Une nouvelle étude confirme le lien entre le virus d’Epstein-Barr (VEB) et le développement de la sclérose en plaques. D’après ces travaux, l’EBV ne serait pas seulement lié à la SEP : il s’agirait en effet d’un déclencheur essentiel de la maladie neurologique.
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie auto-immune qui s’attaque au système nerveux. La myéline, une gaine recouvrant les fibres nerveuses du cerveau et de la moelle épinière, se retrouve alors endommagée, ce qui a pour effet de ralentir ou d’empêcher les signaux électriques d’atteindre plusieurs parties du corps. Environ 2,3 millions de personnes sont touchées dans le monde.
Des études antérieures ont déjà établi un lieu avec la sclérose en plaques et le virus d’Epstein-Barr (VEB). Ce virus de l’herpès, qui touche plus de 90 % des gens du monde entier avant l’âge de vingt ans, est celui qui cause la mononucléose infectieuse (la fameuse « mono » ou maladie du baiser). On ne sait toujours pas exactement comment ce virus peut déclencher la SEP, ni pourquoi la SEP se développe chez une infime fraction de personnes alors que le VEB est au contraire très courant. Néanmoins, le lien entre ces deux conditions ne fait que se renforcer, en témoignent de nouveaux travaux récemment publiés dans la revue Science.
Un risque 32 fois plus élevé
Pour cette recherche, une équipe dirigée par le Dr Kjetil Bjornevik, de l’Université de Harvard, s’est appuyée sur des échantillons de sérum sanguin prélevés sur plus de dix millions de militaires en service entre 1993 et 2013. Ces échantillons avaient été régulièrement prélevés dans le cadre des dépistages classiques des infections, comme celle du VIH.
Dans la cohorte, 801 personnes avaient développé la sclérose en plaques. Ces patients avaient fourni jusqu’à trois échantillons de sérum avant leur diagnostic, permettant aux chercheurs d’examiner leur composition avant qu’ils ne développent la maladie. L’équipe a également comparé ces échantillons de ces 801 personnes à ceux de 1 566 membres de la cohorte qui n’avaient pas développé de SEP.
Au début de la période d’étude, seuls 35 des 801 personnes touchées plus tard par la SEP avaient été testées négatives à l’EBV. À la fin de la période, 34 de ces 35 avaient finalement développé des anticorps anti-EBV avant leur diagnostic (séroconversion).
Les chercheurs ont ensuite comparé les données de ces 35 personnes initialement négatives pour l’EBV avec 107 membres du groupe témoin qui avaient également été initialement testés négatifs. Ils ont alors constaté que le taux de séroconversion chez les 35 personnes qui développeraient ensuite la SEP était significativement plus élevé que le taux dans le groupe témoin (97 % contre seulement 57 %).
À partir de ces données, les chercheurs ont calculé que les personnes séroconverties avaient un risque 32 fois plus élevé de développer la SEP.
Un lien clair, mais encore mystérieux
On ignore encore pourquoi un seul et unique patient atteint de SEP ne semble pas avoir développé d’anticorps anti-EBV. Cela pourrait s’expliquer par des lacunes dans l’échantillonnage, par le fait que la personne ait reçu un diagnostic erroné de SEP ou qu’elle ait été infectée par l’EBV, mais qu’elle n’ait pas été séroconvertie pour une raison quelconque. Il est également possible que la personne souffre d’un type rare de SEP déclenché par autre chose que l’EBV.
Il est également à noter que les chercheurs ne sont pas uniquement concentrés sur les anticorps de l’EBV. Ils ont en effet ciblé plus de 200 virus. Toutefois, le risque de SEP n’augmentait qu’après une infection à l’EBV.
L’équipe réfléchit également à la façon dont l’EBV pourrait déclencher la SEP. L’une des hypothèses suggère que les composants de l’EBV, en particulier les protéines antigéniques nucléaires de l’EBV, peuvent imiter des parties des protéines de la myéline et d’autres protéines du système nerveux central. Ce processus pourrait inciter le système immunitaire à créer des anticorps à réaction croisée qui attaquent le virus et le corps, causant des dommages au fil du temps.
Enfin, soulignons que si ces nouvelles soulignent un lien clair en l’EBV et la SEP, ce virus n’est clairement pas le seul facteur. Nous savons en effet que la carence en vitamine D, le tabagisme, l’obésité et l’exposition aux UVB peuvent également jouer un rôle.