Une découverte confirme la présence de nos ancêtres en France il y a plus de 50 000 ans

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Crédit : Philippe Psaila

Une équipe a annoncé avoir découvert dans une grotte française plusieurs pointes de lances et de flèches travaillées il y a plus de 50 000 ans par des humains modernes. À cette époque, Neandertal dominait encore la région. Les résultats, publiés dans la revue Science Advances, suggèrent que cette maîtrise des armes a peut-être donné à nos ancêtres un avantage sur les Néandertaliens. 

Une arrivée précoce

En 2022, Sciencepost rapportait la découverte d’une dent d’enfant trouvée dans la Grotte Mandrin, un abri sous roche dans le sud de la France près de la vallée du Rhône. Il s’agissait alors de la plus ancienne preuve connue de l’existence d’humains modernes en Europe occidentale. Le fragment dentaire suggérait en effet que nos ancêtres évoluaient sur place il y a au moins 54 000 ans, soit environ 10 000 ans plus tôt que prévu, à l’époque où Néandertal était encore bien implanté.

Des projectifs isolés dans la même grotte confirment la présence des humains anatomiquement modernes dans la région à cette époque.

Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont récupéré 852 artefacts avec des pointes, des lames et des éclats bien définis. Parmi ces échantillons, 383 avaient des motifs d’usure indiquant qu’ils avaient été jetés ou utilisés pour scier ou couper. Près de 200 autres objets montraient aussi des signes de projection.

L’équipe a également utilisé des répliques de ces artefacts pour tester leur efficacité. Ces pointes pouvaient effectivement transpercer la peau et la chair du gibier de l’époque. Les modèles d’usure correspondaient également à ceux observés sur les anciennes pointes.

On pensait jusqu’à présent que des armes à projectiles, comme des lances, des arcs et des flèches, étaient apparues très soudainement parmi les humains modernes vivant en Eurasie il y a 45 000 ans, pendant la période du Paléolithique supérieur. Ces travaux repoussent donc l’utilisation de ces armes, du moins en France.

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La co-auteure de l’étude, Laure Metz, teste l’une des répliques. Crédit : Ludovic Slimak

Un groupe restreint

Cependant, étant donné que Neandertal dominait le paysage il y a plus de 50 000 ans, comment être sûr que ces pointes de lances et de flèches ont bien été travaillées par des humains modernes ? Parce que ce type d’armement était encore totalement inconnu par nos cousins Néandertaliens, souligne à Sciencepost le Dr. Laura Metz, de l’Université d’Aix-Marseille et principale auteure de cette étude.

À l’époque, ces derniers chassaient en effet en contact étroit ou direct avec leurs proies, un processus beaucoup plus complexe, plus hasardeux et même beaucoup plus dangereux lors de la chasse au gros gibier comme le bison. À l’inverse, les arcs étaient utiles dans tous les environnements, ouverts ou fermés. Ils étaient aussi plus efficaces pour toutes les tailles de proies. Ces dernières pouvaient en effet être tirées rapidement et avec plus de précision. Cette maîtrise des techniques de chasse aurait d’ailleurs pu contribuer, plus tard, à la domination de nos ancêtres dans le paysage, tandis que Néandertal déclinait.

Néanmoins, la découverte soulève encore une question importante. Pourquoi, si les premiers humains modernes sont arrivés dans la région il y a 54 000 ans avec cet outil de chasse avancé, ont-ils ensuite « disparu » des archives fossiles pendant encore 10 000 à 12 000 ans, tandis que Néandertal continuait à prospérer durant ce laps de temps ?

Le fait d’avoir l’arc et les flèches ne donne pas l’entière supériorité face au nombre, souligne la paléontologue à Sciencepost. Ce premier groupe d’Homme moderne était probablement un groupe restreint (sans connaître le nombre exact), venu dans la Vallée du Rhône avec femmes et enfants. La dent de lait retrouvée précédemment suggère que ces derniers sont restés sur place pendant une génération environ, soit une quarantaine d’années. Il s’agissait donc de l’une des premières incursions de nos ancêtres directs en France.