Y a-t-il de l’huile de requin dans votre rouge à lèvres ?

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L’huile contenue dans les foies des requins aide ces animaux à réguler leur flottabilité. Mais dans les produits de consommation, cette huile, également appelée squalène, est utilisée dans de nombreux domaines, du baume pour les lèvres aux compléments alimentaires. 

Le commerce de l’huile de foie de requin est un phénomène moins connu que celui de l’aileron, mais tout aussi dévastateur. Le squalène est un lipide précurseur commun des hormones stéroïdes aussi bien animales que végétales, et de quelques vitamines, comme la vitamine D. Il est présent dans de nombreuses membranes cellulaires dont il assure ainsi la fluidité, et est particulièrement présent dans l’huile de foie de requin. Mais, de manière beaucoup plus surprenante, le squalène est souvent utilisé comme base pour les cosmétiques modernes ou comme émollient dans les lotions et les hydratants.

Il est utilisé de cette façon depuis plus de 25 ans, selon la revue Cosmetic Ingredient Review du Personal Care Council basé aux États-Unis. L’ingrédient est également présent naturellement dans certaines plantes. L’huile d’olive, l’huile de germe de blé et l’huile de palme en contiennent, mais l’huile de foie de requin en contient beaucoup plus – et elle est aussi malheureusement moins chère à produire.

Les populations de requins ont très largement chuté au cours de ces dernières années, notamment à cause de la pratique du shark finning, qui consiste à arracher l’aileron du requin avant de rejeter la bête agonisante à la mer. Mais l’augmentation de la demande de produits cosmétiques constitue une autre menace pour les populations de requins. Il est difficile de savoir exactement combien de requins sont tués chaque année pour soutenir l’industrie des cosmétiques, mais ils pourraient être des millions, suggère Gavin Naylor, Directeur de la Shark Research interrogé par Newsweek. Selon les estimations actuelles, environ 2 000 tonnes de squalène récoltés chaque année proviennent de foies de requins.

L’huile est extraite depuis au moins 200 ans. Au 18e siècle, le squalène était utilisé pour alimenter les lampes et comme lubrifiant industriel. L’utilisation de cette substance dans les cosmétiques est en revanche un phénomène plus récent. Il y a quarante ans, la plupart des requins tués pour l’huile de leur foie étaient des requins-pèlerins, mais les entreprises se tournent de plus en plus vers les requins des profondeurs depuis que les technologies de pêche le permettent. Le requin « chagrin » (Centrophorus granulosus) est maintenant également chassé pour son squalène de qualité particulièrement élevée.

« Ces animaux sont généralement capturés dans l’Atlantique Nord, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Plus récemment, ils ont été pêchés en Asie du Sud-Est, où la réglementation est moins restrictive », explique Gavin Naylor. Environ 90 % du squalène de requin produit est vendu aux producteurs de cosmétiques, selon BLOOM, un organisme à but non lucratif de conservation des océans français.

Notons également que suite à la préoccupation toujours plus grande du public pour la conservation des requins, de nombreuses entreprises du monde entier ont échangé l’huile de requin de leurs produits contre une alternative à base de plantes – même si sa production est plus chère. En 2008, deux géants des cosmétiques, L’Oréal et Unilever, ont accepté de stopper l’utilisation d’huile de foie de requin comme base pour les crèmes et rouges à lèvres hydratants.

« Certains des plus grands noms de l’industrie cosmétique reconnaissent leurs responsabilités sociales et choisissent de ne pas contribuer à l’extinction de ces animaux importants », avait alors déclaré au Guardian Rebecca Greenberg, membre de l’association Oceana. « Nous encourageons les consommateurs à devenir des acheteurs éduqués et responsables, en interrogeant les détaillants de cosmétiques sur les sources de squalène, et en orientant leurs achats vers les entreprises qui n’ont jamais utilisé ce produit d’origine animale en cosmétique, ou qui ont décidé de le remplacer ».

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