Voit-on déjà l’effet du changement climatique sur la circulation océanique nord-atlantique ?

Gulf Stream
Crédits : Wikimedia Commons.

Des chercheurs ont quantifié les contributions respectives de la variabilité naturelle et du changement climatique dans l’évolution de la circulation océanique nord-atlantique observée depuis le début du vingtième siècle. Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique Nature Climate Change le 25 avril dernier.

Une des conséquences du réchauffement climatique est l’affaiblissement de la circulation océanique de l’Atlantique Nord. En effet, l’extension polaire du Gulf Stream, autrement dit la dérive nord-atlantique, est mise en route par la plongée d’eaux froides et salées au niveau des mers polaires. Or, l’injection grandissante d’eau douce par la fonte des glaces s’oppose à cette plongée et fragilise par conséquent le système de courants transporteurs.

Attribuer les variations de la circulation océanique 

Un ralentissement de ce système est projeté avec plus ou moins d’intensité par l’ensemble des modèles de climat et serait d’ores et déjà observé dans le monde réel. En effet, la diminution consécutive du transport de chaleur vers le pôle doit s’accompagner d’une anomalie froide au sud du Groenland. Or, les mesures montrent justement une tendance au refroidissement dans cette région au cours des cent dernières années.

Cependant, si l’on en croit les résultats obtenus par le professeur Mojib Latif de l’Institut Leibniz d’océanographie (Kiel, Allemagne) et son équipe, la circulation nord-atlantique reste encore dominée par l’influence de la variabilité naturelle. Aussi, les changements constatés, dont la fameuse anomalie froide au sud du Groenland, sont pour une large partie le fruit de la dynamique interne au système de transport nord-atlantique.

circulation océanique
Schéma de la circulation océanique nord-atlantique. La flèche orangée qui se détache du Gulf Stream est la dérive nord-atlantique. Crédits : Nature

Entre variabilité naturelle et changement climatique

Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont croisé les observations des températures de surface de la mer aux modélisations numériques via une analyse statistique multivariée. Or, si les résultats s’accordent sur un rôle dominant des fluctuations naturelles, ils montrent qu’un début de ralentissement plus atypique a commencé à apparaître sur les décennies les plus récentes. Quoi qu’il en soit, les chercheurs notent qu’à ce jour, le signal climatique n’est pas encore dominant.

« Nos résultats confirment les découvertes scientifiques antérieures, mais la question demeure de savoir combien de temps nous resterons dans le domaine de la variabilité naturelle et à quel moment le changement climatique prendra le contrôle de la circulation océanique nord-atlantique », rapporte Jing Sun, l’un des coauteurs de l’étude.

Selon les scientifiques, le seul moyen pour espérer répondre de façon précise à cette question est d’améliorer les systèmes d’observations des courants océaniques dans le domaine très particulier que constitue l’Atlantique Nord.

« À l’heure actuelle, nous ne voyons aucun signe clair indiquant que le système ralentit considérablement, mais plutôt qu’il fluctue », ajoute Martin Visbeck, coauteur du papier. « Cependant, puisque les derniers modèles climatiques montrent qu’une réduction significative se produira, nous devrions savoir combien de temps encore nous serons du côté relativement sûr des changements naturels ».