Une équipe de chercheurs annonce avoir créé un programme d’intelligence artificielle (IA) capable de détecter la vie extraterrestre dans des échantillons physiques. Cet algorithme d’apprentissage automatique serait plus précisément capable de distinguer les échantillons biologiques modernes et anciens de ceux d’origine abiotique (incapables d’abriter la vie) avec une précision de 90 %.
Démêler le vivant du non-vivant
Notre capacité à distinguer des substances d’origine biologique et celles formées par des processus chimiques non biologiques sera déterminante dans notre quête de la vie au-delà de la Terre. Cette distinction peut être extrêmement complexe dans la mesure où certains composés chimiques peuvent se former à la fois par des processus biologiques et non biologiques. Or, à ce jour, il n’existe pas de méthode infaillible permettant de le faire. Cependant, nous pourrions bénéficier d’un coup de pouce de l’intelligence artificielle.
Les algorithmes d’apprentissage automatique sont des méthodes informatiques qui permettent aux ordinateurs d’apprendre et d’améliorer leurs performances dans des tâches spécifiques. Il en existe plusieurs types. Certains sont entraînés en utilisant un ensemble de données spécifique et soigneusement préparés pour effectuer une tâche particulière.
Ici, en l’occurrence, les chercheurs ont démontré que leur outil pouvait différencier les échantillons biotiques (avec vie) des échantillons abiotiques (sans vie) en détectant des différences subtiles dans les modèles moléculaires d’un échantillon révélées par l’analyse par chromatographie en phase gazeuse de pyrolyse.
Déterminer la composition d’un échantillon
Dans le détail, ce type d’analyse est utilisé pour étudier la composition chimique de divers échantillons. Elle est parfois utilisée par la NASA et d’autres agences spatiales pour analyser de la matière collectée sur le sol lunaire ou martien.
Concrètement, ces échantillons sont soumis à une pyrolyse. Autrement dit, ils sont chauffés à des températures élevées en l’absence d’oxygène (ou dans un environnement contenant très peu d’oxygène). Cette décomposition thermique provoque alors la rupture des liaisons chimiques dans l’échantillon, produisant une variété de produits de pyrolyse, y compris des gaz, des composés volatils et des résidus solides.
Ces produits de pyrolyse sont ensuite introduits dans un chromatographe en phase gazeuse. Il s’agit d’un outil permettant de séparer les composés en fonction de leurs propriétés chimiques et physiques lorsqu’ils se déplacent à travers une colonne remplie d’un matériau séparateur. Les composés séparés par chromatographie sont alors détectés à mesure qu’ils sortent de la colonne. Les données générées par l’analyse sont ensuite interprétées pour déterminer la composition chimique de l’échantillon d’origine.

Une précision incroyable
Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont utilisé de vastes données multidimensionnelles issues des analyses moléculaires de 134 échantillons connus riches en carbone abiotique ou biotique pour entraîner l’IA à prédire l’origine d’un nouvel échantillon.
Avec une précision d’environ 90 %, leur outil aurait permis d’identifier les échantillons provenant d’êtres vivants, tels que des dents, des os, des insectes, des feuilles, des cheveux humains, ou encore des cellules conservées dans des roches à grains fins, mais aussi des vestiges de vie ancienne altérés par le traitement géologique (charbon, pétrole, ambre, fossiles, etc.). Étonnamment, malgré une dégradation et une altération significatives, cette nouvelle méthode analytique aurait même détecté des signes biologiques préservés dans certains cas sur des centaines de millions d’années.
Naturellement, cet algorithme aurait également permis de distinguer des éléments d’origine abiotique, tels que des produits chimiques purs de laboratoire (par exemple, des acides aminés) et des météorites riches en carbone.
Les chercheurs affirment que ce nouveau test pourrait être utilisé presque immédiatement. « Ces résultats signifient que nous pourrions être en mesure de trouver une forme de vie provenant d’une autre planète, d’une autre biosphère, même si elle est très différente de la vie que nous connaissons sur Terre« , résume ainsi Robert Hazen, astrobiologiste à la Carnegie Institution. Si tel est le cas, nous pourrions alors déterminer si la vie sur Terre et sur d’autres planètes a une origine commune ou différente.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue PNAS.