Quand les coraux meurent, certains poissons ne perçoivent plus la présence de prédateurs

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La dégradation du corail affecte les signaux olfactifs de certains poissons qui leurs fournissent des informations sur la présence et l’ intensité d’un potentiel danger. En d’autres termes, certains poissons ne perçoivent plus la présence de prédateurs.

La dégradation de l’ habitat est un problème mondial, et l’ une des principales causes de la perte de la biodiversité. C’est notamment le cas dans les systèmes marins tropicaux, où les coraux jouent un rôle crucial. Figurant parmi les plus anciennes formes de vie du monde animal (au moins 500 millions d’années), ils ne couvrent que très peu de surface (environ 0.01% du fond des océans). Pourtant, l’attraction et la concentration qu’ils exercent sur les espèces marines (25% des espèces) font de ces constructions coralliennes de véritables oasis sous-marins occupant un rôle fondamental dans le fonctionnement du milieu aquatique. Problème :  la couverture corallienne sur de nombreux récifs est en forte baisse. Et c’est la faune qui trinque.

En effet, les récifs sont à la fois supports, abris et nourriture pour de nombreux poissons. Leurs formes variées offrent à de nombreuses espèces associées un refuge protecteur. C’est notamment le cas pour les poissons-demoiselles (Pomacentrus amboinensis). Selon une étude parue dans la revue Proceedings of the Royal Society B, ces derniers, tellement dépendants des coraux, se retrouvent bien incapables de ressentir la présence de leurs prédateurs lorsque leur habitat est dégradé.

Pour en arriver à de telles conclusions, deux chercheurs ont placé ces poissons jaune vif dans un environnement composé de squelettes de coraux tout englués d’algues. Ils ont ensuite exposé les poissons à l’odeur d’un prédateur et celle d’un de leurs congénères morts. Résultats : Tandis que les spécimens placés à proximité de coraux en bonne santé réagissaient normalement à ces signaux, en fuyant donc, ceux autour des coraux morts n’ont pas bronché.

Selon nos deux chercheurs, leur habitat, une fois dégradé, empêcherait la propagation de l’odeur. En effet, nous savons que les poissons ressentent l’arrivée imminente d’un prédateur grâce à des signaux chimiques véhiculés dans l’eau. Si les poissons perdent leur radar naturel, ils deviennent alors naïfs, des proies faciles. Selon Oona Lönnstedt, chercheuse à l’Université d’Uppsala (Suède) et coauteur de l’étude, les algues qui recouvrent les coraux morts masqueraient les signaux d’alerte. En d’autres termes, certains composés produits par les algues pourraient désactiver ces signaux. Ainsi les poissons seraient incapables d’y répondre.

Heureusement, ces poissons, qui fréquentent parfois de tels habitats dégradés sont capables d’y survivre grâce à d’autres sources d’information. En se basant sur P. coelestis, par exemple. Habitué à ces milieux, ce cousin est capable d’y sentir les messages d’alerte : s’il fuit, il est alors temps pour nos Demoiselles de faire leurs valises. Comprendre comment certaines espèces peuvent faire face ou s’acclimater aux effets néfastes de la dégradation de l’ habitat et sur les capacités d’évaluation des risques sera cruciale pour définir la portée de la résilience dans les communautés menacées.

Source : Royalsociety