Et si nos espoirs de trouver une vie extraterrestre se trouvaient sur cette petite lune ?

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Une illustration de la lune Phobos en transit devant Mars. Crédits : JAXA

L’agence spatiale japonaise (JAXA) se prépare pour une mission d’envergure visant à rapporter des échantillons de la lune Phobos d’ici 2029. Ce faisant, les scientifiques espèrent trouver des indices sur les origines des deux lunes martiennes et de Mars elle-même, et peut-être même des traces de vie passée.

Le Japon vise Phobos

La JAXA a récemment confirmé le développement de sa mission Martian Moon eXploration (MMX). L’objectif sera d’atterrir sur Phobos, la plus grande des deux lunes de Mars, dans le but de récolter des échantillons. La matière sera ensuite rapportée sur Terre pour être analysée par une instrumentation de pointe. La mission doit décoller en 2024 avec un retour prévu en 2029. Si tout se passe comme prévu, le Japon rapportera donc ses échantillons martiens avant la mission conjointe de la NASA/ESA censée revenir avec ceux mis de côté par le rover Perseverance au début des années 2030.

Rappelons que ce ne serait pas une première à proprement parler pour l’agence spatiale japonaise. La sonde Hayabusa s’était en effet déjà posée sur l’astéroïde Itokawa en 2005, avec un retour d’échantillons réussi en 2010. Plus récemment, la sonde Hayabusa 2 est revenue sur Terre avec dans ses bagages plusieurs dizaines de grammes de roches recueillies sur l’astéroïde Ryugu.

Selon les plans japonais, la mission devrait arriver dans le système martien en 2025, soit environ un an après son départ. L’orbiteur aura pour objectif d’étudier Phobos et Deimos, les deux lunes martiennes, avant de se placer sur une orbite quasi-satellite (QSO) autour de Phobos pour collecter des données scientifiques.

La sonde se rapprochera ensuite de la lune pour libérer un atterrisseur en surface. Un rover sera alors déployé pour capturer au moins dix grammes d’échantillons à environ deux centimètres sous la surface, puis l’atterrisseur s’envolera dans le but de rejoindre la sonde et de lui transférer la cargaison. Enfin, la sonde reviendra sur Terre.

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La petite lune Phobos. Crédits : NASA

Les objectifs de la mission

L’un des objectifs de la mission sera d’étudier comment l’eau s’est retrouvée transportée entre les corps intérieurs du Système solaire primitif.

Les scientifiques pensent en effet que ces objets planètes étaient au départ trop proches du Soleil pour pouvoir retenir l’eau liquide en surface. Selon la théorie,  celle-ci aurait alors pu être livrée par des astéroïdes. Or, Phobos et Deimos ressemblent à des astéroïdes. Si tel est le cas, ils ont probablement été capturés par la gravité de Mars il y a plusieurs milliards d’années, fournissant son eau à la planète. Mars étant la plus extérieure des planètes intérieures, elle aurait ensuite pu servir de « passerelle » pour ce transfert de matière.

Il est également possible que Phobos et Deimos soient en réalité non pas d’anciens astéroïdes, mais des « morceaux » de Mars éjectés après un impact géant. La mission MMX cherchera à le savoir. Ces travaux pourraient alors permettre d’acquérir de nouvelles connaissances sur le processus de formation de Mars et des planètes terrestres.

En outre, certains experts suggèrent que de par sa position, Phobos devrait être considérée comme possible base dans le cadre d’une exploration humaine de Mars, permettant un accès plus facile à la planète que de s’établir directement sur la planète rouge. L’un des objectifs « annexes » de la mission MMX sera donc de déterminer sa capacité d’accueil.

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Stickney, le plus grand cratère d’impact de Phobos. Crédits : NASA/JPL/University of Arizona

Des traces de vie ?

Enfin, un récent article publié par l’Institut de recherche spatiale et astronautique de la JAXA propose que Phobos puisse également avoir conservé des traces de vie martienne passée.

Pendant des milliards d’années, les impacts de météores ont éjecté des morceaux de la planète assez rapidement pour les projeter en orbite. Certains de ces morceaux sont même tombés sur Terre, à l’instar de la météorite Allan Hills 84001, retrouvée en Antarctique. Il est donc possible que des roches similaires soient présentes sur Phobos. Si Mars était autrefois une planète habitable, certaines d’entre elles pourraient alors contenir des biosignatures chimiques ou même des micro-organismes fossilisés. C’est du moins ce qu’espèrent les scientifiques. La mission MMX pourrait aider à tester cette théorie.

Ryuki Hyodo et Tomohiro Usui, à l’origine de cet article, expliquent également pourquoi Phobos pourrait fournir une occasion unique d’évaluer si Mars abritait autrefois la vie.

Le rover Perseverance collecte actuellement des échantillons dans le cratère Jezero pour un retour ultérieur sur Terre, tandis que la prochaine mission ExoMars de l’ESA débarquera dans Oxia Planum en 2023 pour elle aussi partir à la recherche de signes de vie passée. Ces deux missions sont naturellement très intéressantes et ces deux points de chute n’ont évidemment pas été choisis au hasard. En revanche, bien qu’elles soient mobiles, ces deux missions n’échantillonneront que des zones géologiques relativement limitées.

À l’inverse, des simulations informatiques ont révélé que la surface de Phobos était chargée de matériaux martiens excavés lors d’innombrables petits impacts produits au hasard sur la surface de la planète. Aussi, le fait d’échantillonner des restes martiens sur Phobos pourrait fournir plus de diversité géologique et donc possiblement davantage de chances d’isoler les traces d’une ancienne vie microbienne extraterrestre.