Les araignées l’emportent sur les loups dans la toundra arctique

araignée-loup alaska
Crédits : Wikimedia Commons / D. Sikes

En Arctique, les araignées-loups sont si abondantes qu’elles dépassent, de plusieurs ordres de grandeur et en termes de biomasse pure, les loups en Alaska. Elles se présentent aujourd’hui comme les prédatrices les plus importantes de la toundra, et pourraient jouer un rôle conséquent pour atténuer certains effets du changement climatique.

Selon les nouvelles estimations de l’Université de Washington, à Saint-Louis (États-Unis), l’araignée-loup l’emporte sur le loup gris d’un peu plus de 80 pour 1 en termes de biomasse brute. Le réchauffement des terres pourrait également modifier les goûts de ces araignées, initiant ainsi une nouvelle cascade d’interactions entre les réseaux trophiques, qui pourraient potentiellement atténuer certains impacts du réchauffement climatique.

Les chercheurs ont ici étudié les araignées-loups. Elles ne mesurent qu’un centimètre et demi de longueur, mais elles pourraient être à la fois plus grandes et plus prolifiques dans un avenir plus chaud. Ces araignées ne font pas de toiles et préfèrent chassent sur le terrain. Elles s’attaquent principalement aux collemboles, de petits arthropodes qui mangent à la fois des plantes en décomposition et des champignons. Et dans la toundra humide, les champignons dans le sol contrôlent en grande partie la rapidité avec laquelle la matière végétale morte se décompose pour finalement libérer ses nutriments.

Ces araignées-loups de l’Arctique ont donc un effet « indirect » sur la décomposition végétale, en accélérant le processus (car il y a de plus en plus de champignons). La décomposition est généralement positive pour les plantes, en ce sens qu’elle libère plus de nutriments dans le sol. Certains de ces nutriments – tels que l’azote – sont des engrais recherchés qui améliorent la productivité des plantes. Mais la décomposition est une arme à double tranchant. Comme les microbes mangent des plantes mortes, ils respirent également le dioxyde de carbone et le méthane, des gaz à effet de serre puissants.

Pour étudier ces processus, les chercheurs ont installé une série d’enclos expérimentaux dans une zone de la toundra arctique au nord de l’Alaska, et ce pendant deux saisons estivales. Ces mini-écosystèmes mesuraient 1,5 mètre de diamètre et séparaient tous les habitants de la toundra, y compris les animaux souterrains et les champignons. Il y avait à l’intérieur des araignées-loups, mais aussi des collemboles et des acariens.

Ce qu’ils ont découvert est surprenant. Aux températures ambiantes, il y avait moins de collemboles dans les parcelles à forte densité d’araignées, et la décomposition de la litière était plus rapide. Un résultat prévu, puisque les araignées aiment manger des collemboles. Mais dans les parcelles chauffées avec des densités d’araignées élevées, les chercheurs ont trouvé moins de signes de décomposition de la litière dans le sol. Ils pensent que dans des conditions de réchauffement, les araignées-loups développent un goût pour différentes proies, comme des araignées plus petites.

Et c’est une bonne nouvelle pour le climat. Dans un avenir amené à se réchauffer, si les araignées-loups mangent moins de collemboles, ces derniers pourront manger plus de microbes. Il y aura alors moins de décomposition, et moins de carbone libéré par le pergélisol.

« Les araignées ne vont pas nous sauver du changement climatique, notent les chercheurs, mais nous avons constaté que la décomposition est plus lente sous l’effet du réchauffement quand il y a plus d’araignées-loups. Cela suggère que dans certaines circonstances, elles pourraient atténuer certains des effets du réchauffement sur les pertes de carbone de la toundra. Et c’est une bonne chose ».

Vous retrouverez tous es détails de cette étude dans la revue PNAS.

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