Le 7 octobre 2024, l’Agence spatiale européenne (ESA) a lancé avec succès la mission Hera depuis Cap Canaveral, en Floride, à bord d’une fusée Falcon 9 de SpaceX. Ce lancement marque le début d’un voyage de plusieurs millions de kilomètres à travers le Système solaire, avec pour objectif d’étudier un système d’astéroïdes appelé Didymos et Dimorphos. Cette mission s’inscrit dans un cadre global de défense planétaire, visant à tester et comprendre les moyens de dévier les astéroïdes qui pourraient un jour menacer la Terre.
Un suivi crucial après la mission DART de la NASA
La mission Hera fait suite à l’expérience menée en septembre 2022 par la NASA baptisée DART (Double Asteroid Redirect Test). DART avait pour objectif de percuter délibérément Dimorphos, la petite lune de Didymos, dans le but de modifier sa trajectoire. Ce test de déviation avait permis de raccourcir l’orbite de l’objet de 33 minutes, démontrant ainsi qu’il est possible d’influencer le comportement d’un astéroïde grâce à une collision contrôlée.
Cependant, pour mieux comprendre les effets précis de cette manœuvre, la mission Hera est indispensable. Le vaisseau spatial observera en effet de près les conséquences de l’impact, notamment en examinant la taille et la profondeur du cratère créé par la collision ainsi que les changements potentiels dans la forme de la petite lune.
Le lancement s’est déroulé sans incident, malgré des anomalies rencontrées lors de précédents lancements de SpaceX. Notez que le propulseur Falcon 9, qui a transporté Hera dans l’espace, a utilisé tout son carburant pour cette mission et ne reviendra pas sur Terre, marquant la fin d’une série de 23 vols réussis pour ce propulseur spécifique.
Un voyage de plusieurs années
D’un coût estimé à 363 millions d’euros, Hera entreprendra un voyage de deux ans pour atteindre le système d’astéroïdes Didymos, avec une arrivée prévue fin 2026. Durant ce périple, la sonde effectuera un passage près de Mars en 2025.
Ce survol n’est pas simplement une étape cosmique, mais un point essentiel de la mission : la gravité de la planète rouge sera utilisée comme un coup de pouce pour ajuster la trajectoire de Hera et accélérer son voyage vers Dimorphos. Ce procédé, appelé assistance gravitationnelle, est une technique couramment utilisée dans les missions spatiales pour économiser du carburant et prolonger l’autonomie des vaisseaux tout en leur permettant de profiter de la force gravitationnelle d’une planète pour modifier leur vitesse et leur direction.
Un trio complémentaire
Une fois arrivé à destination, Hera fournira des données détaillées sur la structure de l’astéroïde, mais la sonde ne sera pas seule. Le vaisseau transporte en effet Milani et Juventas, deux petits satellites cubesats qui joueront des rôles cruciaux dans la mission.

Dans le détail, Milani sera spécialisé dans l’étude de la composition minérale de la surface de Dimorphos. Grâce à ses capteurs hyperspectraux, il pourra déterminer la composition chimique de l’astéroïde, une donnée cruciale pour comprendre sa formation et son origine. En plus d’aider à confirmer les effets de la collision avec DART, ces informations permettront de mieux caractériser les types d’astéroïdes que l’on pourrait rencontrer à l’avenir. Les scientifiques pourront ainsi affiner les modèles sur les astéroïdes proches de la Terre (appelés NEO ou Near-Earth Objects) et sur les stratégies à adopter pour dévier ceux qui présenteraient un risque pour notre planète.
Juventas, le deuxième cubesat, aura de son côté pour mission de mesurer la gravité et la structure interne de Dimorphos. Il est équipé d’un radar pénétrant capable d’envoyer des ondes à travers la surface de l’astéroïde pour étudier ses couches internes. Cela permettra de déterminer la densité, la porosité et la composition de ses entrailles, des éléments encore largement inconnus pour la plupart des astéroïdes. Cette technique permettra de vérifier si Dimorphos est un corps monolithique ou un tas de gravats, une collection de roches et de débris faiblement cohésifs, comme certains chercheurs le supposent.
En somme, les données recueillies à la fois par Hera, Milani et Juventas aideront à vérifier l’efficacité de la mission DART et à combler certaines lacunes dans notre connaissance des astéroïdes. Savoir comment ces objets réagissent à des impacts pourrait en effet littéralement sauver des vies en cas de menace directe pour la Terre.
