L’évolution des céphalopodes est encore plus étrange que nous le pensions

Crédits iStock

Une étude surprenante suggère que les céphalopodes évoluent différemment de presque tous les autres organismes sur la planète. Poulpes, calmars et seiches peuvent en effet modifier régulièrement leurs séquences d’ARN (acide ribonucléique) afin de s’adapter à leur environnement.

Au cours des soixante dernières années, les calmars et les pieuvres ont littéralement envahi les eaux des océans et leur population n’a de cesse d’augmenter de façon exponentielle. Les céphalopodes parviennent en effet à s’adapter plus vite que les autres animaux marins aux changements délétères que subit constamment l’océan tels que le réchauffement climatique, la pollution du milieu marin et l’épuisement des ressources en eau. Mais comment font-ils ? Une étude récente menée par le biologiste Joshua Rosenthal, du laboratoire de biologie marine des États-Unis, suggère que les poulpes ainsi que certaines espèces de calmars et de seiches modifient régulièrement leur séquence d’ARN (acide ribonucléique) afin de s’adapter à leur environnement.

Chez les animaux multicellulaires, ces changements s’opèrent généralement par une mutation génétique au niveau de l’ADN. Pour vulgariser, imaginez une cuisine. L’ADN serait la recette et l’ARN le chef suivant cette recette dans chaque cellule et assurant la production des protéines nécessaires au bon maintient de l’organisme. Sauf que l’ARN ne se contente pas d’exécuter aveuglément les instructions. De temps en temps, il improvise en rajoutant ou modifiant quelques ingrédients. On appelle ça l’édition d’ARN qui est en fait une modification post-transcriptionnelle des ARN changeant la séquence codante existant au niveau de l’ADN.

Quand un tel processus se produit, il peut changer la façon dont les protéines fonctionnent, permettant à l’organisme d’affiner son information génétique sans subir effectivement des mutations génétiques. Mais la plupart des organismes ne jouent pas vraiment avec cette méthode, celle-ci provoquant plus de problèmes que de solutions. Ainsi, la plupart des organismes, comme nous, ne prennent pas de risques. Mais il semblerait que les céphalopodes en aient décidé autrement : « Avec les céphalopodes, ce n’est pas l’exception, c’est la règle. Une règle qui veut que la plupart des protéines sont en cours de modification », explique le coauteur de l’étude Eli Eisenberg, biophysicien à l’Université de Tel Aviv, en Israël.

En 2015, des chercheurs découvraient en effet que le calamar éditait plus de 60 % de l’ARN dans son système nerveux. Ces modifications ont essentiellement modifié la physiologie de son cerveau, sans doute pour s’adapter à diverses conditions de température dans l’océan. Encore plus surprenant, cette nouvelle étude suggère qu’au moins deux espèces de poulpes et une de seiche font exactement la même chose. Les chercheurs se demandent maintenant si l’édition de l’ARN pourrait contribuer à l’intelligence remarquable de ces animaux.

Source