Le plus ancien chromosome sexuel connu est apparu il y a près de 250 millions d’années

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Les chercheurs ont découvert le chromosome après avoir complété la séquence génétique complète de la pieuvre à deux points de Californie. Crédits : Brent Durand

Des chercheurs ont récemment fait une percée majeure en découvrant le plus ancien chromosome sexuel connu chez les animaux, ce qui repousse ainsi l’évolution des chromosomes sexuels à une période comprise entre 248 et 455 millions d’années. Cette découverte révolutionnaire a été réalisée chez des céphalopodes, notamment les poulpes et les calmars, ce qui suggère que ces animaux pourraient bien avoir été parmi les premiers à déterminer leur sexe par le biais d’un plan génétique plutôt que de signaux environnementaux.

La complexité des chromosomes sexuels

Là où les mammifères, y compris les humains, utilisent une combinaison de chromosomes sexuels X et Y pour déterminer le sexe (XX pour les femmes et XY pour les hommes), les céphalopodes, tels que les poulpes, ont révélé une variation intrigante. Chez ces créatures marines, la distinction repose en effet sur les chromosomes ZZ pour les mâles et Z0 pour les femelles. Cette singularité souligne la diversité évolutive dans les mécanismes de détermination sexuelle à travers le règne animal.

La recherche sur la détermination sexuelle chez les céphalopodes s’avère également complexe en raison de la diversité de leurs stratégies de reproduction. Ces créatures marines ont en effet adopté diverses approches, de l’hermaphrodisme (posséder les organes reproducteurs mâles et femelles) à l’hermaphrodisme séquentiel où un individu peut changer de sexe au fil du temps. Cette diversité complique la compréhension des mécanismes génétiques qui régissent la détermination sexuelle chez les céphalopodes.

En 2015, une étape significative a cependant été franchie avec le séquençage génétique complet de la pieuvre à deux points de Californie. Cependant, malgré cette avancée, des lacunes subsistaient dans la compréhension des mécanismes spécifiques de détermination sexuelle chez les céphalopodes. Ces lacunes ont incité les chercheurs à entreprendre une nouvelle analyse, caractérisée par une haute fidélité pour combler les zones d’incertitude et fournir des informations plus détaillées.

Cette nouvelle analyse s’est révélée cruciale pour démêler les subtilités génétiques qui régissent la détermination sexuelle chez les céphalopodes, offrant ainsi un aperçu plus clair de la complexité de ces mécanismes dans le règne marin.

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Les poulpes et les calmars semblent avoir développé des chromosomes sexuels il y a au moins 248 millions d’années. Crédits : Olga Visavi

La clé : le chromosome 17

Sous la direction d’Andrew Kern, de l’Université de l’Oregon, des chercheurs ont récemment fait une avancée significative après s’être penchés sur le chromosome 17 de la pieuvre femelle séquencée. En comparant cette séquence avec celle d’un spécimen mâle, ils ont noté une différence notable : ce chromosome semblait moins densément peuplé en gènes chez la femelle. Les femelles n’ont en effet qu’une seule copie de ce chromosome, tandis que les mâles en possèdent deux, confirmant ainsi son rôle en tant que chromosome sexuel.

En poussant plus loin leurs investigations, les chercheurs ont élargi leur analyse en comparant les génomes de divers céphalopodes, notamment des poulpes, des calmars et même le nautile chambré. Les résultats ont révélé que le motif ZZ/Z0 était présent chez les poulpes et les calmars, mais absent chez le nautile.

Cette disparité génétique a permis de conclure que l’évolution des chromosomes sexuels chez ces créatures marines a eu lieu après la séparation entre le nautile et les ancêtres communs des poulpes et des calmars, remontant à une période estimée entre 455 et 248 millions d’années.

Les chercheurs ont souligné la remarquable longévité de la préservation de ce chromosome sexuel qui remonte à une période incroyablement ancienne de l’histoire évolutive des animaux. Cette découverte repousse en effet les limites temporelles connues des chromosomes sexuels, le plus ancien confirmé auparavant se trouvant chez le poisson-esturgeon et étant vieux d’environ 180 millions d’années.

Cette avancée, publiée dans Nature News, jette également une lumière nouvelle sur l’évolution des mécanismes de détermination sexuelle, et démontre la complexité et la diversité de ces processus au fil des ères géologiques.