Les fourmis sont dotées d’un système de navigation bien plus sophistiqué que ce que l’on pensait

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Si jusque-là, on pensait que les fourmis étaient capables de s’orienter et de se repérer dans l’espace de manière égocentrée, une étude internationale nous révèle que l’insecte est en réalité doté d’un système de navigation sophistiqué qui pourrait inspirer les prochaines générations de systèmes robotiques.

Dans la revue Current Biology du jeudi 19 janvier 2017, l’étude d’une équipe internationale de chercheurs, notamment Antoine Wystrach, du Centre de recherche sur la cognition animale du CNRS, démontre la capacité des fourmis à se repérer dans l’espace, quelle que soit l’orientation de leur corps. Elles sont également dotées d’un système de navigation très sophistiqué utilisant à la fois des repères célestes et terrestres pour mémoriser leur route et être capables de se déplacer même à reculons.

« Jusqu’à aujourd’hui, les recherches menées en éthologie donnaient à penser que la fourmi mémorisait la scène perçue visuellement le long de sa route telle qu’elle était projetée sur ses rétines à facettes, de façon égocentrée », peut-on lire dans un communiqué du CNRS. « Mais, parfois, les fourmis doivent aussi marcher à reculons et elles se montrent malgré tout capables de retrouver leur nid ». C’est pour comprendre ce comportement que l’équipe de chercheurs a mené des expériences sur des fourmis du désert andalou de l’espèce Cataglyphis velox.

Si pour les fourmis transportant une charge relativement légère pouvaient le faire en marche avant sur une route comportant un virage à 90°, celles qui transportaient une charge plus lourde devaient le faire en marche arrière. Les chercheurs ont alors découvert un comportement inattendu : après une certaine distance, une fourmi peut lâcher sa charge, se retourner, observer la scène en alignant son corps dans la direction de la route puis se remettre en marche dans la bonne direction.

Elles sont donc ici capables de mémoriser une direction à suivre, mais également de mémoriser l’existence de la charge de nourriture (ici un cookie) ainsi que sa position afin de le retrouver après s’être correctement orientées. « Ces observations impliquent donc la synergie d’au moins trois types de mémoires : la mémorisation visuelle de la route, la mémoire de la nouvelle direction à suivre et la mémoire du cookie à récupérer ».

Une autre expérience impliquant un miroir pour altérer leur perception de la position du soleil a démontré que les fourmis se fiaient aux repères célestes pour maintenir leur cap lors de la marche à reculons. Une fois la direction mémorisée, elles peuvent la suivre indépendamment de l’axe de leur corps. « Ces observations suggèrent que les fourmis possèdent aussi une représentation des directions centrée sur le monde extérieur ».

« Les fourmis ont un cerveau relativement petit dont la taille est inférieure à une tête d’épingle, mais elles peuvent malgré cela naviguer sans problème dans des conditions difficiles », explique la professeure Barbara Webb de l’université d’Édimbourg. « Comprendre leur comportement nous donne de nouveaux éclairages sur le fonctionnement de leur cerveau et peut nous inspirer pour concevoir des systèmes robotiques reproduisant leurs fonctions cérébrales ».