Voici la galaxie la plus lointaine jamais observée

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La lumière de HD1. Crédits : Harikane and al.

Un objet rougeâtre isolĂ© dans l’Univers lointain vient d’ĂŞtre identifiĂ© comme la galaxie la plus Ă©loignĂ©e dĂ©couverte Ă  ce jour. Selon une Ă©tude, la structure existait Ă  peine 330 millions d’annĂ©es après le Big Bang.

Nouveau record cosmique

L’un des principaux objectifs des cosmologistes est de pouvoir isoler les premières galaxies de notre Univers et de mesurer leurs effets sur l’évolution cosmique. Des efforts ont permis de localiser quelques-unes de ces structures très anciennes, certaines évoluant moins d’un milliard d’années après le Big Bang. Il y a quelques années, des chercheurs avaient fait un nouveau pas en avant en isolant une galaxie massive qui existait 760 millions d’années après le Big Bang. Cependant, tous les records sont faits pour être battus.

Il y a quelques semaines, une Ă©quipe de chercheurs aurait en effet repĂ©rĂ© la lueur d’une galaxie encore plus ancienne Ă©voluant Ă  13,5 milliards d’annĂ©es-lumière de la Terre. Autrement dit, cet objet nommĂ© HD1 existait Ă  peine 330 millions d’annĂ©es après le Big Bang.

Pour cette Ă©tude, les chercheurs se sont appuyĂ©s sur quatre tĂ©lescopes optiques et infrarouges puissants : le tĂ©lescope Subar, le tĂ©lescope VISTA, le tĂ©lescope infrarouge du Royaume-Uni (UKIRT) et le tĂ©lescope spatial Spitzer. Ensemble, ils ont accumulĂ© plus de 1 200 heures d’observation, scrutant les recoins de notre univers dans le but d’identifier les sources de lumière les plus lointaines. HD1 s’est finalement dĂ©tachĂ©e parmi plus de 700 000 objets candidats.

Pour calculer sa distance, l’Ă©quipe a ensuite analysĂ© son redshift (dĂ©calage vers le rouge). En effet, plus un objet s’Ă©loigne de la Terre, plus la longueur d’onde de sa lumière est Ă©tirĂ©e, se dĂ©calant vers l’extrĂ©mitĂ© la plus rouge du spectre Ă©lectromagnĂ©tique. Ainsi, plus la distance est grande, plus le dĂ©calage vers le rouge est important.

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La lumière de HD1. Crédits : Harikane et coll.

Un objet qui interroge

La lumière de HD1 est en effet un peu dĂ©routante. Et pour cause, elle brille Ă©tonnamment dans les longueurs d’onde ultraviolettes. Cela suggère qu’un processus très Ă©nergĂ©tique se dĂ©roule en son sein.

Au dĂ©part, les chercheurs pensaient qu’il s’agissait d’une forte activitĂ© de formation stellaire. Cependant, le nombre d’Ă©toiles devant se former pour produire autant de lumière paraissait Ă©norme. Il en faudrait en effet plus d’une centaine par an, soit dix fois plus que prĂ©vu pour une galaxie de l’Univers primordial.

Ce problème pourrait nĂ©anmoins ĂŞtre rĂ©solu si ces Ă©toiles naissantes intègrent la toute première gĂ©nĂ©ration d’Ă©toiles de notre temps : celles de la population III. En effet, ces objets plus massifs, plus lumineux et plus chauds que les Ă©toiles modernes Ă©taient, semble-t-il, capables de produire plus de lumière UV que les Ă©toiles « modernes ». Leur prĂ©sence pourrait alors clarifier l’extrĂŞme luminositĂ© ultraviolette de cette galaxie.

Une seconde hypothèse avance que HD1 pourrait ĂŞtre un quasar, le rĂ©sultat incroyablement brillant d’un noyau galactique actif expliquĂ© par la prĂ©sence d’un trou noir supermassif dĂ©vorant de la matière avec frĂ©nĂ©sie en son cĹ“ur. Cependant, pour produire la lumière observĂ©e, les scientifiques ont calculĂ© que ce trou noir supermassif devrait ĂŞtre au moins cent millions de fois plus massif que le Soleil. Or, une telle taille remettrait sĂ©rieusement en question les modèles de croissance de ces objets aussi tĂ´t dans l’univers.

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Illustration d’un quasar. CrĂ©dits : DESY, Science Communication Lab

D’autres analyses Ă  suivre

Finalement, dĂ©terminer la nature d’une source aussi Ă©loignĂ©e sera très difficile, tant sa lumière fut attĂ©nuĂ©e dans les vastes Ă©tendues de l’espace-temps. « Imaginez apercevoir un navire au loin, coincĂ© au milieu d’un coup de vent et d’un Ă©pais brouillard. Depuis la terre ferme, vous pourriez alors tenter de deviner son origine en observant son drapeau, mais vous ne pourriez voir que certaines couleurs et formes de ce dernier« , explique l’astrophysicien Fabio Pacucci, du Harvard & Smithsonian Center for Astrophysics. « Ici, c’est un peu la mĂŞme chose. C’est finalement un long jeu d’analyse et d’exclusion de scĂ©narios invraisemblables« .

L’Ă©quipe espère que les futures observations avec le James Webb Telescope, optimisĂ© pour scruter l’Univers primordial, rĂ©vĂ©leront la nature de cette mystĂ©rieuse lumière.

Les dĂ©tails de l’analyse de cette galaxie et d’une seconde quasi aussi distante nommĂ©e HD2 seront bientĂ´t publiĂ©s dans The Astrophysical Journal. En attendant, ces travaux sont dĂ©jĂ  disponibles sur arXiv, un site de prĂ©impression.