Les astronautes qui reviendront sur la surface de la Lune seront amenés à conduire des rovers pour se déplacer. Le meilleur moyen de faciliter ces déplacements tout en se protégeant de la poussière lunaire serait de construire des routes, mais comment s’y prendre ?
Le problème de la poussière lunaire
« Avec la civilisation viennent les routes » est une expression bien connue qui souligne le lien étroit entre les infrastructures de transport, la mobilité des personnes et des biens, et le progrès de la société. Et ce qui est vrai sur la Terre l’est aussi sur la Lune. Il n’aura en effet échappé à personne que plusieurs agences envisagent de s’établir durablement sur notre satellite. Pour ce faire, il va donc falloir imaginer les bonnes infrastructures.
Le cas de poussière lunaire est particulièrement important. Elle est en effet composée de petits grains minéraux provenant de l’érosion des roches lunaires par les impacts météoritiques. Cette poussière est ultra fine, abrasive et collante en raison de l’absence d’atmosphère significative sur la Lune.
Lors des missions Apollo, la poussière lunaire posait déjà de nombreux problèmes techniques, obstruant les équipements et les joints de combinaisons spatiales et provoquant une usure prématurée des matériaux. Elle pouvait également pénétrer à l’intérieur des habitats lunaires, ce qui représentait un risque pour la santé des astronautes. De plus, la poussière peut retenir la chaleur solaire, ce qui signifie que les équipements exposés à la lumière directe du soleil pouvaient surchauffer.
Le cas du rover lunaire Apollo 17 est un exemple marquant. Lorsque l’aile arrière du rover a été perdue, l’exposition à la poussière a causé des problèmes de surchauffe. Les astronautes ont dû improviser en utilisant des cartes lunaires pour protéger les équipements du soleil et réguler leur température. Le rover lunaire soviétique Lunokhod 2 avait également connu des problèmes de surchauffe en raison de la poussière ayant obstrué son radiateur.

Faire fondre le régolithe
Le meilleur moyen de faciliter les déplacements des futurs astronautes serait d’éloigner autant que possible cette poussière en construisant par exemple des routes. Cependant, transporter des matériaux de construction depuis la Terre coûte cher, c’est pourquoi les chercheurs souhaitent s’appuyer au maximum sur les ressources lunaires elles-mêmes. La réponse la plus pratique consisterait alors à transformer cette poussière.
Le projet PAVER (Paving the road for large area sintering of regolith) de l’ESA a récemment étudié la faisabilité de cette même approche dans le cadre d’une collaboration avec plusieurs universités et instituts. Pour ce faire, les chercheurs ont utilisé un laser au dioxyde de carbone de 12 kilowatts pour faire fondre de la poussière de Lune simulée en une surface solide vitreuse dans l’optique de construire des surfaces pavées.
Les chercheurs ont découvert qu’ils pouvaient produire des carreaux triangulaires à centre creux d’environ 25 centimètres de largeur et jusqu’à environ 2,5 millimètres d’épaisseur. L’idée serait de les emboîter ensuite pour créer des surfaces solides sur de vastes zones de sol lunaire destinées à être utilisées dans les routes et les aires d’atterrissage.

Une approche prometteuse
Afin de concentrer la lumière du soleil pour générer sur la lune un faisceau aussi puissant que ceux utilisés dans ces expériences, les chercheurs ont déterminé qu’une lentille d’environ 1,74 mètre de diamètre pourrait faire l’affaire. De cette façon, des « pavés » pourraient être créés sur la Lune dans un temps relativement court avec un équipement simple.
Les expériences futures devraient analyser dans quelle mesure ces structures survivent à la poussée des fusées afin de voir si elles pourraient être utilisées dans les aires d’atterrissage. Les chercheurs devront également tester ces techniques dans des conditions lunaires simulées, par exemple en l’absence d’air et avec la gravité réduite constatée à bord des vols paraboliques.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue .
