Le rôle sous-évalué de l’océan profond sur le cycle du carbone

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Une étude du climat de la Terre durant le Pliocène moyen, il y a trois millions d’années, met en évidence le rôle majeur joué par l’océan profond dans le cycle du carbone à long terme. Elle révèle notamment la nécessité de conduire des simulations suffisamment longues pour que l’océan profond puisse s’équilibrer aux forçages imposés et donc obtenir une réponse climatique réaliste. Les résultats ont été publiés dans la revue Nature Geoscience ce 14 juillet.

Avec une concentration de dioxyde de carbone (CO2) similaire à l’actuelle et une température globale plus élevée d’environ deux degrés, les conditions climatiques du Pliocène moyen sont souvent considérées comme analogues à celles que l’on s’attend à observer d’ici à la fin du siècle. Aussi, les études visant à comprendre comment le système climatique a répondu à ces teneurs plus élevées en gaz à effet de serre ne manquent pas, d’autant plus dans ce contexte géographique très proche de l’actuel.

La mise à l’équilibre de l’océan profond, une condition nécessaire pour des simulations réalistes

Les travaux sont souvent menés avec des modèles numériques de complexité intermédiaire. Or, selon une nouvelle étude, ces simulations ne sont pas assez longues pour permettre à l’océan profond de s’équilibrer, ce qui empêche de cerner la réponse complète du système aux changements dans les forçages externes (composition atmosphérique, volcanisme, etc.). Pour pallier cela, le professeur Heather Ford et son équipe ont effectué une simulation de deux mille ans avec les forçages caractéristiques du Pliocène moyen.

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« L’exécution de modèles climatiques mondiaux pendant des milliers d’années est coûteuse en calcul, mais essentielle pour réfléchir aux impacts à long terme du cycle du carbone et du changement climatique », rapporte le chercheur. En effet, les résultats ont révélé la formation d’eaux profondes dans le Pacifique Nord durant cette période, à l’image de celles que l’on observe aujourd’hui dans l’Atlantique Nord. Or, la présence de ces circulations affecte la capacité de stockage du carbone par l’océan profond.

« Alors que la plupart des études se concentrent sur les conditions à la surface de la mer, il est également important d’examiner les changements dans l’océan profond, car ceux-ci auront un impact sur les conditions de la surface de la mer », détaille Heather Ford. « Nous savons que le Pacifique Nord agit aujourd’hui comme une zone de stockage du carbone, mais si une masse d’eau profonde se forme, elle empêchera ce stockage avec des conséquences sur le cycle global du carbone ».

Ces résultats novateurs mettent en évidence l’importance de la mise en équilibre des composantes lentes du système climatique avec les forçages imposés, au risque de manquer une partie notable de la réponse du cycle du carbone à long terme. Pour ce faire, il est nécessaire d’intégrer les simulations sur des milliers d’années, une tâche qui reste chronophage et gourmande en ressources informatiques même avec les supercalculateurs actuellement disponibles sur le marché.