La NASA obtient des preuves géologiques de la présence passée d’environnements variés sur Mars

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Les chercheurs de la NASA ont trouvé une grande diversité de minéraux dans les échantillons de roche collectés par l’astromobile Curiosity dans les couches inférieures du mont Sharp sur Mars. Ces trouvailles suggèrent que les conditions environnementales ont changé au fil du temps.

Curiosity avait atterri dans le cratère Gale, près du mont Sharp, en août 2012. Il a atteint la base de la montagne en 2014. Des couches de roche à la base du mont Sharp se sont accumulées comme des sédiments dans les lacs anciens d’environ 3,5 milliards d’années. Une analyse par spectroscopie infrarouge a montré que les couches inférieures de la montagne présentent des variations dans les minéraux, ce qui suggère que des changements dans la région se sont produits par le passé.

Ce sont les chercheurs de la Astromaterials Research and Exploration Science (ARES), au centre de la NASA Johnson Space Center de Houston, qui ont communiqué les résultats de l’analyse des quatre premiers échantillons prélevés sur les couches inférieures du Mont Sharp.

« Nous avons emmené Curiosity au cratère Gale, pour étudier ces couches inférieures du mont Sharp, contenant ces minéraux qui suggèrent des changements environnementaux », déclare Elizabeth Rampe, directrice de l’étude basée au Johnson Space Center. « Ces couches ont été déposées il y a environ 3,5 milliards d’années, coïncidant avec le moment où la Terre commençait à développer la vie. Nous pensons que Mars pourrait avoir été semblable à la Terre, lors des débuts de celle-ci, et ces environnements auraient pu être habitables. »

Curiosity a examiné les zones appelées « Pahrump Hills » sur les bases du mont Sharp. Les points bleus symbolisent les échantillons récupérés par le rover pour analyse/Crédits : NASA — JPL_Caltech — MSSS

Les minéraux trouvés dans les 4 échantillons prélevés suggèrent que plusieurs environnements différents étaient présents dans l’ancien cratère Gale. Il existe des preuves d’eaux caractérisées par des pH différents et des conditions d’oxydation variables. Les minéraux montrent également qu’il y avait plusieurs régions sources pour les roches dans « Pahrump Hills » et « Marias Pass ».

Trois des quatre échantillons sont issus de la région de Pahrump Hills. Il s’agit d’un affleurement à la base du mont Sharp qui contient des roches sédimentaires dont les scientifiques pensent qu’elles ont été formées en présence d’eau. L’étude de ces couches de roche peut fournir des informations sur l’habitabilité passée de la planète rouge et déterminer les minéraux trouvés dans ces couches de roche sédimentaire pourrait donner beaucoup d’informations sur l’environnement dans lequel ils se sont formés. Les données récupérées avec l’instrument CheMin (Chemistry and Mineralogy) de Curiosity ont montré une grande diversité de minéraux.

À la base, ces derniers sont issus d’une source de magma primitive. Ils sont riches en fer et en magnésium et semblables aux basaltes à Hawaï. En progressant dans la section, les chercheurs ont vu plus de minéraux riches en silice. Dans l’échantillon nommé « Telegraph Peak », ils ont trouvé des minéraux semblables au quartz. Dans l’échantillon « Bucksin » (le 4e échantillon ne provenant pas de Pahrump Hills), de la tridymite a été observée. La tridymite peut se trouver sur Terre dans des roches formées à partir de la fusion partielle de la croûte terrestre ou de la croûte continentale par exemple. La présence de tridymite est une découverte inédite, car Mars ne possède pas de plaques tectoniques.

Dans les deux derniers échantillons, « Confidence Hills » et « Mojave 2 », des minéraux d’argile ont été trouvés, ceux-ci se forment généralement en présence d’eau liquide avec un pH quasi neutre et pourraient donc être de bons indicateurs des environnements passés favorables à la vie. Le minéral de la jarosite a aussi été découvert. Celui-ci est un sel qui se forme dans des solutions acides et sa présence indique qu’il y avait donc des liquides acides à un moment donné dans la région.

Les échantillons présentent également différents minéraux d’oxyde de fer. L’hématite a été trouvée près de la base de la région et la magnétite au sommet. L’hématite contient du fer oxydé, alors que la magnétite contient à la fois des formes oxydées et réduites de fer. L’oxyde de fer est un minerai qui peut témoigner du potentiel d’oxydation des eaux anciennement présentes dans la région.

Les chercheurs émettent deux hypothèses pour expliquer cette surprenante diversité minéralogique. Les eaux du lac elles-mêmes à la base étaient oxydantes, ce qui entraîne une augmentation de l’oxygène dans l’atmosphère. La deuxième hypothèse serait que des fluides de stade ultérieur sont apparus. Une fois que les sédiments rocheux ont été déposés, des eaux souterraines acides et oxydantes se seraient déplacées dans la zone, entraînant un dépôt de jarosite et d’hématite. Dans cette hypothèse, les conditions environnementales présentes au niveau du lac et dans les eaux souterraines étaient tout à fait différentes, mais elles offraient de l’eau liquide et une diversité chimique qui aurait pu être exploitée par la vie microbienne.

« Nous avons toutes ces preuves pour montrer qu’autrefois Mars possédait de l’eau », ajoute Rampe. « Aujourd’hui, une grande partie de l’eau est enfermée dans les pôles et dans le sol à des latitudes élevées. Nous pensons que les roches que Curiosity a ramassées révèlent des changements environnementaux anciens qui se sont produits alors que Mars commençait à perdre son atmosphère. »

Désormais, les chercheurs se posent la question de savoir si cette zone spécifique de Mars a subi un séchage naturel ou si un autre procédé géologique a conduit à son assèchement. Ils en apprendront peut-être plus avec la progression de Curiosity qui gravit actuellement le mont Sharp.