Des virus inconnus ont été identifiés dans les glaces du Tibet

Glace
Crédits : pixnio.

Une vingtaine de virus jusqu’alors inconnus ont récemment été identifiés par une équipe de scientifiques dans des glaciers tibétains situés à l’ouest de la Chine. Signatures biologiques d’environnements passés, leur présence interroge également sur le risque de remise en circulation d’agents pathogènes dans un contexte de fonte globale des glaces. Les résultats sont parus dans la revue Microbiome le 20 juillet dernier.

C’est en analysant deux carottes de glace prélevées sur la partie occidentale du plateau tibétain, à plus de 6500 mètres d’altitude, que les chercheurs ont fait cette découverte. Grâce à une méthode de séquençage novatrice, ils ont pu identifier le code génétique d’un nombre notable de virus. Les glaces âgées de près de 15 000 ans ont ainsi révélé la présence de 33 virus, parmi lesquels 28 étaient jusqu’alors inconnus. Il s’agit a priori de variétés originaires des sols et des végétaux qui prospéraient jadis dans la région.

« Ces glaciers se sont formés progressivement et, avec les poussières et les gaz, de très nombreux virus se sont également déposés dans cette glace », note Zhi-Ping Zhong, microbiologiste et auteur principal du papier. « Les glaciers de l’ouest de la Chine ne sont pas bien étudiés et notre objectif est d’utiliser ces informations pour refléter les environnements passés. Et les virus font partie de ces environnements ».

virus flocon
Les virus, comme les poussières et gaz présents dans l’atmosphère, intègrent les flocons de neige qui s’accumulent sur les glaciers. Avec le temps, par compaction, ils se transforment en glace et emprisonnent les éléments capturés pour des milliers d’années. Crédits : Public Domain.

Virus, bactéries et climat : une relation complexe et des risques mal évalués

La recherche sur les virus emprisonnés dans les glaces est encore un domaine récent. En effet, la présente étude est seulement la troisième à clairement identifier leur présence dans des glaces naturelles. Or, les enjeux ne sont pas seulement de mieux comprendre le passé récent. Avec le réchauffement climatique actuel et la fonte généralisée qui touche la cryosphère terrestre (calottes polaires, pergélisols, glaciers, etc.), le risque de voir certains de ces agents pathogènes remis en circulation est loin d’être négligeable. Le besoin de recherche est donc plus que jamais d’actualité.

« Nous en savons très peu sur les virus et les microbes dans ces environnements extrêmes et sur ce qui s’y trouve réellement », reconnaît Zhi-Ping Zhong. « La documentation et la compréhension de cela sont extrêmement importantes : comment les bactéries et les virus réagissent-ils au changement climatique ? » Rappelons l’épidémie d’anthrax qui a touché la Sibérie en 2016 et que les scientifiques ont relié au dégel de carcasses de rennes enfouies dans le sol depuis des décennies. La survenue d’un épisode caniculaire avait alors induit une fonte massive en surface, conduisant à la libération de spores encore infectieuses.

Par ailleurs, on sait que des virus comme ceux de la variole et de la grippe espagnole siègent confortablement en de nombreux endroits, pour l’instant préservés par le gel. Ajouté aux mauvaises surprises que pourraient nous réserver les virus encore inconnus, le dégel des glaces apparaît ainsi bien plus pernicieux qu’un simple relèvement du niveau des mers ou un changement dans l’esthétique de nos paysages.