Combien de T-Rex ont déjà vécu sur Terre ? Des milliards

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Crédits : Motion Pictures

Combien de T-Rex ont parcouru l’Amérique du Nord pendant la période du Crétacé ? Le Dr Charles Marshall a harcelé ses collègues pendant des années jusqu’à ce qu’il fasse finalement équipe avec ses étudiants pour trouver une réponse. Leurs travaux ont été publiés ce jeudi dans la revue Science.

Tout a commencé avec les interrogations de Charles R. Marshall, professeur de biologie intégrative à l’Université de Californie à Berkeley, tenant un reste de T-Rex à la main : « à quel point ce fossile est-il rare ? Y avait-il un million, un milliard, un billion de T-Rex sur Terre ? »

Jusqu’à présent, personne n’avait été en mesure de calculer le nombre de populations d’animaux disparus depuis longtemps. George Gaylord Simpson, l’un des paléontologues les plus influents du siècle dernier, estimait d’ailleurs que cela ne pouvait pas être fait. Dans le cadre de ces travaux, Marshall et son équipe ont quand même essayé.

Pour les espèces vivantes, John Damuth, biologiste à l’Université de Californie à Santa Barbara, a proposé une relation mathématique. Cette « loi de Damuth », comme on l’appelle, permet d’estimer la densité d’une population attendue en fonction de la masse corporelle moyenne d’un animal représentant cette population. D’autres données, comme le niveau trophique (où ils se trouvent dans la chaîne alimentaire) et leur physiologie doivent également être prises en compte.

Notez que cette relation n’est pas universelle. En témoigne l’exemple des jaguars et des hyènes tachetées. Ces deux espèces de mammifères carnivores sont de taille similaire. Pourtant, la densité de population des hyènes est environ cinquante fois plus élevée.

Les données prises en compte

Pour en revenir aux T-Rex, Charles R. Marshall et son équipe ont donc cherché à intégrer certaines données liées à leur métabolisme dans leurs équations. L’une des incertitudes concernait le sang de l’animal.

On ne pense plus que les dinosaures étaient à sang froid comme les lézards des temps modernes, mais ils n’étaient probablement pas non plus à sang chaud que les mammifères. L’équipe du Dr Marshall a donc supposé une physiologie entre celle des mammifères carnivores et celle des dragons de Komodo, le plus grand lézard de la planète.

La question de la place de T-Rex dans l’écosystème a également conduit les chercheurs à ignorer les juvéniles. D’une part, parce qu’ils sont sous-représentés dans les archives fossiles. Et d’autre part, ils pourraient avoir vécu séparément des adultes et poursuivi différentes proies. Autrement dit, les chercheurs les ont considérés comme une espèce différente.

En s’appuyant sur l’expertise de leurs collègues, les chercheurs ont ensuite estimé que :

  • l’âge probable de la maturité sexuelle d’un T-Rex était de 15,5 ans
  • sa durée de vie maximale était probablement d’une petite trentaine d’années
  • sa masse corporelle moyenne à l’âge adulte était d’environ 5,2 tonnes

À partir de ces estimations, ils ont calculé que chaque génération s’étalait sur environ 19 ans et que la densité moyenne de la population était d’environ un dinosaure pour 100 kilomètres carrés.

Notez que les chercheurs ont ici dû tenir compte d’une certaine incertitude quant à l’endroit où vivaient les dinosaures. Les paléontologues, par exemple, ne savent pas si l’aire de répartition des T-Rex se limitait aux zones où leurs fossiles ont été trouvés (ouest des États-Unis et au Canada), ou si elle s’étendait à d’autres régions proposant des climats similaires à l’époque.

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Scotty, le plus grand T-Rex jamais découvert. Crédits : Université d’Alberta

Des milliards de T-Rex

Finalement, estimant que l’aire de répartition géographique totale de T-Rex était d’environ 2,3 millions de kilomètres carrés, et que l’espèce avait survécu pendant environ 2,5 millions d’années, les chercheurs ont calculé une taille de population permanente de 20 000 spécimens. Sur un total d’environ 127 000 générations développées au cours de leur histoire, les chercheurs estiment donc à 2,5 milliards le nombre d’individus au total.

Malgré les incertitudes associées à la plupart des paramètres du modèle, le Dr Damuth a souligné un « résultat qualitatif solide ».

Ceci étant, même le Dr Marshall pense que ce nombre de 20 000 est probablement faible. « Il semble tout simplement inconcevable que vous puissiez durer quelques millions d’années avec ces quelques individus », explique-t-il. D’après lui, il y avait peut-être des dizaines de milliers, voire même peut-être 100 000 ou 200 000 individus à chaque moment donné.

Avec un si grand nombre de dinosaures post-juvéniles au cours de l’histoire de l’espèce, sans parler des juvéniles qui étaient probablement plus nombreux, où sont alors passés tous ces os ? Quelle proportion de ces individus a été découverte par les paléontologues ?

«Il y a environ 32 T-Rex post-juvéniles relativement bien préservés dans les musées publics aujourd’hui», note le Dr Marshall. «De tous les adultes post-juvéniles qui aient jamais vécu, cela signifie que nous en avons environ un sur 80 millions». Telle est la réponse à sa première question.