Une équipe de chercheurs annonce avoir observé un premier cas de parthénogenèse facultative chez les crocodiles. Une femelle qui n’a eu accès à aucun mâle pendant seize ans aurait en effet pondu une couvée d’oeufs, dont l’un abritait un foetus complètement formé. La découverte révèle que cette forme inhabituelle de reproduction est possible chez plus d’espèces que nous ne le pensions (y compris, peut-être, chez les dinosaures). Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Biology Letters.
Qu’est-ce que la parthénogenèse facultative ?
La parthénogenèse facultative est un mode de reproduction asexuée par lequel un organisme a la capacité de se reproduire en développant un embryon sans fécondation tout en conservant la possibilité de se reproduire sexuellement. L’auto-reproduction peut être déclenchée en réponse à des facteurs environnementaux spécifiques, tels que l’absence de partenaires sexuels. Les embryons héritent alors uniquement du matériel génétique de la mère.
La parthénogenèse spontanée est assez courante chez les insectes comme les cafards et les abeilles. Au cours des deux dernières décennies, les chercheurs ont également enregistré une croissance des observations chez les vertébrés. Ce mode de reproduction inhabituel a en effet été documenté chez les oiseaux, les reptiles non aviaires (notamment les lézards et les serpents) et les poissons élasmobranches.
Nous devons cette croissance de la documentation à la prise de conscience du phénomène lui-même, mais aussi et surtout aux progrès de la génétique/génomique moléculaire et de la bioinformatique.

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Crédits : Rolf Wittke/istockUne première chez les crocodiliens
Par ailleurs, un cas de parthénogenèse a récemment été observé chez une femelle crocodile américaine évoluant dans un parc de reptiles au Costa Rica depuis 2002. En janvier 2018, les gardiens ont en effet découvert une couvée de quatorze œufs dans son enclos, dont sept semblaient fertiles. L’équipe les a incubés artificiellement pendant trois mois, mais aucun n’a éclos. En revanche, l’un de ces oeufs contenait un foetus entièrement formé, mais non viable.
Après avoir prélevé et comparé des échantillons d’ADN de la mère et du foetus, les chercheurs ont découvert que le foetus était génétiquement identique à la mère. Autrement dit, ces analyses ont confirmé l’absence d’ADN provenant d’un mâle.
Il s’agit du premier exemple connu chez un crocodilien, mais cette découverte pourrait avoir des implications beaucoup plus larges. En effet, rappelons que les crocodiliens (crocodiles, alligators, caïmans et gavials) et les oiseaux sont les derniers membres survivants d’un clade d’animaux connus sous le nom d’archosaures. Leur dernier ancêtre commun existait il y a environ 240 millions d’années.
Désormais, le phénomène de parthénogenèse facultative a donc été détecté dans ces deux branches (crocodiliens et oiseaux). De ce fait, nous pourrions imaginer une origine beaucoup plus ancienne que prévu. Rappelons également que les dinosaures et les ptérosaures étaient aussi tous des archosaures. En revanche, rien ne permet encore de dire que ces animaux étaient bel et bien capables d’un tel moyen de reproduction.
