un calmar des profondeurs trouvé au large de la Nouvelle-Zélande en février 2024
Un calmar des profondeurs trouvé au large de la Nouvelle-Zélande en février 2024. Crédits : Ocean Census/NIWA

Nouvelle-Zélande : 100 espèces maritimes inédites découvertes

Plus nous en apprenons sur nos mers et océans, plus nous comprenons à quel point nous les connaissons mal. Difficile en effet de sonder les mystères des sombres profondeurs pour en analyser toutes les espèces et mieux en comprendre la géologie, entre autres secrets enfouis sous les flots. Cependant, les initiatives continuent à se multiplier et à payer. Il y a quelques jours, nous vous parlions ainsi des nombreuses espèces animales et végétales incroyables découvertes il y a peu au large des côtes du Chili. Nous vous emmenons cette fois dans les eaux néo-zélandaises où une centaine d’espèces potentiellement nouvelles pour la science ont été dénichées.

Ocean Census : l’initiative qui vise à donner un visage aux espèces inconnues

Les océans recouvrent 71 % de la planète, constituant ainsi le plus grand écosystème planétaire, mais seuls 10 % de la vie océanique, qu’il s’agisse de la faune ou la flore, sont connus de la science. Or, une bonne connaissance de toute cette vie est très importante. Tout d’abord, cela peut mener à une révolution scientifique par le séquençage et le décodage de l’ADN de ces espèces avec l’espoir de mener à des avancées dans le domaine de la régulation du climat et le stockage du carbone, de la sécurité alimentaire, de la médecine, de l’énergie et bien plus encore.

Et surtout, de meilleures connaissances de l’océan peuvent nous permettre de trouver des solutions pour soutenir, maintenir et même renforcer la capacité océanique à générer de l’oxygène et réguler le climat. Enfin, la vie marine est en plein déclin. Il est donc essentiel d’identifier ces espèces et leur distribution pour mieux les protéger, notamment des activités humaines qui pourraient mener à leur perte avant même que nous les ayons découvertes.

Fondée par la Nippon Foundation en avril 2023, Ocean Census est une alliance internationale qui vise justement à identifier 100 000 espèces inconnues dans les dix années à venir. D’après l’organisation, 240 000 espèces marines ont été découvertes et nommées jusqu’à aujourd’hui avec seulement 2 200 nouveaux spécimens identifiés chaque année en moyenne. Les chercheurs qui font partie de cette initiative lancent donc des expéditions à travers le monde pour en trouver toujours plus et favoriser ainsi la conservation de la vie océanique et planétaire.

C’est justement dans ce cadre qu’une expédition au large de la Nouvelle-Zélande a permis de découvrir des spécimens inédits.

Un plongeon dans les eaux méconnues au large de la Nouvelle-Zélande

De par sa profondeur, le Bounty Trough n’intéresse pas beaucoup l’industrie de la pêche. Par ailleurs, si des géologues se sont déjà penchés sur cette zone au large de la côte est de l’île du Sud de la Nouvelle-Zélande, les biologistes n’avaient jusqu’alors pas mené de recherches sérieuses dans cette partie du Pacifique. Elle restait donc jusqu’à aujourd’hui très mal connue par les chercheurs.

Après avoir cartographié la zone avec un système d’imagerie et utilisé des caméras vidéo pour vérifier qu’ils pouvaient utiliser leur équipement sans risquer de nuire à une potentielle communauté animale vulnérable, une expédition de trois semaines dans cette région de 100 000 km2 a toutefois récemment permis d’y collecter 1 791 échantillons en allant rechercher des spécimens jusqu’à 4 800 m, soit presque autant que le mont Blanc, le point culminant de la chaîne des Alpes.

Parmi ces trouvailles, plus d’une centaine d’espèces sont considérées comme nouvelles pour la science. L’expédition a en effet permis d’identifier un éventail de vie très riche allant de trois nouveaux poissons à des escargots de mer en passant par des coraux ou encore des concombres de mer. Les scientifiques ont aussi identifié une douzaine de mollusques, une crevette et un céphalopode (un type de mollusque prédateur) jusqu’alors inconnus au cours de ces recherches intensives.

quelques unes des espèces trouvées au large de la Nouvelle-Zélande
Source: DR
Quelques-unes des espèces trouvées au large de la Nouvelle-Zélande – Crédits : Ocean Census/NIWA

Un travail de recensement qui commence à peine

Si cette équipe de 21 chercheurs de l’Institut national néo-zélandais de recherche sur l’eau et l’atmosphère (NIWA) et de scientifiques venus tout droit du Royaume-Uni ou d’Australie embarqués à bord du navire Tangaroa est déjà très enthousiasmée par leurs découvertes, leur travail commence à peine. En effet, comme l’explique le Dr Alex Rogers, le biologiste marin qui a mené cette mission, « ce nombre va augmenter à mesure que nous passons en revue de plus en plus d’échantillons. Je pense que ce nombre va s’élever à des centaines au lieu de juste cent. » Il ajoute que c’est « probablement l’équivalent d’une mission dans l’espace. Nous sommes encore au début, mais le nombre d’espèces trouvées dans le Bounty Trough nous démontre vraiment que nous avons encore un long chemin à parcourir pour comprendre où la vie se trouve dans l’océan. »

Il reste ainsi encore de très nombreux échantillons non identifiés ou qui laissent encore les scientifiques perplexes à l’instar du spécimen ci-dessous. D’après le chercheur, cet animal en forme d’étoile qui fait un centimètre de long a en effet provoqué beaucoup de questionnements. L’équipe imaginait à la base qu’il pouvait s’agir d’une étoile de mer ou d’une anémone, mais penche à présent plutôt pour une sorte de corail.

ces deux spécimens mystères pourraient faire partie d'une toute nouvelle espèce d'octocoraux
Source: DR
Ces deux spécimens mystères pourraient faire partie d’une toute nouvelle espèce d’octocoraux – Crédits : Ocean Census/NIWA

De nombreux spécialistes sur le coup

Maintenant que les chercheurs ont leurs échantillons, une équipe internationale va s’atteler à leur analyse afin de confirmer les découvertes, de les trier et de les décrire plus précisément. Ils pourront compter pour cela sur des ateliers dans le Musée de Nouvelle-Zélande Te Papa Tongarewa, à Wellington, ou au NIWA.

Tous restent toutefois lucides. Comme l’affirme Andrew Stewart, conservateur au musée Te Papa : « c’était un privilège de collaborer avec le NIWA et Ocean Census. Bien que nos découvertes soient importantes, nous savons que nous avons à peine effleuré la surface du Bounty Trough. Il reste encore tout un autre monde de faune qui attend encore d’être découvert. »

Deux zoarcidés potentiellement nouveaux pour la science capturés à 2 700 m de profondeur.
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Deux zoarcidés potentiellement nouveaux pour la science capturés à 2 700 m de profondeur. – Crédits : Ocean Census/NIWA
Julie Durand

Rédigé par Julie Durand

Autrefois enseignante, j'aime toujours autant partager mes connaissances et mes passions avec les autres. Je suis notamment passionnée par la nature et les technologies, mais aussi intriguée par les mystères nichés dans notre Univers. Ce sont donc des thèmes que j'ai plaisir à explorer sur Sciencepost à travers les articles que je rédige, mais aussi ceux que je corrige.