Selon une étude, les données collectées par le rover chinois Zhurong laissent à penser que des processus de décongélation de glace et de neige d’eau salée pourraient être à l’origine de plusieurs caractéristiques de surface observées aux basses altitudes martiennes. De tels processus se seraient même produits il y a à peine 400 000 ans. Les détails de ces travaux sont publiés dans la revue Science.
Nous savons grâce à des études antérieures que Mars abritait jadis de grandes quantités d’eau liquide en surface. Il y a plusieurs milliards d’années, la fuite de son atmosphère primitive a finalement rendu l’existence durable de cette eau liquide vraiment difficile. Ainsi, il a été largement admis que l’eau ne pouvait désormais y exister que sous forme solide ou gazeuse.
Néanmoins, des gouttelettes observées sur le bras robotique de l’atterrisseur Phénix, qui s’est posé sur Mars en mai 2008, prouvent que de l’eau liquide salée peut parfois apparaître en été aux hautes latitudes actuelles sur Mars. Des simulations numériques ont également montré que des conditions climatiques propices à l’eau liquide peuvent actuellement se présenter brièvement dans certaines zones.
Cependant, jusqu’à présent, aucune preuve n’avait démontré la présence d’eau liquide aux basses latitudes, d’où l’intérêt de ces nouveaux travaux basés sur les données collectées par le rover chinois Zhurong.
Le dégel du givre et de la neige
Zhurong, qui fait partie de la mission d’exploration chinoise Tianwen-1, a atterri avec succès sur Mars le 15 mai 2021 à l’extrémité sud de la plaine d’Utopia Planitia dans les basses terres du nord. Pour ces travaux, les chercheurs ont utilisé les données obtenues par les instruments du véhicule pour étudier les caractéristiques de surface à différentes échelles sur les dunes situées autour de la zone d’atterrissage.
Ces analyses ont permis d’isoler des caractéristiques morphologiques importantes, telles que des croûtes, des fissures, une granulation, des crêtes polygonales ou encore une trace en forme de bande. L’analyse des données spectrales a également révélé que la couche superficielle de ces dunes était riche en sulfates hydratés, en silice hydratée (en particulier l’opale-CT), en minéraux d’oxyde de fer trivalent (en particulier la ferrihydrite) et possiblement en chlorures.
En s’appuyant sur les données météorologiques mesurées par Zhurong et d’autres rovers martiens, les chercheurs ont alors déduit que ces caractéristiques étaient probablement liées à l’implication d’eau salée liquide formée par la fonte ultérieure de givre et de neige.
Plus précisément, les sels présents dans les dunes auraient fait fondre le givre/la neige à basse température pour former de l’eau liquide salée. Lorsque cette eau salée a séché, le sulfate hydraté précipité, l’opale, l’oxyde de fer et d’autres minéraux hydratés auraient alors cimenté les particules de sable pour former des agrégats de sable, ou même des croûtes, qui se seraient ensuite fissurées. Le processus ultérieur de fonte du givre et de la neige aurait également pu former les autres caractéristiques observées en surface.

De l’eau liquide il y a 400 000 ans
L’âge estimé de ces dunes serait d’environ 0,4 à 1,4 million d’années. Les chercheurs pensent qu’un transfert de vapeur d’eau de la calotte polaire vers l’équateur pourrait avoir eu lieu pendant les grandes phases d’obliquité de la période amazonienne tardive de Mars, conduisant à des environnements humides répétés aux basses latitudes. Un refroidissement dans ces régions aurait ensuite entraîné la chute de givre/neige.
Rappelons enfin que Zhurong, qui s’était placé en hibernation au mois de mai 2022, aurait normalement dû reprendre ses activités en décembre dernier, à peu près au moment de l’équinoxe de printemps dans l’hémisphère nord martien. Cependant, les équipes au sol n’ont toujours pas reçu de signal de « réveil » du véhicule, qui semble aujourd’hui définitivement perdu. Tout porte à croire que Zhurong a été touché par une tempête de sable, réduisant ainsi les niveaux de production d’énergie de ses panneaux solaires.
