Le phytoplancton régresse dangereusement depuis le début de l’ère industrielle

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Crédits : Wikimedia Commons.

Les années passent et les éléments de preuves s’assemblent à vitesse grandissante. Le phytoplancton est en déclin. Une nouvelle étude parue ce 6 mai dans la revue scientifique Nature appuie l’urgence. La productivité dans le nord de l’Atlantique – une des régions les plus prolifiques du globe – a diminué de 10 % depuis le début de l’ère industrielle.

Le phytoplancton comprend l’ensemble des organismes végétaux se développant et vivant en suspension dans la couche superficielle de l’océan. De taille microscopique, on en compte plus de 20 000 espèces. Il revêt une importance écosystémique majeure, puisqu’il se situe à la base des chaînes alimentaires marines. Par ailleurs, il participe activement à la régulation du climat global, notamment par la capture du dioxyde de carbone atmosphérique (CO2) qu’il transforme en dioxygène (O2).

Déclin du phytoplancton : le cas de l’Atlantique nord

Malheureusement, le plancton végétal se révèle être en déclin. Une thématique qui refait surface avec la parution d’une nouvelle étude ce 6 mai. Les auteurs du papier ont quantifié son évolution dans l’une des régions les plus productives du globe : l’Atlantique nord sub-polaire. Et les faits sont là. Depuis 1850 et le début de la révolution industrielle, la productivité du végétal s’est réduite de 10 %.

« C’est une baisse suffisamment importante pour que nous soyons concernés », indique Matthew Osman, auteur principal du papier. « L’ampleur de la productivité dans les océans varie en gros avec la quantité de phytoplancton que vous avez. Cela correspond donc à une perte de 10 % de la nourriture marine primaire de cette région au cours de l’ère industrielle » poursuit-il. « Si nous avons une population croissante mais une nourriture primaire en déclin, à un moment donné, nous allons probablement ressentir les effets de ce déclin ».

On peut notamment penser aux retombées sur le secteur de la pêche, qui nourrit abondamment les populations humaines.

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Prolifération de phytoplancton au nord de la Norvège le 1 août 2004. Crédits : NASA.

L’utilité des carottes de glace du Groenland

Mais comment les chercheurs ont-ils fait pour retracer l’évolution de la productivité du phytoplancton sur 2 siècles ? Inutile de compter sur les observations satellitaires, seulement disponibles depuis les années 1970. La réponse se trouve en fait dans les carottes glaciaires du Groenland.

L’acide méthylsulfonique se trouve être un produit dérivé propre au sulfure de diméthyle, lui-même produit et rejeté dans l’air par les proliférations de phytoplancton. Ainsi, en mesurant le taux d’acide méthylsulfonique le long des échantillons de glace, il est possible de retracer la productivité planctonique sur plusieurs siècles dans la région. Au total, ce sont 12 carottes cadrant le Groenland qui ont été analysées.

Le réchauffement climatique responsable ?

Ce qui est observé, et qui justifie les conclusions exposées plus haut, est que ce taux est en baisse depuis le début de l’ère industrielle. « Nous constatons un déclin à long terme qui prend naissance à peu près au moment où nous avons commencé à perturber le système climatique en émettant des gaz à effet de serre à grande échelle », ajoute M. Osman.

Il y a deux mécanismes qui participent à ce déclin. Le réchauffement de l’eau, mais surtout le ralentissement de la circulation océanique dans le nord de l’Atlantique. Conséquence de la fonte du Groenland et de la banquise arctique, ce ralentissement limite la remontée de nutriments vers la surface. Or, ceux-ci sont nécessaires à la croissance du phytoplancton. De ce fait, la productivité diminue. Un mécanisme déjà anticipé par de précédents travaux et  qui semble désormais confirmé par les observations.

« Ce n’est pas une bonne nouvelle, mais nous ne pouvons plus prétendre à l’ignorance. Nous avons des preuves que cela se produit (…) », conclut l’auteur principal.

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