Banquise antarctique : persistance d’une étendue anormalement basse depuis le printemps 2016

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Concentration et étendue de glace de mer le 17 janvier 2019. Crédits : NSIDC.

En ce moment, la banquise antarctique est dans sa phase de débâcle – en effet, c’est l’été austral. Le minimum annuel sera atteint au cours du mois de février. À l’image des dernières années – depuis la fin 2016 -, la surface occupée par de la glace de mer en ce début 2019 est située au niveau des records bas. Cet état persistant contraste avec les années antérieures à 2016, marquées par une extension anormalement élevée.

Au 17 janvier 2019, l’extension de la banquise entourant le continent antarctique était de 3,78 millions de km² – pour une moyenne de 4,72 millions de km² sur la période 1981-2010. Il s’avère en fait que depuis fin 2016, l’étendue de glace de mer est à la traîne, enchaînant les épisodes d’embâcle anormalement basse. Pourtant, il ne faut pas remonter bien loin pour trouver une situation en totale opposition. Un record haut avait par exemple été établi en 2013-2014, faisant suite à une série d’années caractérisées par un englacement particulièrement élevé.

La banquise australe : une évolution singulière

Les tendances dans les surfaces englacées du pôle nord et du pôle sud sont très différentes sur la période couverte par l’observation satellitaire (depuis 1979). Dans le premier cas, on observe un recul assez régulier tandis que dans le second, une légère tendance à la hausse est présente.

Même si les chercheurs ne comprennent pas totalement les processus impliqués dans l’évolution à la hausse de la surface de banquise australe, différents arguments peuvent être avancés. Par exemple, il apparaît que la variabilité naturelle en Antarctique est plus marquée qu’en Arctique. Que ce soit d’une année à l’autre ou d’une décennie à l’autre. En soi, cette propriété peut s’avérer suffisante pour masquer temporairement le recul des glaces de mer prévu par les modèles climatiques dans le cadre du réchauffement planétaire. La période d’observation étant trop courte pour passer outre les fluctuations décennales.

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Évolution de l’extension moyenne de glace de mer – ici en décembre – de 1979 à 2018. La tendance linéaire est en pointillés. Crédits : NSIDC.

Par ailleurs, des recherches ont évoqué les effets associés à la fonte des plateformes de glace qui provoquerait un refroidissement des eaux autour du continent, favorisant ainsi la formation de banquise. D’autres ont mis en avant l’impact du trou dans la couche d’ozone. Ce dernier aurait pu forcer une tendance à la hausse de la surface englacée via une modification du régime de vent circumpolaire. Cependant, il n’existe pas encore de consensus scientifique sur la question.

Que s’est-il passé en 2016 ?

Comme abordé plus haut, au cours du printemps austral de 2016, l’étendue de glace de mer au pôle sud a subi une chute vertigineuse. Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de réel rebond et les valeurs continuent d’évoluer à des niveaux anormalement bas, ce qui veut dire qu’il ne s’agissait pas d’une simple fluctuation isolée. Serait-ce là l’effet du réchauffement global qui se manifeste enfin ? Rien n’est moins sûr.

Comme rapporté dans une étude parue début 2019, le moment où ce recul spectaculaire a été observé a coïncidé avec des températures de surface de la mer et des précipitations particulièrement élevées dans l’est de l’océan Indien. Ce schéma correspond à la phase négative d’un mode de variabilité naturelle propre à ce bassin océanique. Le point intéressant à noter est que cette phase a excité un régime de circulation particulier dans l’océan austral – favorable au recul de la glace de mer. Les vents de nord doux et humides ont stimulé la fonte tout en repoussant la banquise vers la côte du continent antarctique.

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Crédits : Flickr/Christopher Michel

Dans le même temps, un ralentissement des vents initié dans la stratosphère s’est propagé jusqu’en surface et a ajouté sa contribution au déclin des glaces. Ensemble, ces deux événements expliqueraient la chute drastique observée au printemps 2016 – qui serait donc attribuable pour une large part à la variabilité naturelle du climat.

À mesure que la durée des observations s’allonge et que le climat continue à se réchauffer, il devient de plus en plus probable de voir apparaître la tendance générale à la baisse prévue par les modèles. Toutefois, la dynamique du climat de la zone antarctique reste encore assez méconnue, même si d’importants progrès ont été réalisés sur la dernière décennie.

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