TOI-1136 exoplanètes
Une illustration du TOI-1136 avec ses planètes et sa jeune étoile. Crédits : Rae Holcomb/Paul Robertson/UCI

La vie pourrait-elle survivre sur des planètes verrouillées ?

Dans l’immensité de l’Univers, les planètes verrouillées par les marées fascinent les astronomes depuis des décennies. Imaginez des objets avec une face baignée de lumière éternelle tandis que l’autre reste plongée dans une obscurité perpétuelle. Malgré leur particularité, ces mondes soulèvent de nombreuses questions sur leur habitabilité et leur potentiel à abriter la vie.

Une frontière entre le jour et la nuit

Le verrouillage des marées est un phénomène physique qui résulte de l’interaction gravitationnelle entre deux corps célestes en orbite l’un autour de l’autre. Dans le cas des planètes en orbite autour de leur étoile, comme c’est le cas pour Mercure avec le Soleil, la gravité de l’étoile peut provoquer un effet de marée sur la planète. Cela signifie que la force de gravité de l’étoile agit différemment sur différentes parties de la planète, étirant et déformant son corps.

À mesure que la planète tourne sur son axe, l’effet de marée tend alors à aligner progressivement son axe de rotation avec son orbite autour de l’étoile. Avec le temps, cela conduit à ce qu’une face de la planète soit toujours tournée vers l’étoile (la face diurne), tandis que l’autre reste toujours dans l’obscurité (la face nocturne). Ce phénomène est notamment responsable du fait que la Lune montre toujours la même face à la Terre.

Un défi pour la vie

Naturellement, vivre sur l’une des faces extrêmes de ces planètes présenterait en effet des défis considérables.

Du côté éclairé en permanence par l’étoile, les conditions seraient en effet extrêmement hostiles. La température pourrait atteindre des niveaux insoutenables et provoquer une chaleur étouffante. Les rayonnements solaires intenses pourraient également rendre la surface de la planète inhospitalière, entraînant des niveaux élevés de rayonnement ultraviolet nocif et potentiellement mortel.

De plus, sans alternance entre le jour et la nuit, les habitants de cette région n’auraient jamais de périodes de repos nocturne, ce qui aurait des implications importantes sur le cycle de vie et les rythmes biologiques.

Du côté nocturne, les conditions seraient tout aussi extrêmes, mais dans l’autre sens. L’obscurité permanente signifierait des températures extrêmement basses qui plongeraient la région dans un froid intense. Sans l’éclairage ni la chaleur de l’étoile, cette face de la planète serait un environnement glacial et inhospitalier où peu de formes de vie pourraient survivre.

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Crédits : ESA / ATG medialab

Une zone « ruban » plus favorable

La ligne de terminaison représente la frontière dynamique entre le jour et la nuit sur les planètes verrouillées par les marées. Imaginez un crépuscule perpétuel où la lumière du jour cède progressivement la place à l’obscurité de la nuit et vice versa. Cette transition constante entre la lumière et l’obscurité pourrait alors créer un équilibre délicat, offrant des conditions potentiellement plus modérées que les faces extrêmes de la planète.

Pour les astronomes, la ligne de terminaison représente ainsi un intérêt particulier, car elle pourrait être le foyer de conditions plus propices à la vie. Dans cette zone, les températures pourraient en effet être plus clémentes, permettant à l’eau de subsister à l’état liquide, un ingrédient essentiel à la vie telle que nous la connaissons. De plus, la présence de lumière du jour et d’obscurité pourrait favoriser une plus grande diversité écologique et offrir des niches écologiques variées pour les organismes à s’adapter.

En outre, il est important de noter que les planètes verrouillées par les marées sont incroyablement répandues dans l’Univers. Cette ubiquité suggère que la recherche de formes de vie sur d’autres planètes pourrait bénéficier de la compréhension de la dynamique et des caractéristiques de ces mondes particuliers.

Encore beaucoup d’incertitudes

La persistance à long terme de ces objets reste cependant une question ouverte dans le domaine de l’astrobiologie. Bien que nous ayons commencé à comprendre les mécanismes qui régissent ces planètes verrouillées par les marées, il reste en effet encore beaucoup à découvrir.

Une des préoccupations majeures concerne la stabilité de l’atmosphère de ces planètes. Étant donné que les planètes en ruban reçoivent un flux constant de lumière et de chaleur d’un côté et sont plongées dans l’obscurité du côté opposé, les conditions atmosphériques peuvent être extrêmes. Si la planète reçoit trop de rayonnement pendant la journée, cela pourrait entraîner un effet de serre incontrôlable qui ferait monter les températures à des niveaux insoutenables pour la vie. D’un autre côté, si la nuit est trop froide, l’atmosphère pourrait se condenser et se transformer en glace, ce qui affecterait également la possibilité de vie.

De plus, les propriétés exactes des planètes verrouillées par les marées sont encore mal comprises. Nous ne connaissons pas encore pleinement leur composition et leur structure interne. Or, toutes ces informations sont cruciales pour évaluer leur potentiel d’habitabilité et leur capacité à soutenir la vie.

Cependant, malgré ces incertitudes, ces planètes représentent des cibles prometteuses pour la recherche de vie extraterrestre. Avec sa capacité à étudier l’atmosphère des exoplanètes et à détecter des signatures chimiques potentiellement liées à la vie, le télescope spatial James Webb pourrait notamment jouer un rôle crucial dans notre quête pour comprendre ces mondes énigmatiques.

Un environnement dynamique et complexe

Les planètes verrouillées par les marées ne se limitent pas à des contrastes extrêmes entre lumière et obscurité. Leur environnement global est influencé par des phénomènes complexes tels que les vents planétaires, les courants atmosphériques et les gradients thermiques. Ces éléments pourraient jouer un rôle clé dans la redistribution de la chaleur entre les faces diurne et nocturne, adoucissant potentiellement les conditions extrêmes. Par exemple, des vents puissants générés par la différence de température entre les deux faces pourraient transporter de la chaleur depuis le côté éclairé jusqu’au côté sombre. De la même manière, des océans ou des calottes de glace pourraient contribuer à réguler le climat en absorbant et en redistribuant l’énergie solaire. Cette dynamique complexe ouvre la porte à de nouvelles hypothèses sur l’habitabilité et les processus pouvant soutenir la vie dans ces mondes à la fois fascinants et déroutants.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.