Pourquoi le fait de se gratter est-il contagieux ?

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À l’instar du fait de bâiller, voir quelqu’un se gratter peut être contagieux et nous pousser à faire de même. C’est un comportement qui existe chez les singes, mais également chez les souris, lesquelles ont été étudiées pour comprendre ce phénomène.

Dans la revue Science, une étude publiée ce jeudi 9 mars 2017 est la « première preuve que les démangeaisons socialement contagieuses existent aussi chez les rongeurs », selon les chercheurs qui ont démontré que le phénomène trouve son origine dans une partie du cerveau des rongeurs.

« Les souris se grattaient lorsqu’elles voyaient d’autres souris se gratter », déclare Zhoufeng Chen, chercheur et directeur du Center for the Study of Itch, à la Washington University School of Medicine. « Exactement comme les êtres humains », ajoute-t-il. En effet, chez l’homme, même la mention de poux peut pousser une personne à se gratter la tête. Selon une étude de 2013 parue dans le Journal Acta Dermato Venereologica, les macaques Rhésus aussi ont tendance à se gratter lorsqu’ils voient d’autres singes se gratter en face d’eux ou même en vidéo.

Pour déterminer si les souris adoptent également ce comportement, Zhoufeng Chen et ses collèges ont placé des souris face à des congénères atteintes d’une condition provoquant des démangeaisons chroniques et d’autres devant une vidéo muette de souris qui se grattaient. Dans les deux cas, le processus de mimétisme a eu lieu et les souris se grattaient également.

Lorsque ces souris ont observé les autres se gratter, les scans cérébraux des rongeurs ont montré une augmentation de l’activité dans une structure appelée le noyau suprachiasmatique (SCN) qui contrôle les moments où les animaux s’endorment et se réveillent. Tandis que les rongeurs observaient leurs congénères se gratter, les cellules dans le SCN ont libéré un produit chimique appelé bombésine (ou GRP). Chen et ses collègues ont identifié le GRP comme un émetteur clé des signaux de démangeaison entre la peau et la moelle épinière dans une étude de 2007 publiée dans la revue Nature.

Le GRP n’affecte que les démangeaisons « sociales ». En effet, lorsque les chercheurs ont utilisé une technique pour bloquer la libération de GRP ainsi que le récepteur auquel il est lié, les souris ne se grattaient plus en voyant les autres le faire. Mais elles étaient toujours capables de ressentir la démangeaison, puisqu’elles se grattaient lorsqu’il leur a été injecté de l’histamine, une substance induisant la démangeaison.

Autre observation, le GRP peut provoquer des démangeaisons « sociales » tout seul. En effet, lorsque les chercheurs ont injecté cette substance supplémentaire dans les SCN des rongeurs, ces derniers se sont grattés vigoureusement même sans observer ce comportement chez les autres.

Ces résultats peuvent permettre aux scientifiques de comprendre les circuits du cerveau qui contrôlent les comportements socialement contagieux. Pour Zhoufeng Chen, expliquer pourquoi ce comportement contagieux existe n’est pas très clair, mais il pourrait s’agir d’un mécanisme de protection.

« Il est possible que lorsqu’un nombre de souris se grattent, cela met en garde d’autres souris qu’il s’agit d’un endroit peuplé d’insectes et qu’il vaut mieux commencer à se gratter avant qu’il ne soit trop tard », explique-t-il.