cerveau AVC
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Cet implant boosté à l’IA redonne la parole aux victimes d’AVC bilingues

Après un accident vasculaire cérébral (AVC), les patients peuvent éprouver divers problèmes, notamment une faiblesse ou une paralysie d’un côté du corps, des difficultés à marcher ou à maintenir l’équilibre, des troubles de la vision ainsi que des problèmes de mémoire ou de cognition. Elles peuvent également ressentir des douleurs et des engourdissements. Parmi les troubles les plus impactants figurent toutefois les troubles de la parole et l’aphasie qui se manifestent par des difficultés à comprendre ou à produire le langage. Cela rend alors la communication extrêmement difficile avec leur entourage et peut grandement affecter leur qualité de vie. L’intervention d’un orthophoniste agréé est alors précieuse, mais le travail pour retrouver l’usage de la parole peut prendre du temps. Heureusement, la science progresse et un nouvel implant est source d’espoir.

Et si la technologie des implants neuronaux pour redonner la parole n’a en soi rien de nouveau, les scientifiques de l’Université de Californie (San Francisco, États-Unis) sont cette fois allés plus loin et viennent pour la première fois de mettre au point un implant cérébral boosté à l’intelligence artificielle qui a permis à un survivant à une attaque de communiquer en deux langues : l’anglais et l’espagnol.

Un patient bilingue retrouve la parole près de 20 ans après son AVC

Dans leur étude publiée le 20 mai dans la revue Nature Biomedical Engineering, la douzaine de chercheurs du Centre d’ingénierie neuronale et de prothèses de l’université californienne relate le cas de ‘Pancho’, un homme qui a subi un AVC à l’âge de 20 ans au début des années 2000. Après son attaque, le patient, sévèrement paralysé, avait perdu l’habileté à parler en espagnol (sa langue maternelle) et en anglais (appris plus tard en tant qu’adulte). Ses capacités de communication étaient alors très réduites : il ne pouvait plus que gémir et grogner pour s’exprimer, sans plus pouvoir articuler le moindre mot clair. L’équipe de chercheurs a alors cherché à mettre au point un système qui permettrait de décoder l’activité cérébrale du patient pour permettre de former des phrases intelligibles et pouvoir les afficher sur un écran.

Des avancées grâce à l’implant, mais des limites rapidement identifiées

Sous la direction du Dr Edward Chang, un neurochirurgien et co-directeur du centre de recherche, Pancho a reçu un implant neuronal en février 2019 pour permettre à l’équipe de scientifiques de retracer son activité cérébrale. Ensuite, les chercheurs ont réussi à entraîner son implant à décoder des mots grâce à une méthode d’intelligence artificielle connue sous le nom de réseau neuronal qui permet finalement à l’implant de traiter les données qui lui sont envoyées comme le ferait le cerveau humain. Dès 2021, cette technologie permit ainsi à l’homme de communiquer. Toutefois, il ne pouvait le faire qu’en anglais, ce qui le limitait beaucoup.

« Les décodeurs de langage sont d’abord apparus pour les personnes monolingues, mais la moitié de la population mondiale est bilingue et chaque langue contribue à la personnalité et à la vision du monde de ces individus. Il est donc nécessaire de développer des décodeurs pour permettre aux personnes bilingues de communiquer dans les deux langues », estime le Dr Chang. Les avancées réalisées en 2021 furent ainsi la base qui permit ensuite la mise au point d’un implant bilingue.

implant neuronal concept AVC et autres utilisations
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S’exprimer facilement dans la langue souhaitée selon ses préférences

Après avoir découvert que le cerveau du patient présentait une activité corticale entre les deux langues malgré de longues années sans pouvoir communiquer, les chercheurs ont envisagé d’entraîner l’implant sans avoir besoin de repartir depuis le début et développer un tout nouveau système de décodage. « Nous avons tiré profit de cette découverte en transférant l’apprentissage entre les deux langues. Les données collectées pour la première langue pouvaient ainsi permettre de faciliter l’entraînement d’un décodeur dans la deuxième langue », une possibilité rendue possible par le fait qu’elle se base sur l’activité du cerveau produite grâce « aux mouvements voulus par le conduit vocal du participant, et ce, indépendamment du langage en question », explique le Dr Chang.

En 2022, les scientifiques mirent rapidement cette théorie à l’épreuve… avec succès. Rapidement, le patient a ainsi pu « participer à une conversation, en passant d’une langue à l’autre en fonction de ses préférences », affirme l’étude. Finalement, ces travaux affirment bien démontrer « la faisabilité d’une neuroprothèse pour la communication bilingue » et laissent entrevoir le potentiel de cette technologie « pour restaurer une parole plus naturelle » chez les personnes bilingues atteintes de paralysie, notamment après un AVC.

Julie Durand

Rédigé par Julie Durand

Autrefois enseignante, j'aime toujours autant partager mes connaissances et mes passions avec les autres. Je suis notamment passionnée par la nature et les technologies, mais aussi intriguée par les mystères nichés dans notre Univers. Ce sont donc des thèmes que j'ai plaisir à explorer sur Sciencepost à travers les articles que je rédige, mais aussi ceux que je corrige.