Deux chercheurs réalisent des observations inédites de l’anatomie d’embryons humains

Une véritable prouesse vient d’être réalisée par deux chercheurs français qui ont réalisé une série d’observations inédites de l’anatomie d’embryons humains âgés de 6 à 14 semaines. Une combinaison de trois techniques leur a permis de « passer du dessin à la réalité ».

« Plonger au cœur du vivant. Passer du dessin à la réalité ». Tels sont les mots employés dans le communiqué du CNRS pour qualifier la prouesse réalisée par Alain Chédotal, directeur de recherche INSERM, au sein de l’Institut de la vision (INSERM/UPMC/CNRS) et Paolo Giacobini au centre de recherche Jean Pierre Aubert (INSERM/Université de Lille). Cette prouesse nous offre des photos et vidéos en 3D de plusieurs tissus et organes d’embryons et fœtus humains âgés de 6 à 14 semaines.

Jusque-là, la représentation des embryons et de leurs organes n’était qu’illustrations issues de l’assemblage et de l’interprétation des données provenant de l’analyse de fines coupes observées au microscope. Pour mettre fin à ces représentations incomplètes et imprécises, les équipes des deux chercheurs ont combiné trois techniques (l’immunofluorescence, la clarification des tissus et l’observation microscopique) pour diffuser les premières images 3D réelles des tissus et organes d’embryons. Un site internet a d’ailleurs été mis en ligne pour mettre à tous de consulter ces données photos et vidéos, à cette adresse.

Foetus de 4 mois / iStock

La première de ces techniques consiste à localiser les organes en utilisant des anticorps fluorescents capables de se fixer sur les protéines des tissus. Ensuite, ces organes sont « plongés dans plusieurs solvants pour éliminer les lipides membranaires et ne conserver que l’architecture des organes et ainsi permettre à la lumière de passer », c’est la clarification. Enfin, troisième étape, grâce à un microscope et son laser épais de deux micromètres, les échantillons transparents ont été scannés. La dernière phase est la restitution par informatique de chaque plan de l’organe en photo puis en 3D.

« Ce que nous avons observé a confirmé les données connues en embryologie, mais c’est la première fois que nous obtenons des images réelles de l’organisation des tissus avec autant de détails. Nous avons notamment découvert des choses qu’il n’était pas possible de voir sans marquage spécifique. Nous avons par exemple réussi à distinguer les nerfs sensitifs (qui transmettent des signaux sensoriels vers le cerveau) des nerfs moteurs (qui sont reliés aux muscles), ce qui était alors impossible », explique Alain Chédotal. Désormais, « nous pouvons avoir une idée du rythme de prolifération cellulaire pour chaque organe en comptant les cellules fluorescentes aux différents âges embryonnaires », ajoute-t-il.

« Nous y proposons nos films libres d’accès et allons l’enrichir au fur et à mesure que nous en produirons de nouveaux. Nous aimerions également que d’autres laboratoires puissent le compléter avec leurs propres travaux. L’objectif est d’en faire une banque internationale d’images pour disposer d’un véritable atlas en 3D de l’embryon humain au cours du premier trimestre de développement, avec une recherche possible organe par organe. Il y a à la fois un but didactique, mais aussi une utilité clinique notamment pour les chirurgiens qui opèrent in utero et disposeront ainsi d’images précises des tissus de l’embryon ou encore de leur système nerveux et vasculaire », concluent les chercheurs.