Beaucoup de personnes voient le vieillissement comme un processus de déclin inéluctable, mais aussi, et surtout lent et stable, comme le vent qui cause l’érosion d’une pierre avec le temps. Pourtant, il y a parfois des moments où l’on ressent les affres du temps qui passe plus fortement. On se réveille un matin en se rendant compte soudainement que l’on a plus de rides, que notre corps nous fait mal partout et que tout se casse un peu la figure. On réalise alors tout à coup que l’on est plus tout jeune… et ce n’est pas forcément notre imagination. Une nouvelle étude de l’Université de Stanford apporte une explication à cette sensation dérangeante de ‘coup de vieux’. D’après ces recherches, nous connaissons en effet deux poussées de vieillissement accru dans notre vie qui ont une influence certaine sur notre santé globale.
Des poussées de vieillesse dans toute la population
Publiés le 14 août 2024 dans la revue Nature Aging, ces travaux scientifiques passent en revue un éventail de 135 000 molécules et micro-organismes présents dans les échantillons de sang et d’autres matériaux biologiques de 108 volontaires âgés de 25 à 75 ans récoltés à plusieurs reprises sur plusieurs années. Des bactéries aux champignons et virus de leur microbiome en passant par les protéines, l’ARN et les métabolites, toutes les caractéristiques biologiques ont été étudiées dans les 5 405 prélèvements ainsi obtenus, permettant ainsi d’analyser environ 250 milliards de points de données distincts et de percer les secrets du vieillissement.
L’équipe a alors découvert que nombre de ces diverses molécules changeaient de manière drastique à deux âges spécifiques en moyenne. « Nous ne changeons pas simplement de manière graduelle au fil du temps. Il y a des changements vraiment spectaculaires », a ainsi déclaré Michael Snyder, professeur de génétique à l’Université de Stanford et auteur principal de l’étude, dans un communiqué de presse. « Il se trouve que la mi-quarantaine est une période de changement dramatique, tout comme le début de la soixantaine. Et c’est vrai, quelle que soit la classe de molécules que vous regardez. »
Après analyse des données, les chercheurs ont en effet constaté qu’environ 7 % des molécules et microbes mesurés changeaient progressivement au fil du temps, de manière linéaire. En revanche, 81 % d’entre eux changeaient à des étapes de vie spécifiques. Deux semblent ici particulièrement importantes : l’une autour de l’âge de 44 ans et l’autre autour de l’âge de 60 ans. Des recherches antérieures avaient quant à elles suggéré qu’une autre poussée de vieillissement pourrait survenir autour de l’âge de 78 ans, mais la dernière étude n’a pas pu confirmer cela, car les participants les plus âgés avaient 75 ans ici.
Des changements au niveau de la santé liés à ces pics
Une augmentation des molécules liées aux maladies cardiovasculaires et rénales a été observée dans les deux tranches d’âge, mais plus nettement chez les personnes au début de la soixantaine. Les risques de maladie d’Alzheimer et de maladies cardiovasculaires (à l’instar de l’athérosclérose qui rétrécit les artères) augmentent fortement avec l’âge, comparativement à une augmentation progressive du risque pour les personnes de moins de 60 ans. Cela fait ainsi écho aux chiffres : environ 40 % des personnes âgées de 40 à 59 ans ont effectivement de tels troubles, mais ce chiffre passe à 75 % pour les personnes âgées de 60 à 79 ans.
Cependant, ce sont peut-être les changements qui surviennent autour de l’âge de 40 ans qui ont le plus surpris les chercheurs. Chez les personnes dans la quarantaine, des changements significatifs ont en effet été observés dans le nombre de molécules liées au métabolisme de l’alcool, de la caféine et des lipides ainsi qu’à la peau et aux muscles. Chez celles dans la soixantaine, les changements étaient surtout liés au métabolisme des glucides et de la caféine, à la régulation immunitaire, à la fonction rénale, aux maladies cardiovasculaires ainsi qu’à la peau et aux muscles.
Un vieillissement en lien avec la biologie ou le comportement ? Des incertitudes persistent ici.
Il est possible que certains de ces changements soient liés à des facteurs de mode de vie ou de comportement spécifiques à ces groupes d’âge plutôt qu’à des facteurs biologiques. Toutefois, cela reste pour l’heure incertain.
Par exemple, le dysfonctionnement dans le métabolisme de l’alcool pourrait résulter d’une augmentation de la consommation d’alcool chez les personnes autour de la quarantaine, une période souvent stressante de la vie où les personnes élèvent notamment leur famille. Les chercheurs ne peuvent néanmoins pas affirmer clairement à l’heure actuelle si cela signifie que nous devenons moins capables de décomposer l’alcool ou si les gens en consomment simplement moins en vieillissant.
Aucun lien particulier trouvé entre vieillissement et ménopause
Le premier réflexe des chercheurs a été de se demander si cela pouvait être causé par la périménopause et la ménopause chez les femmes, mais les données ne montrent aucune différence notable entre les hommes et les femmes dans cette tranche d’âge. « Cela suggère que bien que la ménopause ou la périménopause puisse contribuer aux changements observés chez les femmes autour de la quarantaine, il y a probablement d’autres facteurs, plus importants, qui influencent ces changements chez les hommes et les femmes », a déclaré Xiaotao Shen, co-auteur de l’étude, dans un communiqué de presse. « Identifier et étudier ces facteurs devrait être une priorité pour les recherches futures. »
Quelles que soient les causes, cette étude souligne en tout cas l’importance de se concentrer sur la santé autour de ces deux tranches d’âge et de mettre en place de bonnes pratiques avant de les atteindre. Après tout, rien ne retarde mieux la faucheuse et le vieillissement qu’une alimentation saine, de l’exercice et une bonne nuit de sommeil.
Consultez l’étude complète ici et le communiqué de presse sur ce lien.