L’homme qui est restĂ© coincĂ© dans un nuage pendant 40 horribles minutes

William Rankin nuage
Crédits : Meindert van der Haven/istock

Le cumulonimbus est un type de nuage se dĂ©veloppant verticalement dans l’atmosphère. Il est souvent associĂ© Ă  des conditions mĂ©tĂ©orologiques intenses, notamment des prĂ©cipitations abondantes, des Ă©clairs, des grĂŞlons ou mĂŞme des tornades. A priori, traverser un tel nuage mettrait votre corps Ă  une Ă©preuve telle que vous ne devriez pas en ressortir vivant. Pourtant, le lieutenant-colonel William Rankin a survĂ©cu.

Piégé dans un nuage

Le 26 juillet 1959, le lieutenant-colonel William Rankin et son ailier Herbert Nolan pilotent leurs jets F-8 Crusader vers la Caroline du Sud. Conscients que d’imposants nuages ​​d’orage se forment devant eux, ils prennent la prĂ©caution de grimper Ă  environ 14 300 m, se donnant un peu de marge au-dessus du sommet des nuages.

Soudain, au-dessus de la tempĂŞte, le moteur de Rankin subit une panne inexpliquĂ©e et s’arrĂŞte. ÉquipĂ© d’une combinaison pressurisĂ©e, le pilote hĂ©site Ă  s’Ă©jecter. Et on le comprend. Ă€ cette altitude, les tempĂ©ratures avoisinent les -50°C tandis que l’air, très pauvre en oxygène, est saturĂ© d’humiditĂ©. Malheureusement, il se rend très vite compte qu’il n’a pas d’autre choix. Il tire alors la poignĂ©e d’Ă©jection Ă  14 300 m au-dessus du sol (perdant son gant dans le processus) et se prĂ©pare Ă  vivre l’enfer. Il est alors 18h00.

ImmĂ©diatement, du sang commence Ă  couler de ses yeux et de ses oreilles Ă  cause de la dĂ©compression instantanĂ©e. La main qui venait de prendre son gant commence Ă  succomber aux engelures. Puis en quelques secondes Ă  peine, le lieutenant-colonel Rankin pĂ©nètre dans le cumulonimbus avec pour seuls secours son oxygène de secours et un parachute qui n’est absolument pas conçu pour Ă©voluer dans un tel milieu. Ă€ cet instant, le libĂ©rer serait mĂŞme une condamnation Ă  mort. Fort heureusement, le pilote avait dĂ©ployĂ© un baromètre permettant de libĂ©rer automatiquement le parachute lorsque son altitude atteignait les 3 000 m. A priori, ce ne sera qu’une question de secondes. Mais un cumulonimbus peut ĂŞtre particulièrement vicieux.

cumulonimbus William Rankin
Voici à quoi ressemble un cumulonimbus. Crédits : Viktor Ketal/iStock

40 minutes dantesques

L’une des caractĂ©ristiques distinctives de ces nuages est leur capacitĂ© Ă  gĂ©nĂ©rer des courants ascendants. Ces derniers sont provoquĂ©s par des diffĂ©rences de tempĂ©rature et de densitĂ© de l’air Ă  diffĂ©rentes altitudes. L’air chaud et humide Ă  la base du nuage s’Ă©lève rapidement, crĂ©ant ainsi des colonnes d’air ascendantes. Ces courants peuvent ĂŞtre extrĂŞmement forts, atteignant parfois des vitesses de plusieurs dizaines de mètres par seconde.

Le pilote, coincĂ© par ces courants, se retrouve alors secouĂ© dans tous les sens. C’est alors que son parachute se dĂ©ploie beaucoup plus tĂ´t que prĂ©vu. Les conditions dantesques essuyĂ©es dans le cumulonimbus ont en effet dĂ©traquĂ© le baromètre qui s’est alors dĂ©clenchĂ©. Ă€ plusieurs reprises, les courants ascendants se mettent alors Ă  le soulever, puis le laisser tomber encore et encore, alors qu’il esquive des Ă©clats de glace et retient son souffle Ă  cause de l’air saturĂ© d’eau qui pourrait le noyer en cas de trop forte inhalation.

Au bout d’un moment, qui semble durer une Ă©ternitĂ©, le pilote rĂ©ussit finalement Ă  traverser la tempĂŞte avant de finir contre un arbre. Il consulte alors sa montre et comprend qu’il est maintenant 18h40. Il Ă©tait restĂ© dans le nuage pendant 40 minutes. Il sera ensuite soignĂ© Ă  l’hĂ´pital pour des engelures, des blessures de dĂ©compression et d’autres plaies mineures.

DĂ©cĂ©dĂ© en 2009 Ă  l’âge de 88 ans, après avoir repris du service suite Ă  l’accident, le lieutenant-colonel William Rankin, auteur de The Man Who Rode The Thunder, n’est aujourd’hui que l’une des deux personnes Ă  avoir survĂ©cu Ă  un Ă©vènement aussi incroyable.