Pourquoi cette sonde mettra-t-elle si longtemps à atteindre la Lune ?

CAPSTONE lune
Crédits : NASA/Daniel Rutter

Un petit vaisseau lancé mardi depuis la Nouvelle-Zélande nous rapproche un peu plus du retour des humains sur la Lune. Le CubSat, appelé CAPSTONE, analysera la stabilité de l’orbite prévue pour la future station en orbite autour de notre satellite prévue dans le cadre du programme Artemis. Il doit arriver sur place en novembre. Mais pourquoi son voyage est-il aussi long ?

Pourquoi la NASA lance-t-elle CAPSTONE ?

L’un des éléments clés d’une présence humaine durable autour de la Lune sera la Lunar Orbital Platform-Gateway, une station spatiale qui facilitera les voyages réguliers vers et depuis la surface. Pour opérer, cet avant-poste devra être placé sur une orbite de halo quasi rectiligne.

Pour rappel, les orbites de halo sont influencées par la gravité de deux corps (ici, la Terre et la Lune). L’influence de ces deux corps contribue à rendre l’orbite très stable, minimisant la quantité de propulseur nécessaire pour faire évoluer un vaisseau autour de la Lune.

Ces interactions gravitationnelles maintiennent également l’orbite à un angle d’environ 90 degrés par rapport à la ligne de visée depuis la Terre. Ainsi, un vaisseau placé sur ce type d’orbite ne passe jamais derrière la Lune, ce qui faciliter les communications avec les équipes au sol.

Sur cette orbite, il est prévu que la future station se rapproche à moins de 4 000 kilomètres de la surface lunaire lors de son approche la plus proche. Elle se placera ensuite à un peu plus de 75 000 km de la surface lorsqu’elle atteindra son point le plus éloigné. Une orbite complète sera clôturée en une semaine environ.

CAPSTONE lune
CAPSTONE orbitera autour de la lune dans une orbite de halo presque rectiligne, un chemin qu’aucun vaisseau spatial n’a jamais occupé auparavant. Crédits : Space Advance

Que se passera-t-il pendant la mission ?

Cette « place de parking » dispose donc de plusieurs avantages. Toutefois, aucun vaisseau spatial ne s’y est jamais garé jusqu’à présent. L’objectif de CAPSTONE sera donc de fournir des données à la NASA pour confirmer les modèles mathématiques permettant de faire fonctionner son avant-poste dans quelques années. Dans le détail, en mesurant le temps qu’il faut aux signaux radio pour aller et venir vers la Terre, le vaisseau spatial triangulera sa position, puis ajustera sa trajectoire en conséquence.

CAPSTONE testera également une méthode alternative permettant de stabiliser sa position en travaillant avec d’autres engins spatiaux encerclant la Lune, notamment le Lunar Reconnaissance Orbiter (une sonde de la NASA).

Notez que bien que la mission CAPSTONE recueille des informations pour la NASA, elle est exploitée par une société privée, Advanced Space, basée à Westminste (Colorado). Son lancement, opéré par la société Rocket Lab au moyen de sa fusée Electron, a eu lieu ce mardi depuis la Nouvelle-Zélande.

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Illustration de CAPSTONE autour de la Lune. Crédits : NASA

Pourquoi un voyage aussi long ?

Si les missions Apollo avec équipage de la NASA ont fait le voyage en seulement trois jours, CAPSTONE n’atteindra sa cible que le 13 novembre prochain, soit dans plus de quatre mois. Comment expliquer une telle différence ? En réalité, il s’agit d’une question de fusée.

Les vaisseaux Apollo ont été lancés au sommet de fusées Saturn V, les plus puissantes jamais envoyées dans l’espace à ce jour. CAPSTONE a en revanche décollé sur une fusée de dix-huit mètres de haut conçue pour envoyer de petits satellites en orbite. Pour atteindre la Lune, l’équipe a donc dû faire preuve de créativité en choisissant un chemin plus économe en carburant. Or cet itinéraire connu sous le nom de trajectoire de transfert lunaire balistique (BLT) est beaucoup plus long.

« Les trajectoires BLT sont un type de transfert à faible énergie dans lequel un vaisseau spatial se lance à un ou deux millions de kilomètres de la Terre (où la perturbation de la gravité du soleil devient dominante), puis revient sur Terre avec un plus grand rayon de périgée qu’auparavant et un plan d’orbite géocentrique différent« , détaille l’équipe de chercheurs. Pour rappel, le périgée fait référence à l’approche la plus proche d’un satellite de la Terre pendant son orbite. « Lorsqu’il est conçu avec la géométrie appropriée, il est possible d’amener le vaisseau à proximité de la Lune« , ajoutent-ils.

Concrètement, le troisième étage de la fusée Proton va effectuer un certain nombre de brûlures de moteur en orbite au cours de ces prochains jours pour éloigner CAPSTONE de plus en plus loin de notre planète (jusqu’à 1,3 million de kilomètres).

Le 4 juillet prochain, le périgée de la sonde se rapprochera de la Lune. À cet instant, Photon va effectuer une dernière combustion et libérer le vaisseau. Celui-ci suivra ensuite son propre chemin vers la Lune.