Une nouvelle méthode qui implique l’impression 3D révolutionne la fabrication des prothèses oculaires en offrant une solution plus rapide et esthétiquement supérieure aux méthodes traditionnelles. Cette avancée technologique présente des avantages significatifs pour les huit millions de personnes dans le monde concernées, que ce soit en raison d’une malformation congénitale ou d’une perte d’œil.
Les limites du processus manuel
Les prothèses oculaires personnalisées, nécessaires en cas de perte oculaire ou de malformations congénitales, sont un besoin essentiel pour des millions de personnes dans le monde. Traditionnellement, la fabrication de ces prothèses implique un processus manuel complexe réalisé par des professionnels de la santé spécialisés appelés ocularistes.
Dans un premier temps, ils prennent un moule de l’orbite du patient en remplissant temporairement la cavité oculaire avec un matériau de moulage souple. Ce matériau capture la forme spécifique de l’œil et de l’orbite. Le matériau de moulage est ensuite retiré et utilisé comme modèle pour créer une empreinte de cire qui s’adapte à l’orbite du patient. La cire est ensuite lissée, testée et remodelée jusqu’à ce qu’elle s’ajuste confortablement.
Une fois la forme de cire finalisée, elle est utilisée pour fabriquer une version en plastique de la prothèse oculaire. Cette prothèse en plastique est peinte à la main pour correspondre à la couleur et à l’apparence de l’œil sain du patient. Des ajustements supplémentaires peuvent être nécessaires pour assurer un ajustement confortable et une apparence naturelle. Ce processus peut prendre plusieurs heures de travail manuel à un oculariste qualifié. Malgré tout, ces procédés de fabrication présentent des inconvénients en termes de durée et de qualité variable.
Bien que la technologie d’impression 3D ait été envisagée pour simplifier ce processus, les méthodes existantes dépendent toujours d’une conception numérique manuelle et nécessitent une expertise importante, d’où l’intérêt de cette nouvelle avancée.
Une nouvelle technique révolutionnaire
Dans le cadre de récents travaux, des chercheurs ont développé une méthode qui utilise des données d’image provenant d’un appareil de tomographie par cohérence optique pour obtenir des informations sur la forme de l’œil. Dans le détail, la tomographie par cohérence optique fonctionne en émettant des faisceaux de lumière vers l’œil. Les différentes parties de l’œil réfléchissent la lumière de manière différente en fonction de leur structure. En analysant la manière dont la lumière est réfléchie, l’OCT peut créer des images en coupe transversale de l’œil qui fournit des informations précieuses sur sa forme et sa structure.
Ainsi, dans le contexte de la création de prothèses oculaires personnalisées, ces images obtenues par la tomographie par cohérence optique sont utilisées pour comprendre la forme spécifique de l’orbite oculaire et guider la conception numérique de la prothèse. C’est une étape cruciale pour s’assurer que la prothèse s’adapte parfaitement à la structure de l’œil du patient. Ensuite, un modèle statistique est utilisé pour prédire la forme optimale de la prothèse, même avec des données partielles. De plus, l’apparence de la prothèse est créée en s’inspirant de l’œil sain voisin d’une manière automatisée.
Une fois que la forme et l’apparence sont déterminées numériquement, la prothèse est imprimée en 3D avec une imprimante couleur multimatériaux. Après l’impression, des ajustements sont effectués pour respecter les réglementations en vigueur.
Des yeux prothétiques obtenus en 90 minutes
Jusqu’à présent, cette approche a été utilisée pour créer des yeux prothétiques pour plus de 200 patients adultes au Moorfields Eye Hospital (MEH) de Londres, dont dix personnes décrites en détail dans la nouvelle étude. Chacun de ces yeux prothétiques aurait été produit en moins de 90 minutes. En comparaison, les techniques traditionnelles nécessitent souvent jusqu’à huit heures de travail manuel par un technicien qualifié.
Outre sa rapidité, l’impression 3D offre également des avantages esthétiques. Elle crée en effet des yeux prothétiques qui semblent plus naturels que leurs homologues traditionnels. Cette caractéristique pourrait ainsi considérablement améliorer la confiance en soi des patients qui peuvent craindre que leur prothèse soit remarquée.
Cependant, bien que cette avancée offre une solution prometteuse, des défis subsistent, notamment pour les patients qui ont une orbite très complexe pouvant ne pas convenir au processus d’impression 3D. De plus amples recherches, notamment sur l’application de cette technique chez les enfants, sont par ailleurs nécessaires pour évaluer sa viabilité dans divers scénarios. Malgré tout, les chercheurs estiment qu’environ 80 % des adultes qui ont besoin de prothèses oculaires pourraient théoriquement en avoir une de cette façon.
L’équipe prévoit de poursuivre les tests cliniques pour évaluer les performances à long terme de ces yeux imprimés en 3D chez quarante patients du Moorfields Eye Hospital, avec l’espoir de publier les résultats cette année.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Nature Communications.