Si l’intelligence artificielle s’impose de plus en plus dans nos quotidiens, ce n’est généralement qu’avec méfiance qu’elle est accueillie. Dérives écologiques, pertes d’emplois liées à l’automatisation des tâches, piratage de sites internet, risque qu’elle se retourne contre l’humanité et décide de l’éradiquer… Bien souvent, ce sont en effet les pires scénarios que l’on évoque quand on parle de cette technologie. Cependant, comme tout outil, il peut se révéler utile entre de bonnes mains. Si en juillet 2023, nous évoquions par exemple les IA utiles pour aider les humains à lutter contre le réchauffement climatique, une nouvelle étude y a cette fois eu recours pour étudier les risques d’extinction des plantes. Et ces données pourraient s’avérer précieuses pour l’avenir de notre planète.
Une IA pour prédire le risque d’extinction des plantes
Dans une nouvelle étude parue le 4 mars dans le journal le New Phytologist, une équipe de scientifiques des Jardins botaniques royaux de Kew, situés à l’ouest de Londres (Royaume-Uni) ont pour la toute première fois réussi à prédire le risque d’extinction des 328 565 espèces de plantes angiospermes connues.
Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont dans un premier temps utilisé un modèle informatique basé d’une part sur un ensemble de données portant sur les plus de 53 000 plantes qui figurent déjà sur la Liste Rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (International Union for Conservation of Nature ou IUCN) et fonctionnant d’autre part grâce à l’inférence bayésienne, une méthode d’inférence statistique qui permet de calcule des probabilités à partir de l’observation d’événements connus (à savoir ici les plantes déjà menacées d’extinction ou éteintes). Utiliser ces données et l’IA leur a ainsi permis d’évaluer les risques pour les 275 004 espèces végétales qui n’ont pas encore été évaluées (soit 70 % des plantes restantes). Des indicateurs tels que la taille des aires de répartition, le climat, l’empreinte humaine et l’histoire de leur évolution ont permis de préciser les estimations.
Des résultats que tout le monde peut consulter
Il faut savoir qu’en octobre 2023, une version préliminaire de ces recherches avait déjà démontré que 45,1 % des espèces de plantes à fleurs étaient déjà menacées d’extinction. Toutefois, la présente analyse va beaucoup plus loin en permettant l’accès à toutes les données obtenues dans le cadre de l’étude à toute personne, de l’acheteur qui choisit la prochaine plante qu’il va adopter dans son jardin ou son salon au chercheur professionnel dans le cadre de ses recherches en passant par le passionné de botanique qui visite tous les parcs de sa ville, de savoir si la plante en question risque l’extinction à l’état sauvage et à quel point les scientifiques sont sûrs de cette prédiction.
Sur la plateforme Plants Of the World Online, il est en effet possible de chercher le nom scientifique d’une plante en latin afin de savoir si l’espèce en question est catégorisée comme non menacée, vulnérable, en danger ou en danger critique d’extinction

Des données cruciales pour l’avenir de notre planète
Si ces statistiques sont importantes, c’est avant tout parce que les plantes jouent un rôle vital dans la richesse et la résilience des écosystèmes à l’échelle globale. A l’instar des forêts qui peuvent absorber une partie des émissions annuelles de gaz à effet de serre, et notamment de CO2, les végétaux peuvent également apporter des solutions à mesure que le climat change et permettre de soutenir les efforts visant à restaurer les écosystèmes sensibilisés.
Toutefois, comme le soulève Steven P. Bachman, le chercheur qui a dirigé ces travaux de recherche, « nous manquons actuellement d’estimations formelles pour la plupart des espèces de plantes et chaque perte silencieuse d’une espèce met en danger notre capacité à répondre aux défis du futur. Notre couverture exhaustive des estimations pour toutes les plantes angiospermes sensibilise à chaque espèce individuelle, mais aussi plus particulièrement aux espèces dont on prédit qu’elles sont menacées. » Ces recherches mènent donc un travail d’avant-garde pour permettre de mener à bien l’identification des plantes sensibles au risque d’extinction et des zones où elles se concentrent.

Permettre la conservation des plantes menacées d’extinction
D’après le Dr Eimear Nic Lughadha, l’un des auteurs de l’étude, « être évaluée, plus particulièrement comme étant en danger ou en danger critique, peut littéralement changer le destin d’une plante, car une fois que son risque d’extinction est connu, elle peut être priorisée pour sa conservation. En l’absence d’une évaluation sur la Liste Rouge de l’IUCN, nos prédictions apporteront une indication utile quant aux espèces que nous considérons comme pouvant plus vraisemblablement être menacées d’extinction. […] À une échelle plus large, nos conclusions pourront servir aux scientifiques pour prioriser et accélérer l’évaluation des plantes identifiées comme probablement menacées, mais pas encore officiellement déclarées comme telles par la Liste Rouge. »
Une fois identifiées, des efforts pourront permettre d’œuvrer à leur conservation et serviront à les protéger de l’extinction.
