Note aux futurs voyageurs de l’espace : votre coeur va rétrécir

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Crédits : NASA Johnson/Flickr

Selon une nouvelle étude, après quasiment un an passé à bord de l’ISS, le cœur de l’astronaute américain Scott Kelly a rétréci à la manière des nageurs d’endurance, mais il est resté raisonnablement en forme. Ces recherches auront évidemment des implications pour les futurs voyages à long terme dans l’espace.

Le corps humain ayant évolué sur Terre avec la gravité qui lui est propre, notre organisme essuie naturellement quelques changements une fois en orbite. Nous savons que les astronautes ont notamment tendance à avoir la tête enflée, les globes oculaires écrasés et les jambes ratatinées. Leurs os deviennent également plus fragiles et leurs muscles sont atrophiés. Cependant, ce ne sont pas les seuls effets.

Dans l’espace, votre cœur devient plus petit

Dans une étude publiée le lundi 29 mars 2021 dans la revue Circulation, des chercheurs soulignent que la plus grande chambre du cœur de Scott Kelly, qui a passé près d’un an à bord de la Station spatiale internationale en 2015 et 2016 (340 jours), avait également perdu en masse (environ 27%).

En revanche, avoir un cœur plus petit ne semble pas avoir d’effets néfastes sur l’astronaute, selon le Dr Benjamin D. Levine, Professeur de médecine interne à l’Université du Texas et auteur de ces nouveaux travaux.

« Son cœur s’est adapté à la gravité réduite« , a-t-il déclaré. « Il n’est pas devenu dysfonctionnel, la capacité excédentaire n’a pas été réduite à un niveau critique. Il est resté raisonnablement en forme. Globalement, son cœur s’est rétréci et s’est atrophié comme on pouvait s’y attendre en allant dans l’espace« .

Il était en effet prévu qu’une moindre gravité affecte le ventricule gauche de Scott Kelly (la plus grande et la plus forte chambre du coeur). Dans l’environnement de l’ISS, ce dernier n’a pas à pomper aussi fort que sur Terre. Étant moins sollicité, il perd alors de sa forme physique comme tout autre muscle.

Il est en revanche à noter que pour l’astronaute, le rétrécissement de cette chambre s’est produit alors qu’il faisait de l’exercice quasiment quotidiennement à bord de la Station.

Six jours par semaine, l’astronaute courait en effet sur un tapis roulant pendant environ 30 à 40 minutes ou s’entraînait sur un vélo stationnaire. Il s’est également appuyé sur l’exerciseur à contre-résistance ARED. Cette machine, constituée de cylindres sous vide, permet d’imiter les poids et haltères sur Terre.

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L’astronaute Scott Kelly et le cosmonaute russe Mikhail Kornienko en 2016. Crédits : NASA

Vols spatiaux et natation d’endurance

Dans leur article, le Dr Levine et son équipe ont également comparé le cœur de M. Kelly à celui de Benoît Lecomte, un nageur d’endurance de longue distance, alors qu’il tentait de traverser le Pacifique en 2018 (la flottabilité dans l’eau a plusieurs des mêmes effets sur le corps en apesanteur). Rappelons que M. Lecomte a finalement dû abandonner à moins d’un tiers du trajet, son bateau de soutien ayant été endommagé par une tempête.

Toutefois, les chercheurs pensaient que toutes ces heures de baignade (huit heures de nage par jour pendant 159 jours) seraient suffisamment épuisantes pour maintenir le cœur de M. Lecomte. Le Dr Levine pensait même que son muscle allait devenir plus gros, tant il faisait d’exercices. Pourtant, celui-ci avait également rétréci quasiment aussi rapidement que celui de M. Kelly dans l’espace.

Cette conclusion n’est d’ailleurs pas tombée dans l’oreille d’un sourd. À la lecture de cette étude, Scott Kelly a en effet souligné que son cœur avait réagi « comme celui d’un athlète d’élite !« 

Notez que ces atrophies cardiaques ne durent pas à long terme. Les cœurs des deux hommes ont en effet retrouvé une taille normale dès leurs retours sur la terre ferme.

Préparer les missions longue durée

En attendant, un cœur plus petit pourrait être une préoccupation pour les futures missions dans l’espace. Les efforts de Scott Kelly à bord de l’ISS ont permis de limiter la fragilisation de ses os et de ses muscles, mais également de son cœur. Aussi, sans exercices, le ventricule gauche de l’astronaute aurait probablement rétréci davantage, entraînant alors de possibles accidents.

Sur Mars, des problèmes pourraient alors vite survenir si un astronaute était blessé ou tombait malade et ne pouvait pas faire d’exercice physique. Il est également possible que l’équipement tombe en panne. Avec des cœurs plus faibles, les futurs explorateurs pourraient se sentir étourdis et s’évanouir après des mois de voyage en apesanteur. Cela explique donc l’importance de ces travaux qui, à terme, permettront aux agences d’anticiper avec soin la préparation physique des concernés.