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Et si d’énormes tempêtes solaires avaient déclenché la vie ?

En visant des particules chargées trouvées dans le vent solaire sur un mélange de gaz présent dans l’atmosphère primitive de la Terre, des chercheurs ont découvert que les ingrédients combinés pouvaient former des quantités importantes d’acides aminés et d’acides carboxyliques. Les énormes éruptions solaires de notre jeune soleil hyperactif pourraient-elles avoir donné le petit « coup de pouce » dont la vie avait besoin il y a plusieurs milliards d’années ? Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Life.

Comment passer du non-vivant au vivant ?

Cette question, qui est l’un des grands mystères de l’humanité, suscite un vif intérêt et de nombreuses interrogations depuis des siècles. Dans les temps anciens, les civilisations privilégiaient les explications mythologiques ou religieuses avant que n’arrive la science et les expériences qui vont avec.

L’une des plus célèbres, connue sous le nom d’expérience de Miller-Urey, a été menée dans les années 1950. Pour ce travail, les chimistes Stanley Miller et Harold Urey ont créé un environnement de laboratoire simulant les conditions atmosphériques supposées de la Terre primitive, notamment la présence de gaz tels que le méthane, l’ammoniac, l’hydrogène et la vapeur d’eau. Ces gaz ont été soumis à des décharges électriques pour simuler les éclairs. Ces derniers étaient considérés comme une source d’énergie dans l’environnement de l’époque.

Au fil des jours, l’expérience avait alors produit une variété de composés organiques complexes. Certains étaient des acides aminés, les constituants de base des protéines qui sont essentielles à la vie telle que nous la connaissons.

Cependant, dans les années qui ont suivi, tout s’est un peu compliqué. Les chercheurs ont en effet découvert que l’atmosphère primitive de la Terre était en réalité remplie de moins d’ammoniac et de méthane qu’estimé. En revanche, il y avait plus de dioxyde de carbone et d’azote moléculaire que prévu. Or, ces deux derniers gaz nécessitent beaucoup plus d’énergie pour se décomposer que la foudre seule ne pourrait en fournir. Ce qui nous ramène à cette nouvelle étude.

Dans le cadre de ces travaux, une équipe de l’Université nationale de Yokohama au Japon, a exploré l’idée que les rayons cosmiques provenant d’éruptions solaires extrêmement énergétiques auraient pu fournir le coup de pouce nécessaire à la vie sur Terre.

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Que sont les tempêtes solaires ?

Comme les autres étoiles, le Soleil est chargé électriquement et composé de plasma chaud  dont les mouvements génèrent des champs magnétiques intenses. Les régions du Soleil où les lignes de ces champs magnétiques sont particulièrement concentrées et entrelacées sont appelées « zones actives ». Ces dernières sont souvent associées à la présence de taches solaires. Ici, les champs magnétiques peuvent devenir instables en raison de diverses forces et interactions. Si tel est le cas, elles peuvent alors libérer une quantité considérable d’énergie.

En conséquence, des quantités massives de particules chargées et de rayonnements traversent l’espace. Et parfois, certains croisent le chemin de la Terre. Ce matériau s’écrase alors dans le champ magnétique terrestre et agite les molécules de notre atmosphère.

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Une incroyable source d’énergie

Cela étant dit, on estime que des super éruptions n’éclatent généralement qu’une fois tous les cent ans environ. Cependant, cela n’a peut-être pas toujours été le cas. Nous savons en effet que pendant les cent premiers millions d’années de la Terre, ce type d’événement survenait tous les trois à dix jours, libérant à chaque fois des quantités gigantesques d’énergie. Imaginez l’équivalent de millions de bombes atomiques.

L’idée que ces éruptions solaires puissent avoir été impliquées dans l’apparition de la vie paraît donc tout à fait plausible. Cependant, jusqu’à présent, la plupart des scientifiques ont ignoré cette hypothèse dans la mesure où la tester nécessite un équipement spécialisé, comme des accélérateurs de particules. Ici, les chercheurs ont eu la chance d’avoir accès à plusieurs d’entre eux à proximité de leurs installations.

Pour déterminer le rôle qu’auraient pu avoir ces mégatempêtes dans l’apparition de la vie, les chercheurs ont combiné du dioxyde de carbone, de l’azote moléculaire, de l’eau et une quantité variable de méthane dans des mélanges de gaz qu’ils pouvaient s’attendre à trouver dans notre atmosphère primitive. En projetant ces mélanges de gaz avec des protons à partir d’un petit accélérateur de particules, ils ont alors déclenché la production d’acides aminés. Ils ont également produit des acides carboxyliques qui sont également essentiels à la vie.

Au cours de l’expérience, les chercheurs ont par ailleurs soumis ces mélanges de gaz à des éclairs simulés. Dans ces conditions, des acides aminés et carboxyliques se sont aussi formés. Cependant, le taux de production était environ un million de fois inférieur à celui des protons. Naturellement, cela ne veut pas dire pour autant que la foudre n’a pas joué un rôle dans le déclenchement de la vie. Néanmoins, il apparaît que les « caprices » de notre étoile pourraient avoir été un facteur beaucoup plus déterminant.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.