Pratiquement un dixiĂšme de la population mondiale entendrait des voix. Une Ă©tude stipule quâil sâagit dâhallucinations auditives Ă parfois dissocier dâune Ă©ventuelle pathologie mentale. La solution rĂ©side-t-elle uniquement dans les traitements classiques ?
Le fait dâentendre des voix peut toucher nâimporte qui, mĂȘme des personnalitĂ©s importantes, la plus cĂ©lĂšbre Ă©tant Jeanne dâArc (1412-1431). Citons Ă©galement AmĂ©lie Nothomb, Zinedine Zidane ou encore Martin Luther King. Ces exemples de personnalitĂ©s assujetties au phĂ©nomĂšne attestent de son existence, mais des Ă©tudes scientifiques indiquent que celui-ci est dâune ampleur sous-estimĂ©e.
PubliĂ© par le magazine The Atlantic le 27 juin 2017, un article du journaliste Joseph Frankel traite de cette question. LâintĂ©ressĂ© explique que dans les annĂ©es 1970, nâimporte quel patient dĂ©clarant entendre des voix Ă©tait systĂ©matiquement cataloguĂ© comme schizophrĂšne et hospitalisĂ© en consĂ©quence.
NĂ©anmoins, la recherche ayant Ă©voluĂ© sur le sujet quelques annĂ©es plus tard, des traitements adaptĂ©s ont Ă©tĂ© mis en place pour pratiquement chaque pathologie. Il sâavĂšre Ă©galement quâun grand nombre de personnes entendant des voix le vivent trĂšs bien au quotidien, câest pourquoi la mĂ©diatisation autour de ce phĂ©nomĂšne est finalement assez importante.
Un duo composĂ© dâun psychiatre et dâun psychologue ont rĂ©uni deux groupes composĂ©s de malades dâun cĂŽtĂ© et de personnes cohabitant avec leurs voix intĂ©rieures au quotidien de lâautre. Le but Ă©tait de mieux comprendre les Ă©motions des personnes qui ne ressentent pas de souffrance lorsque leurs voix se manifestent. Il sâagit dâapporter des diagnostics plus pertinents et prĂ©cis, car la schizophrĂ©nie est une notion trop gĂ©nĂ©rale dans beaucoup de cas puisque les symptĂŽmes peuvent varier.
AmĂ©liorer le diagnostic nâest pas la seule volontĂ© des deux chercheurs puisque ces derniers tentent Ă©galement dâĂ©laborer de meilleurs traitements. Les scientifiques ont lorgnĂ© du cĂŽtĂ© des groupes de soutien qui se sont crĂ©Ă©s il y a quelque temps aux Ătats-Unis, ainsi quâen France. Les chercheurs ont tentĂ© de comprendre si lâenvironnement social ainsi que les rĂ©actions de lâentourage concernant ceux qui entendent des voix engendrent chez ces derniĂšres le dĂ©veloppement dâune pathologie.
« Les maladies mentales et la schizophrĂ©nie sont de vraies maladies qui doivent donner lieu Ă un traitement. Mais la maniĂšre dont une culture interprĂšte les symptĂŽmes peut affecter le diagnostic », explique lâanthropologue Tanya Luhrmann.
En anthropologie et en psychologie, certains scientifiques estiment que la perception dâun tel phĂ©nomĂšne dĂ©pend de la culture, de lâhistoire et de la religion en vigueur dans un pays. Il faut savoir que suivant les pays et mĂȘme les Ă©poques, le fait dâentendre des voix nâa pas toujours Ă©tĂ© liĂ© Ă une maladie mentale.
LâĂ©tude en question montre nĂ©anmoins que les personnes entendant des voix et sâen accommodant parfaitement au quotidien auraient vraisemblablement Ă©tĂ© davantage tolĂ©rĂ©es par leur entourage. Le fait dâen parler rĂ©guliĂšrement avec dâautres personnes se trouvant dans un cas similaire permet Ă©galement de mieux lâaccepter.
Cependant, de nombreuses personnes adoptent une dĂ©marche risquĂ©e : celle de remplacer les traitements classiques par des sĂ©ances en groupe de soutien. En rĂ©alitĂ©, cela peut ĂȘtre trĂšs dangereux pour les personnes souffrant rĂ©ellement dâune maladie mentale. Ainsi, les patients devraient mĂ©langer les deux solutions afin de bĂ©nĂ©ficier dâun traitement qui pourrait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme complet. Pour Tanya Luhrmann, « les comportements inhabituels comme ceux-lĂ ne devraient entrer dans le royaume du diagnostic mĂ©dical uniquement sâils font souffrir les gens » et il faut « apprendre de ceux qui arrivent Ă contrĂŽler leurs voix pour enseigner leur technique Ă ceux qui en souffrent ».
Sources : The Atlantic – Slate