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Crédits : dottedhippo/HELEN COOPER/LEVIN, SCOTT, COOPER ET WEST, JOURNAL INTERNATIONAL D'ASTROBIOLOGIE/Sciencepost

Voici à quoi pourrait ressembler la vie sur Encelade

Il y a plusieurs semaines, des chercheurs ont identifié l’ingrédient manquant à la vie telle que nous la connaissons sur Encelade, à savoir du phosphore dissous. Plus que jamais, la lune océanique de Saturne se présente ainsi comme l’un des corps les plus habitables du Système solaire après la Terre. Mais à quoi pourrait ressembler cette vie ?

Encelade est l’une des cibles privilégiées dans le cadre de la recherche de vie extraterrestre en raison de la présence de son énorme océan souterrain probablement en contact avec son noyau rocheux. Ici, la dissipation des marées est soupçonnée de conduire à une activité hydrothermale où des microorganismes pourraient s’épanouir. Il est en effet désormais prouvé que l’océan d’Encelade contient tous les ingrédients nécessaires à la vie telle que nous la connaissons, à savoir de l’hydrogène, de l’oxygène, du carbone, de l’azote et du phosphore.

Ainsi, pour résumer, nous ne savons pas avec certitude si la vie existe réellement sur Encelade. En revanche, cette petite lune de 500 km de diamètre est aujourd’hui considérée comme l’endroit le plus habitable du Système solaire en dehors de la Terre. Une question se pose alors : à quoi pourraient ressembler ces formes de vie extraterrestres potentielles ?

En 2017, des chercheurs de l’Université d’Oxford avaient tenté de répondre à cette question. L’article intitulé « Les extraterrestres de Darwin« , publié dans l’International Journal of Astrobiology, détaillait comment les mêmes modèles d’évolution utilisés pour expliquer la vie sur Terre pourraient être utilisés pour spéculer sur la vie sur d’autres planètes.

La sélection naturelle à l’oeuvre

Selon Sam Levin, PDG de la start-up biotech MelonFrost et ancien chercheur à l’Université d’Oxford, est conscient que la vie sur Encelade pourrait avoir développé une biochimie totalement différente de celle que nous voyons sur Terre. D’ailleurs, elle pourrait ne même pas être composée d’ADN.

Et pourtant, le scientifique rappelle que la biologie évolutive reste cohérente indépendamment du bloc de construction qui la sous-tend. « Darwin, par exemple, a formé sa théorie de l’évolution sans rien savoir de l’ADN ou de la biochimie de la vie« , a-t-il déclaré. « Il n’y a qu’une seule façon d’obtenir une vie complexe. Et c’est par l’évolution par sélection naturelle. » Nous pourrions ainsi théoriser que des organismes extraterrestres seraient eux aussi soumis au même ensemble de règles évolutives que nous sur Terre. Ces entités seraient alors conçues pour maximiser leur condition physique et pour engendrer un maximum de descendants.

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Illustration d’une possible activité hydrothermale sur et sous le fond marin de l’océan souterrain d’Encelade. Crédits : NASA/JPL-Caltech

Poupées russes et coopération

Sur Terre, ces règles s’appliquent à tous les organismes, même les bactéries les plus simples. Cependant, pour faire évoluer la vie complexe, d’autres facteurs doivent également être pris en compte, dont la coopération. « La coopération est essentielle pour l’évolution de la vie sur Terre pour tout ce qui est au-dessus d’une seule cellule« , explique à Newsweek Stuart West, professeur de zoologie à l’Université d’Oxford et coauteur de l’article. « Donc si nous devions trouver quoi que ce soit qui puisse être vu à l’œil nu, cela impliquerait une coopération à un certain niveau« .

Pour mieux illustrer le concept, imaginez le corps humain comme un ensemble de poupées russes imbriquées les unes dans les autres. Chacun de nous est composé d’une collection de différents organes. Chaque organe est constitué d’un groupe de cellules collaborant pour aider l’organe à remplir sa fonction spécifique et chacune de ces cellules est instruite par des gènes, collaborant et coopérant avec d’autres gènes, et ainsi de suite.

Concrètement, à chaque niveau, les entités tentent de maximiser l’aptitude des entités suivantes. Pour le chercheur, « l’une des prédictions les plus excitantes que nous puissions faire à propos de la vie [potentiellement complexe] sur Encelade est qu’il pourrait également y avoir un type similaire de hiérarchie imbriquée d’entités« . Dans une telle structure, toutes les parties pourraient alors coopérer pour aider l’organisme à faire plus de copies de lui-même.

Quelques exemples d’organismes extraterrestres

En utilisant ces règles de coopération et d’autoréplication, les chercheurs ont alors pu faire quelques prédictions sur ce à quoi pourraient ressembler ces organismes. L’une des créatures décrites, baptisée « Octomite », ressemble à une sorte de tardigrade sous stéroïdes. Telle qu’elle est représentée, cette créature est composée d’une hiérarchie d’entités avec des intérêts évolutifs alignés où chaque partie est capable de se spécialiser sur une tâche spécifique. L’animal peut également se reproduire en faisant bourgeonner des créatures plus petites ressemblant à des larves qui nagent ou s’envolent pour entamer une nouvelle vie ailleurs.

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Une illustration de l’Octomite théorisé. Il s’agit d’un extraterrestre complexe qui comprend une hiérarchie d’entités où chaque collection d’entités de niveau inférieur a des intérêts évolutifs alignés. Crédits : Helen Cooper/ Levin, Scott, Cooper and West.

Les illustrations ci-dessous représentent des organismes plus simples à différents niveaux de complexité. La première est une molécule de réplication simple, sans conception apparente. Une telle molécule pourrait ou non subir un processus de sélection naturelle. La seconde entité est plus complexe, mais encore incroyablement simple, semblable à une cellule. Malgré tout, un tel organisme pourrait être soumis à la sélection naturelle. Enfin, le dernier organisme est représenté avec de nombreuses pièces complexes travaillant ensemble.

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Crédits : Helen Cooper/ Levin, Scott, Cooper and West

Naturellement, notez que les caractéristiques de toute forme de vie potentielle sur Encelade auront évolué dans un ensemble de circonstances environnementales très différentes de celles que nous avons ici sur Terre. Il est par exemple très peu probable que ces créatures aient développé des yeux puisque l’environnement océanique d’Encelade n’absorbe quasiment aucune lumière.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.