la température en surface (gauche) et les précipitations (droite). L’effet net est marqué par un point rouge. Différentes parties du globe sont analysées. Crédits : N. CARY/SCIENCE.

L’effet de ces particules n’est ni homogène dans l’espace – de par leur faible temps de résidence elles sont préférentiellement situées près des zones sources et dans l’hémisphère nord – ni dans le temps : les zones sources varient avec le développement des différents pays. Cela signifie que les impacts climatiques qui leur sont associés ont une forte dépendance régionale, compliquant leur étude. Par exemple, les conséquences qu’aurait une baisse de la pollution en Inde sur le régime de mousson sont encore très mal appréhendées. Outre cet aspect local, l’objectif de l’accord de Paris sur les 2 °C de réchauffement global à ne pas dépasser pourrait s’annoncer plus difficile à atteindre. La réduction des émissions de GES devrait en effet être encore plus rapide pour compenser le réchauffement additionnel lié à une diminution globale des aérosols ces prochaines décennies…

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