Ce que l’effondrement du Sahara vert nous enseigne sur l’avenir

Sahara
Crédits : Pixabay License.

L’effondrement brutal du Sahara vert il y a environ 6000 ans permettrait d’affiner notre compréhension des points de bascule climatiques et, par conséquent, de mieux anticiper les risques futurs d’évènements abrupts. C’est du moins ce qu’indiquent de récents travaux publiés dans la revue scientifique PNAS.

Une illustration simple du concept de point de bascule est un élastique que l’on étire progressivement. Au début, la réponse du système au forçage est relativement linéaire. Toutefois, arrive un moment où le forçage franchit un seuil critique et l’élastique craque. Cet horizon est l’équivalent d’un point de bascule. Brutalement, le système transite de façon irréversible vers un nouvel état stable, souvent très différent du précédent.

La compréhension des points de bascule du système climatique est actuellement limitée par le peu de données physiques disponibles. En effet, il n’existe pas d’exemple contemporain qui pourrait être étudié avec la précision nécessaire. Ainsi, les chercheurs doivent surtout se baser sur des concepts théoriques, un ensemble d’informations fournies par les enregistrements paléoclimatiques et les résultats des modèles de climat. Ces derniers ont par ailleurs tendance à sous-estimer la rapidité des évolutions abruptes du passé.

Entre Sahara vert et désertique, un jeu de bascule

Récemment, un groupe de chercheurs a montré que l’étude du climat des derniers millénaires pouvait constituer un terreau fertile pour en apprendre davantage sur les mécanismes de bascule, en particulier il y a 6000 ans, lorsque le Sahara temporairement recouvert de végétaux amorce un retour brutal vers le paysage désertique qu’on lui connaît aujourd’hui.

désert Sahara vert
Désert du Sahara. Crédits : Wikimedia Commons.

« La modélisation climatique est le seul moyen dont nous disposons pour prédire les changements climatiques futurs », explique Peter Hopcroft, auteur principal du papier. « Cependant, nous n’avons aucun moyen de vérifier leurs prédictions de changements brusques, dont les risques ne feront probablement qu’augmenter à mesure que la planète se réchauffera. Les enregistrements paléoclimatiques des changements abrupts passés nous permettent de surmonter ce problème ».

En initialisant un modèle avec les données disponibles sur le climat de l’époque, les auteurs ont pu reproduire les transitions brutales qui ont marqué l’Afrique du Nord à l’Holocène moyen, et ce, aussi bien pour le passage du désert en savane que de la savane en désert. Ces évènements constituent un banc d’essai suffisamment récent pour être connus avec une grande précision. Dans ce contexte bien contraint, les modèles semblent donc capables de rendre compte de la brutalité des transitions et, par conséquent, des points de bascule qui les sous-tendent.

« Nous devons maintenant appliquer ces méthodes à d’autres modèles pour tester à quel point les résultats pourraient être consensuels », note Peter Hopcroft. « Toutefois, en démontrant comment les informations paléoclimatiques peuvent être utilisées pour améliorer la façon dont les modèles simulent des changements climatiques abrupts du passé, nous espérons pouvoir améliorer notre confiance dans les projections climatiques d’évènements brusques pour le futur ».