Une historienne américaine passionnée par la France explique que la vie parisienne du XVIIIe siècle était aussi « inspirante que frustrante ». Pensez-vous que la capitale était plus calme qu’aujourd’hui ? Si oui, vous avez absolument tort !
Les bruits de pas, le fourmillement des foules, le vacarme incessant des voitures et des sirènes des véhicules d’urgence ou encore les klaxons composent le quotidien des rues de nos villes, Paris en tête. Le bruit en ville est-il propre à notre temps ?
Selon l’historienne Carolyn Purnell, la capitale française était également très bruyante au XVIIIe siècle. Interviewée par le site CityLab, cette francophile a sorti il y a peu un ouvrage intitulé The Sensationnal Past dans lequel elle décrit ce type d’ambiance et les différences avec notre époque.
Dans un premier temps, il faut comprendre qu’au niveau de l’organisation du tissu urbain, Paris n’avait pas la même allure qu’aujourd’hui. En effet, les transformations hygiénistes opérées par Haussmann (dès la moitié du XIX siècle) n’ont pas encore gommé l’apparence encore moyenâgeuse de la capitale. Au XVIIIe siècle, les rues y sont encore sombres, étroites et insalubres.
Carolyn Purnell évoque un « chaos urbain » incarné par une multitude d’activités et d’événements quotidiens se déroulant dans la rue et contribuant à l’animation (bruyante) de la ville. Il est possible d’évoquer les marchands donnant de la voix pour vendre leurs produits, les artisans s’en donnant à cœur joie sur leurs enclumes tandis que les véhicules existants étaient déjà bruyants, mais d’une autre façon : en cahotant sur les rues pavées. Ceci est d’autant plus vrai dans le quartier des Halles qui était le cœur de la capitale avec son marché.
« Les deux observations principales sur lesquelles je suis tombée se divisaient en deux catégories : des plaintes quant aux bruits urbains et des réactions enthousiastes face aux nouvelles denrées », indique l’historienne.
Ces nouvelles denrées en provenance du commerce triangulaire étaient plutôt nouvelles et se vendaient principalement dans des boutiques (ou cafés) destinées aux privilégiés, amateurs de café, de cacao, de thé ou de tabac… Pour les moins aisés, ces produits étaient disponibles sur les marchés sous réserve de se méfier des arnaques.
Selon l’historienne, il s’agit ici d’une notion qui pourrait nous échapper aujourd’hui :
« En se fondant sur la théorie médicale de cette époque, le corps et l’esprit étaient intimement liés et chaque expérience sensorielle avait le pouvoir de changer directement le tempérament d’une personne, ses habitudes et ses désirs. La ville requérait des interactions sociales, du toucher et une attention aux moindres détails. »
Ces interactions sociales étaient donc très différentes en comparaison avec celles d’aujourd’hui, mais le fond reste similaire comme tend à l’affirmer Carolyn Purnell :
« Comment construire une communauté au milieu d’une population immense ? Comment vivre aussi confortablement que possible ? Comment faire la balance entre vie privée et vie publique ? Comment se divertir ? Comment trouver sa voie dans la foule ? Comment s’y retrouver entre le chaos et l’ordre de la vie urbaine ; celle-ci pouvant être, finalement, aussi inspirante que frustrante ? »
Sources : City Lab – Slate