Des cellules artificielles capables de duper des cellules naturelles

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Une équipe de chercheurs annonce avoir créé des cellules artificielles capables de duper des cellules naturelles pensant communiquer avec l’une des leurs.

Le test de Turing est un test d’intelligence artificielle fondé sur la faculté d’une machine à imiter la conversation humaine. Décrit par Alan Turing en 1950, ce test consiste à mettre un humain en confrontation verbale à l’aveugle avec un ordinateur et un autre humain. Si la personne qui engage les conversations n’est pas capable de dire lequel de ses interlocuteurs est un ordinateur, on peut alors considérer que le logiciel de l’ordinateur a passé le test avec succès. Soixante-sept ans plus tard, des chercheurs en bio-ingénierie italiens et américains viennent d’imaginer un prolongement de ce test destiné à quantifier le « degré de vie » d’une cellule artificielle.

Ainsi, il serait aujourd’hui possible de fabriquer des cellules artificielles qui peuvent chimiquement communiquer avec les bactéries. Si dans le cas de l’intelligence des machines, la clé de la mesure était la communication avec les hommes, dans le cas des cellules artificielles, la clé est la communication chimique avec des bactéries unicellulaires : les chercheurs ont mis leurs cellules artificielles en présence de bactéries et ont observé comment elles « dialoguaient ».

« Les bactéries échangent constamment des messages », peut-on notamment lire sur Science & Vie, « et leurs “mots” sont des molécules synthétisées par leurs gènes qui s’envolent vers l’extérieur en traversant les membranes cellulaires. Quand ces molécules atteignent une autre bactérie, elles pénètrent leur membrane, atteignent l’ADN et déclenchent l’activation de gènes. Ceux-ci produisent alors des molécules “réponse”, lesquelles entraînent à leur tour l’activation de gènes de la première bactérie et ainsi de suite ».

Lorsque les cellules artificielles ont été placées près de trois espèces différentes de bactéries vivantes — E. coli, Vibrio fischeri et Pseudomonas aeruginosa —, ces premières ont commencé à produire des protéines en réponse à ces dernières, suggérant ainsi aux chercheurs qu’elles étaient « à l’écoute » de leurs voisins bactériens. Mais il ne suffit pas simplement « d’écouter » lors d’une conversation. Si vous souhaitez convaincre une personne que vous êtes tout aussi vivante, vous devez vous engager dans un dialogue. Une fois que les chercheurs ont pu prouver que leurs cellules artificielles avaient été détectées par les bactéries vivantes, ils leur ont donné la possibilité de communiquer avec elles en produisant leurs propres composés chimiques qui pourraient être interprétés par les bactéries.

Ce processus imite ainsi la façon dont les formes de vie simples communiquent entre elles dans la nature, ce qui signifie que nous pourrions théoriquement créer des cellules qui agissent comme médiateurs pour les organismes qui ont des problèmes de connexion : « ces cellules artificielles peuvent détecter les molécules qui sont naturellement sécrétées par des bactéries et, en réponse, synthétiser et libérer des signaux chimiques vers ces bactéries », explique Sheref S. Mansy, de l’Université de Trento, en Italie. Il reste encore néanmoins du chemin à parcourir. Comme l’explique le chercheur : « la machinerie nécessaire pour la production des protéines à partir de plans d’ARN a été isolée à partir de bactéries vivantes avant d’être implantée dans les cellules artificielles, mais le scénario idéal serait d’avoir des cellules produisant leur propre machinerie de traduction ».

Cela dit, le fait que des bactéries vivantes puissent finalement ne pas faire la différence signifie que nous pourrions utiliser des cellules artificielles pour faciliter la connexion de vastes et complexes réseaux d’organismes. Le contraire pourrait également être possible. L’équipe a constaté que dans certains cas, les cellules artificielles pouvaient interférer avec l’activité des bactéries pathogènes, ce qui signifie qu’un jour nous pourrions les utiliser pour neutraliser des colonies adhésives de bactéries nocives qui sont responsables de plus de 80 % de toutes les infections microbiennes dans le corps.

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