Climat : quand la baisse de la pollution accentue le réchauffement

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Crédits : schissbuchse/Pixabay

Depuis 2000, l’amélioration de la qualité de l’air a paradoxalement entraîné un supplément de réchauffement qui équivaut de moitié à celui dû au seul CO2. Ce sont les résultats avancés par une étude publiée ce 21 septembre dans la revue Atmospheric Chemistry and Physics.

Les activités humaines émettent deux grandes catégories de composés dans l’atmosphère. Des gaz à effet de serre comme le dioxyde de carbone (CO2) et de petites particules solides ou liquides que l’on appelle des aérosols. Or, si les premiers induisent un réchauffement du climat, les seconds tendent au contraire à le refroidir. En effet, les particules de pollution réfléchissent le rayonnement solaire incident, de façon directe mais aussi indirecte en augmentant l’éclat des nuages bas.

Toutefois, il n’y a pas de symétrie entre les deux influences. Et pour cause, les gaz à effet de serre ont une durée de vie allant de quelques décennies à plusieurs siècles alors que les aérosols sont éliminés en quelques semaines. La dynamique cumulative du CO2 et des autres gaz à effet de serre explique donc pourquoi c’est l’effet réchauffant qui l’emporte très largement sur le second.

Baisse de la pollution : une couverture refroidissante moins efficace

Il reste que les aérosols masquent effectivement une partie du réchauffement. Selon le dernier rapport du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC), cet effet se chiffrait à hauteur de 0,5 °C en 2019. Ainsi, dans un contexte où la qualité de l’air constitue un enjeu de société majeur, se pose la question – paradoxale – du réchauffement associé à la lutte contre la pollution aux particules fines.

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Évolution du forçage climatique lié aux aérosols sur la période 2000-2019. Les tons verts indiquent un effet refroidissant de moins en moins présent, inversement pour les tons violets. Notez la baisse significative en Amérique du Nord et en Europe, la baisse plus marginale en Asie de l’Est et la hausse en Inde (hausse des pollutions locales). Crédits : Johannes Quaas & coll. 2022.

Une étude récente dirigée par l’Université de Leipzig (Allemagne) a mis en lumière la façon dont le processus s’est articulé depuis le début des années 2000. Grâce aux données acquises par les satellites Aqua et Terra de la NASA, les chercheurs ont cartographié une baisse généralisée de la pollution atmosphérique et ont quantifié son impact climatique à hauteur de + 0,1 W/m² à + 0,3 W/m² au niveau mondial entre 2000 et 2019.

Cet effet réchauffant équivaut à 12 % du forçage anthropique observé en 2019 par rapport à l’ère préindustrielle (1750), soit de l’ordre de 0,15 °C à l’échelle mondiale et davantage dans les zones où la pollution a le plus fortement baissé. « Cette dernière a considérablement diminué en Amérique du Nord, en Europe et en Asie de l’Est depuis 2000 », souligne Johannes Quaas, auteur principal de l’étude.

« Notre étude ne doit pas être interprétée comme signifiant que nous devrions maintenant émettre plus d’aérosols pour refroidir le climat », ajoute le chercheur. « Au contraire, les aérosols sont nocifs pour la santé humaine et l’environnement, c’est pourquoi nous devons continuer à en réduire les rejets ». Aussi, la bataille est à mener en parallèle contre les émissions de gaz à effet de serre, responsables indéfectibles du changement climatique en cours.