Ce poisson était-il vraiment aussi énorme ? Pas si vite

Dunkleosteus avex
Une illustration du poisson de la période dévonienne Dunkleosteus avex sa longueur présumée de dix mètres. Crédit : MR1805

Un jeune chercheur s’est récemment intéressé à Dunkleosteus terrelli, un poisson vieux de 360 ​​​​millions d’années. On estimait jusqu’à présent sa longueur à près de dix mètres, mais de nouvelles analyses remettent ces projections en question. Les détails de ces travaux sont publiés dans la revue Diversity.

Dunkleosteus terrelli est une espèce éteinte de poisson préhistorique qui a vécu il y a environ 360 à 380 millions d’années, pendant le Dévonien, dans ce qui est maintenant l’Amérique du Nord et l’Europe. Ses fossiles ont été découverts pour la première fois dans les années 1860 dans l’État de l’Ohio, aux États-Unis. Ce poisson avait une mâchoire puissante et des plaques osseuses qui protégeaient son corps. Les scientifiques pensent qu’il s’agissait d’un prédateur actif qui se nourrissait principalement de petits poissons et d’autres animaux marins.

Il aurait joué un rôle important dans l’évolution des poissons préhistoriques. Ses mâchoires, qui ont évolué pour devenir plus puissantes et plus efficaces, auraient en effet conduit à l’apparition de poissons plus avancés, tels que les requins et les raies.

Cela étant dit, on estimait jusqu’à présent sa longueur à neuf ou dix mètres. Si tel avait été le cas, Dunkleosteus terrelli aurait donc été l’un des plus grands prédateurs marins de tous les temps. Cependant, nous pourrions avoir surestimé la taille de ce poisson préhistorique.

Environ quatre mètres

Ces nouveaux travaux sont l’œuvre de Russell Engelman, doctorant à l’Université Case Western de Cleveland, dans l’Ohio (États-Unis).

En observant les spécimens de D. terrelli conservés au Musée d’histoire naturelle de Cleveland, le jeune chercheur a rencontré un problème. En s’appuyant sur certaines anciennes mesures, il s’est en effet aperçu que celles-ci n’avaient tout simplement aucun sens biologiquement. Autrement dit, le chercheur n’a pas été en mesure d’associer le crâne de ce poisson avec un corps de neuf ou dix mètres de long. Toutes ses reconstructions nécessitaient en effet des proportions corporelles étranges et irréalistes qui ne ressemblaient en rien aux dessins originaux de Dunkleosteus terrelli.

En s’intéressant aux travaux précédents menés sur l’espèce, l’étudiant en paléontologie s’est alors aperçu que la plupart des chercheurs précédents n’avaient pas réellement examiné ces fossiles. En réalité, ils avaient simplement observé les restes et extrapolé la taille de D. terrelli à partir de la relation entre la taille du crâne d’un requin et la longueur de son corps. Depuis, personne ne s’était véritablement intéressé au sujet et cette longueur est restée dans l’imaginaire collectif.

Dans le cadre de ces travaux, le jeune chercheur a donc mesuré les dimensions de divers crânes de poissons et les a comparés avec leurs proportions corporelles. Il s’est alors aperçu que la taille et la forme du crâne étaient fortement corrélées aux proportions du corps. Les poissons avec des crânes plus longs ont en effet tendance à avoir des corps plus allongés, tandis que les poissons avec des crânes plus courts ont des corps plus petits.

De son côté, D. terrelli avait une tête relativement courte, suggérant qu’il avait un corps court et large ressemblant davantage à un thon qu’à un requin. D’après ces nouvelles estimations, l’animal ne mesurait probablement pas plus de quatre mètres de long.

Dunkleosteus
Les tailles « avant/après » de Dunkleosteus. Crédits : Russel Engelman

Morale de l’histoire : même les paléo-ichtyologistes peuvent parfois exagérer la taille de leurs prises.