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Les rennes du grand Nord offrent le plus beau cadeau possible à nos enfants (même le Père Noël ne fait pas mieux)

Une découverte scientifique vient de révéler que les rennes jouent un rôle insoupçonné dans la stabilité climatique mondiale. Alors que les chercheurs scrutaient les mécanismes complexes du réchauffement climatique dans les forêts boréales, ils ont mis au jour une vérité stupéfiante : ces animaux emblématiques de Noël protègent notre planète d’une catastrophe climatique bien plus efficacement que toutes nos technologies. Cette révélation pourrait transformer notre approche de la lutte contre le changement climatique.

La bombe à carbone qui sommeille dans le Grand Nord

Les forêts boréales et la toundra arctique abritent l’un des secrets les mieux gardés de notre planète : un réservoir colossal de carbone estimé à mille milliards de tonnes. Ces écosystèmes nordiques capturent à eux seuls la moitié du dioxyde de carbone absorbé sur Terre, constituant un rempart naturel contre le réchauffement climatique.

Cependant, ce trésor écologique cache un piège redoutable. Lorsque les conditions changent, notamment avec la diminution de la couverture neigeuse, ce carbone prisonnier peut s’échapper massivement dans l’atmosphère. Cette libération créerait un cercle vicieux incontrôlable : plus de carbone dans l’air engendre plus de réchauffement, qui libère encore plus de carbone, et ainsi de suite.

Les climatologues redoutent particulièrement ce scénario car il pourrait rendre vains tous nos efforts de réduction des émissions. Même si l’humanité cessait immédiatement de brûler des combustibles fossiles, cette bombe à carbone naturelle pourrait maintenir le réchauffement sur une trajectoire catastrophique.

L’expérience qui change tout

Pour comprendre ces mécanismes complexes, une équipe de chercheurs finlandais a mené une étude remarquable entre 2019 et 2023. Ils ont analysé les émissions de carbone de 42 parcelles forestières, comparant minutieusement des zones où les rennes pâturent librement avec d’autres où ils sont exclus depuis des décennies.

L’expérience s’est déroulée sur deux sites distincts. À Oulanka, les rennes ont été bannis d’une partie de la forêt pendant 25 ans, tandis qu’à Kevo, une zone reste interdite aux brouteurs depuis 55 ans. Pour simuler les variations climatiques, les scientifiques ont ajouté ou retiré de la neige sur certaines parcelles chaque année.

Cette méthodologie rigoureuse a permis de révéler des différences saisissantes entre les zones pâturées et non pâturées, ouvrant la voie à des découvertes qui bouleversent notre compréhension des équilibres écologiques nordiques.

Des résultats qui défient les attentes

Les résultats obtenus, publiés dans Science of the Total Environment, ont stupéfié la communauté scientifique. Dans les forêts privées de rennes depuis des décennies, les années à faible enneigement déclenchent effectivement des fuites massives de carbone, confirmant les pires craintes des climatologues. Ces émissions persistent même en été, probablement à cause de sols plus secs et déstabilisés.

Mais dans les zones où les rennes continuent de paître, le phénomène disparaît presque entièrement. Même lors des hivers peu enneigés, ces forêts conservent jalousement leur carbone. Plus impressionnant encore, les émissions de carbone sont trois fois plus élevées dans les parcelles non pâturées que dans celles fréquentées par les rennes.

À Oulanka, les chercheurs ont même observé que les bénéfices du pâturage persistent longtemps après le départ des animaux, mais pas indéfiniment. Après 25 ans d’absence, les effets protecteurs s’estompent, suggérant qu’il existe une fenêtre temporelle critique pour maintenir ces équilibres.

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Le secret des lichens

L’explication de ce phénomène remarquable réside probablement dans les lichens, ces organismes symbiotiques que les rennes affectionnent particulièrement. En broutant ces végétaux, les rennes modifient profondément la composition du tapis forestier.

Noora Kantola, doctorante à l’Université d’Oulu et auteure principale de l’étude, explique que les lichens repoussent extrêmement lentement sous les climats froids. Leur absence ou leur abondance influence directement la température et l’humidité du sol, paramètres cruciaux qui régulent l’activité des micro-organismes décomposeurs responsables des émissions de carbone.

Cette interaction complexe entre herbivores, végétation et sol illustre parfaitement l’interconnexion subtile des écosystèmes nordiques. Elle démontre que la disparition d’une seule espèce peut déclencher des changements en cascade aux répercussions climatiques planétaires.

Une urgence écologique méconnue

Ces découvertes transforment radicalement notre perception des enjeux climatiques. Les populations de rennes et de caribous connaissent un déclin alarmant à travers l’Arctique, victime du réchauffement climatique, de la fragmentation des habitats et des activités humaines.

Cette recherche suggère que la restauration de ces populations pourrait constituer une stratégie climatique prioritaire, aussi importante que la transition énergétique ou la protection des forêts tropicales. Les rennes ne sont plus seulement des animaux emblématiques des contes de Noël, mais des gardiens essentiels de la stabilité climatique mondiale.

L’ironie de cette situation n’échappe pas aux scientifiques : nous détruisons les écosystèmes qui nous protègent naturellement du changement climatique, créant nous-mêmes les conditions de notre propre vulnérabilité face aux catastrophes que nous redoutons le plus.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.